Front populaire ivoirien : Ce grand parti ne doit pas continuer dans des Rattrapages et des approximations. Pourquoi doit-il adapter ses pratiques aux réalités ? Par Claude Koudou

Front populaire ivoirