Guerre de libération de la Côte d’Ivoire : Les ivoiriens à l’épreuve des sacrifices…

Le 21 février 2011 par IvoireBusiness - Embargo économique de l’Union européenne, fermetures des banques occidentales…, la guerre

File d'ivoiriens devant le siège de la Biao à Abidjan.

Le 21 février 2011 par IvoireBusiness - Embargo économique de l’Union européenne, fermetures des banques occidentales…, la guerre

silencieuse fait ses effets tragiques en Côte-d’Ivoire. Cette guerre silencieuse se présente sous forme de sanctions dans trois directions. Sanction en direction des partisans de Gbagbo pour le soutien indéfectible qu’ils lui vouent, contribuant ainsi à renforcer son pouvoir. Sanction en direction des partisans d’Alassane Ouattara pour leur mollesse et leur manque de détermination faisant obstacle à sa « prise » effective du pouvoir par la pression de la rue. Sanction en direction des innocents pour leur innocence. A ces derniers est appliquée la maxime selon laquelle «celui qui n’est pas avec moi est contre moi.» Ces sanctions peuvent paraître absurdes, immorales et sadiques pour tout esprit moraliste. Mais elles s’inscrivent bien dans le par-delà bien et mal de la politique : la fin justifie les moyens. Elles constituent une part des sacrifices auxquels doivent consentir les ivoiriens. Le chemin de leur ciel doit traverser leur désert. Les ivoiriens doivent enfanter leur véritable indépendance par le sacrifice et dans la douleur. Dans le contexte d’une guerre de libération du néocolonialisme, ils doivent, avec Nietzsche, comprendre que «Dans la science des mystères la douleur est sanctifiée: le «travail d‘enfantement» rend la douleur sacrée, -tout ce qui est devenir et croissance, tout ce qui garantit l’avenir nécessite la douleur… Pour qu’il y ait la joie éternelle de la création(…), il faut aussi qu’il y ait les douleurs de l’enfantement».» (Le Crépuscule des idoles). Cette la loi génétique de l’enfantement doit demeurer dans l’esprit de ceux qui ont fait le choix de l’anti-néocolonialisme.
Ces sanctions tous azimuts pourraient s’inscrire dans le dernier schéma devant aboutir à l’intervention armée des mercenaires et des rebelles pour tenter la prise du pouvoir dans un ultime combat. Il s’agirait, par cet embargo et ces fermetures bancaires, de créer une galère généralisée devant faciliter le départ massif des européens de la Côte-d’Ivoire. Ces européens, dont la majorité se compose de français, refusent, jusque-là, de suivre les conseils, recommandations, incitations et autres injonctions de quitter la Côte-d’Ivoire, émanant des autorités de leurs pays respectifs. A leurs autorités, leur demandant de quitter temporairement la Côte-d’Ivoire, ces européens répondent, avec l’artiste Salif Kéita, «Nous pas bouger»! Quand la galère et d’autres formes de contraintes les feront partir, alors l’ultime combat des néocolonialistes contre le Président Gbagbo pourra être engagé.
Il faut rappeler que les pouvoirs politiques en Occident, comme ailleurs, craignent la foudre de leur opinion publique. Or dans le cas de la situation ivoirienne, la mort d’un citoyen occidental (surtout de peau blanche!) pourra déclencher cette foudre. Le Président Sarkozy, responsable de la protection de près de 13000 citoyens français en Côte-d’Ivoire, fait jusqu’ici preuve de prudence. La force Licorne avec son effectif officiel de 900 militaires, ne peut pas en un temps record organiser le rapatriement de tous les français et autres européens dans un climat de guerre violente généralisée.
Après le départ de ces civils occidentaux, que les ivoiriens ne soient pas surpris de constater une autre phase de la guerre. Ce schéma a été opérationnel au Rwanda à la veille du génocide de 1994. Avant le génocide, l’opération Amaryllis a consisté à rapatrier tous les «Blancs». «Quand l’opération Amaryllis s’est terminée, fin avril, dit Jean- Paul Gouteux, le tri était fait. Les Blancs avaient été évacués. On avait tiré le rideau. Les massacres pouvaient se développer dans tout le pays sans témoin étranger, sans Occidentaux gênants, dans la nuit rwandaise…Les responsables français avaient donné leur accord aux tueurs.» (In La nuit rwandaise, p9) Toutefois le Rwanda n’est pas la Côte-d’Ivoire. C’est pourquoi il y a lieu de douter fortement de la possibilité d’un génocide à l’échelle rwandaise, bien que des crimes à caractère génocidaire aient été commis par les rebelles.
Dans la situation actuelle de la Côte-d’Ivoire, l’antagonisme a atteint son paroxysme dans l’irrationalisme du jusqu’au-boutisme. Dans ce duel tragico-épique entre les révolutionnaires(LMP) et les contre-révolutionnaires (RHDP), il faut dire que chaque camp joue son avenir politique. S’ils sortent gagnant de ce duel, les révolutionnaires ne braderont certainement pas leur révolution par des élections. Ils ne piétineront pas tous les sacrifices consentis par un fanatisme démocratique. Le contraire ne se fera pas non plus par les contre-révolutionnaires, et les révolutionnaires pourront, dans ce cas, séjourner dans l’éternité de l’opposition. On ne gagne pas une révolution ou une contre-révolution pour la pendre!

ZEKA TOGUI, copaci_infomail