Rebondissement - Retrait en masse de l'UA de la CPI: L'Union Africaine estime "inacceptable" la façon dont la CPI traite l'Afrique

Par IvoireBusiness - L'Union Africaine estime "inacceptable" la façon dont la CPI traite l'Afrique.

PHOTO: Image d'archives utilisée à titre d'illustration. Récemment, 44 chefs d'Etat de l'UA ont signé une pétition exigeant de la CPI, la libération de Laurent Gbagbo, pour absence de preuves.

Addis Abeba - L'Union africaine (UA) a de nouveau critiqué la Cour pénale internationale (CPI) vendredi, jugeant "totalement inacceptable" la façon "injuste" dont elle traite l'Afrique.

L'Union africaine (UA) a de nouveau critiqué la Cour pénale internationale (CPI) vendredi, jugeant "totalement inacceptable" la façon "injuste" dont elle traite l'Afrique.

"La façon dont la Cour fonctionne, particulièrement son traitement inique de l'Afrique et des Africains, laisse à désirer", a estimé le ministre éthiopien des Affaires étrangères Tedros Adhanom Ghebreyesus, dont le pays assure la présidence en exercice de l'UA, en ouverture d'une réunion ministérielle de l'organisation panafricaine à Addis Abeba.

M. Tedros faisait référence au fait que la CPI n'a inculpé ou jugé que des Africains depuis le début de ses travaux en 2002.

"Loin de promouvoir la justice et la réconciliation (...) la CPI s'est transformée en instrument politique visant l'Afrique et les Africains", a-t-il accusé: "ce traitement inique et injuste est totalement inacceptable".

Les ministres des Affaires étrangères de l'UA préparaient vendredi un sommet extraordinaire des chefs d'Etat et de gouvernement samedi consacré aux relations entre la CPI et l'Afrique. Selon le ministre éthiopien, la réunion a été convoquée à la demande du Kenya, dont le président Uhuru Kenyatta et le vice-président William Ruto sont poursuivis à La Haye.

Des ministres ont cependant écarté le risque d'une décision radicale, telle qu'un retrait collectif de l'UA ce week-end.

Selon le chef de la diplomatie algérienne, Ramtane Lamamra, le sommet pourrait plutôt dire à la CPI: "Si vous n'opérez pas un certain nombre de changements, il va devenir extrêmement difficile de coopérer avec vous".

En mai, dans la foulée de la victoire à la présidentielle de M. Kenyatta et de son colistier William Ruto, poursuivis depuis 2011 pour crimes contre l'humanité, les 54 membres de l'UA avaient quasi unanimement fait bloc derrière Nairobi pour dénoncer un acharnement du tribunal de La Haye contre le Kenya et l'Afrique en général.

L'UA avait demandé sans succès le renvoi au Kenya des poursuites contre les deux dirigeants kényans, le président en exercice de l'UA, le Premier ministre éthiopien Hailemariam Desalegn, accusant même la CPI de "chasse raciale".

Le procès de M. Ruto - et de son co-accusé, l'ex-animateur de radio Joshua arap Sang - s'est ouvert le 10 septembre à La Haye et celui de M. Kenyatta doit débuter le 12 novembre.

Les deux têtes de l'exécutif sont jugées, séparément, pour leurs responsabilités respectives dans les terribles violences politico-ethniques sur lesquelles avait débouché la précédente présidentielle de fin 2007.

Immunité

La Cour a également refusé à MM. Kenyatta et Ruto la possibilité de ne pas assister à toutes les audiences à La Haye, en dépit des obligations liées à leurs fonctions.

Il est "regrettable que nos appels répétés soient tombés dans l'oreille d'un sourd et que nos inquiétudes aient été complètement ignorées", a estimé vendredi M. Tedros.

"La récente attaque terroriste de Nairobi a (...) souligné le besoin pour les dirigeants kényans d'être au premier plan dans le combat contre le terrorisme et de ne pas être distraits de quelque façon que ce soit par la Cour", a-t-il avancé, en référence à l'attaque meurtrière par un commando islamiste d'un centre commercial de Nairobi fin septembre.

MM. Kenyatta et Ruto sont les premiers dirigeants en exercice jugés par la CPI. Or, a souligné M. Tedros, "l'immunité des chefs d'Etat ne peut pas être prise à la légère et notre réunion devra se prononcer très clairement sur la question".

A l'approche du sommet de l'UA, plusieurs voix s'étaient élevées pour dénoncer ces attaques de la CPI par les pays africains. Jeudi, l'ex-secrétaire général de l'ONU Kofi Annan a estimé que le débat à l'UA visait davantage à protéger les "dirigeants" que les "victimes".

"Le message aux victimes, investisseurs et au monde est que les dirigeants du continent sont allergiques aux institutions veillant à ce que chacun rende des comptes", a renchéri l'Institut des Etudes stratégiques (ISS), centre de réflexion spécialisé sur l'Afrique.

Des critiques balayées par le ministre soudanais des Affaires étrangères Ali Karti.

Selon lui, une déclaration claire de l'UA contre la CPI n'encouragera pas l'impunité car "les pays africains ont leurs propres mécanismes judiciaires, qui s'avèrent être bons, meilleurs que les européens". Le président soudanais, Omar el-Béchir est visé par des mandats d'arrêt de la CPI pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité et génocide dans le conflit du Darfour, une vaste région de l'ouest du Soudan.

Au coeur de la polémique, Nairobi a de son côté tempéré.

"Nous sommes préoccupés par un certain nombre de choses qui se passent à la Cour, oui. Mais nous n'avons jamais dit que nous allions nous retirer", a assuré la chef de la diplomatie kényane, Amina Mohamed, affirmant que son pays entendait "rester" un Etat membre.

Source: AFP