Pasteur Moïse Koré, depuis l’exil : « Je rentrerai au pays si… »

Par NOTRE VOIE - Pasteur Moïse Koré « Je rentrerai au pays si… ».

En exil au Ghana depuis le renversement du président Laurent Gbagbo, le pasteur Moïse Koré, chef de la communauté
évangélique dont l’ex-chef de l’Etat ivoirien était l’un des fidèles,
parle. Il répond, avec le franc-parler qu’on lui sait, à tous ses détracteurs.

Notre Voie : Comment puis-je vous appeler, pasteur Moïse Koré ou gourou Moïse Koré comme vous présente l’hebdomadaire Jeune Afrique dans un article paru le 4 février 2014 ?

Koré Moïse : Si je m’en tiens à la définition Wikipedia, le gourou est le guide d’un groupe spirituel, en particulier
qui se réclame d’une tradition issue de l’hindouisme. Le manipulateur d‘un groupe religieux sectaire.n Un expert dans un domaine Particulier (notamment en informatique ou en management) dont les avis sont largement
reconnus et respectés. Par exemple, John Carmack est considéré par certains
comme un « gourou de la programmation informatique
3D ». Michael Porter ou Tom Peters seraient des
gourous en management. Je n’en suis pas un, donc laissez la responsabilité à
ceux qui emploient de tels
mots. Notre pays, la Côte d’Ivoire, est dans un combat qui dure plus d’une décennie
et pour avoir ou fragiliser le Président Gbagbo, on s’est attelé systématiquement à
salir son entourage. L’hebdomadaire Jeune Afrique qui
n’en est pas à sa première tentative constitue l’un des porte-voix de cette instrum
e n t a l i s a t i o n . Je dirais que c’est de bonne guerre et je regarde tout cela avec amusement et pitié. Je
suis un Serviteur de Dieu et je n’en ai pas honte. Je suis ce que je suis. J’ai laissé des
traces dans mon pays qu’on peut consulter et je ne me renierai jamais à cause des
commentaires de cupidité d’un journal fut-il Jeune Afrique qui prétend parler de l’Afrique mais en détruit l’essence à chacune de ses parutions
parce que tout simplement aux ordres de
son ventre et de ses maîtres.

N.V : Le confrère vous
accuse, notamment, d’avoir manipulé le Président
Gbagbo en lui faisant croire qu’il était un
messie pour la Côte d’Ivoire avec un destin divin. Qu’en est-il exactement
?
K.M : Je lui laisse la responsabilité
de ses affirmations et j’aurais souhaité qu’il ne se contente pas d’affirmations gratuites, mais de faits avérés. Ne dit-on pas qu’en matière de journalisme, la crédibilité se mesure en la matérialité des faits? Autrement
dit, les faits sont têtus. Si je me lève demain et que j’écris que Jeune Afrique est
financé par les services occidentaux est-ce que c’est de l’information? Pour que cela devienne une information crédible, il faut que j’en apporte la preuve. C’est tout ce que je demande à ce journal.
Ensuite, ce serait faire une insulte au Président Gbagbo
à qui tous reconnaissent la valeur intellectuelle et le sens aigu du jugement et du raisonnement
que d’affirmer
qu’il est manipulable. Enfin, je voudrais terminer en disant ceci, on peut ne pas aimer Dieu, ni la Bible mais
pour nous qui avons la foi, Dieu est le créateur de chaque homme sur cette terre et il connaît exactement le destin de chacun de nous. Il nous indique clairement la voie à suivre pour vivre pleinement
sur cette terre qu’il a créée et qui obéit à des commandements et règles qu’il a
établis. On peut ne pas y croire, c’est le principe du libre choix, mais qu’on ne s’érige pas en juge de la foi
d ’ a u t r u i . C’est apparemment le jeu favori de Jeune Afrique qui ne s’est jamais posé de questions sur la foi des rois et émirs du golfe, de la foi des dirigeants européens et de l’Asie mais chaque fois qu’il
s’est agi de la foi évangélique alors il s’en donne à coeur
joie. La BIBLE gêne-t-elle autant ? Après moi, ce fut le chef de l’Etat béninois, Yayi
Boni, attaqué pour sa foi chrétienne. Est ce cela
l’agenda de leurs maîtres du nouvel ordre mondial ?

K.M : Avez-vous érigé un temple de prière au palais présidentiel visant à conditionner l’entourage
de l’ex-chef de l’Etat ivoirien ?

KM : Je ne pense pas et
aucun ivoirien ne vous dira que j’ai participé à la construction de la Résidence du chef de l’Etat de Cote d’ivoire pour y ériger un temple. Dans ce qui était bâti, il était prévu une chapelle que nous n’avons du reste jamais utilisée. Pour tous ceux qui y allaient, le culte hebdomadaire du dimanche aprèsmidi se tenait au bâtiment D et il s’y tenait pour plusieurs raisons. Pour des raisons de respect de Dieu que nous adorons et pour des raisons de sécurité pour le Président et son épouse. L’endroit où notre lieu de culte était situé apparaissait dangereux du point de vue sécuritaire, c’est pourquoi il a été convenu que le culte se tienne à cet endroit. Vous connaissez
l’amour du peuple de Yopougon pour le Président, cela entraînait chaque fois qu’il y
venait, une ferveur telle que nos cultes étaient dénaturés dans leur essence par des militants désireux de toucher
leur patron et la nervosité de la garde présidentielle qui devait veiller à la sécurité de
son chef. Cela entraînait souvent des désagréments pour les fidèles. C‘est la raison pour laquelle les cultes ont été déplacés au bâtiment D
sur proposition du Président lui- même.

N.V : Quel était le poids des pasteurs au sein du régime Gbagbo puisque des rumeurs l’évoquent?

K.M : Allez demander à ceux qui colportent ces rumeurs de vous en donner le
poids. En ce qui me concerne, je ne suis pas politicien, je n’en ai jamais fait. Je ne crois pas que j’en ferai
un jour. Je ne me mêlais donc pas de ce qui ne me regardait pas.

N.V : Vous vivez en exil depuis 2011, comment avez-vous échappé à la furia des rebelles pro-
Ouattara à Abidjan qui vous avaient dans leur viseur ?
K.M : J’étais hors du pays quand ce grand malheur s’est abattu sur notre pays.

N.V : Votre église évangélique Shékina Glory continue-t-elle d’exercer en Côte d’Ivoire en dépit de votre absence ?

K.M : L’Eglise n’est pas ma propriété, c’est le champ de Dieu qu’il nous confie temporairement
comme bergers. Si un Berger n’est pas à son poste, il est remplacé et la vision de Dieu continue. Je me
définis donc comme un chrétien ordinaire depuis que les choses se sont passées ainsi et la communauté a un nouveau leadership.

N.V : Quand comptezvous rentrer d’exil et à quelles conditions ?

K.M : La Cote d’Ivoire est mon pays et j’y rentrerai certainement. Je puis vous l’assurer quand les conditions de sécurité et de vie seront redevenues normales et que chaque ivoirien pourra, comme moi, le constater et pourra regarder son frère comme un frère et non comme un ennemi. Des discussions politiques sont en
cours, j’en attends les résultats pour agir selon l’accord qui aura été trouvé. Si cela
me sied pourquoi ne rentrerais- je pas chez moi pour retrouver, parents et amis?

N.V : Une délégation du Fpi s’est rendue au Ghana pour y rencontrer les exilés politiques.
Avez-vous pris part à la rencontre ?

K.M : J’y ai assisté comme tout Ivoirien en exil dans ce pays frère. Je suis aussi un
exilé donc ce qui s’y disait m ’ i n t é r e s s a i t .

N.V : Quel était le message et y avez-vous adhéré ?

K.M : Ceux qui sont venus ici au Ghana ont la primeur des discussions et de ce qui a
été dit. Il ne m’appartient pas d’en parler, je pense qu’en temps opportun, on le saura tous.

N.V : Connaissez-vous un pasteur nommé Guy Ablé que des journaux proches du régime Ouattara accusent d’être en connivence avec des pasteurs et des exilés politiques dont vous pour être candidat
contre Alassane Dramane Ouattara en 2015
?
K.M : Je connais le Prophète Ablé Guy. De là à m’associer à une campagne présidentielle à ses côtés, sans l’avoir vu depuis au moins cinq ans, relève de l’affabulation. Cela révèle encore de la légèreté de certains de vos confrères. Sans preuve, ils se mettent à dire des choses de ce genre. S’ils ont des sources et des
preuves de ce qu’ils avancent alors qu’ils les publient, c’est ce qui serait plus logique, au
lieu de faire dans le sensationnel. Un mauvais scoop peut couler un journal qu’ils le sachent car l‘audience se mesure à la crédibilité des informations. Aujourd’hui, nous sommes, d’autres Ivoiriens
et moi, dans la position de victimes que des bandits ont ligotés et qui sans défense
reçoivent des coups de toutes parts. Mais nous savons tous comment ce genre
de film se termine toujours, alors cela me glisse sur la peau. Tôt ou tard, nous nous
retrouverons pour nous regarderons les yeux dans les yeux afin de gérer les accusations
de ce genre et les résoudre selon la loi.

Interview réalisée par Didier Depry
didierdepri@yahoo.fr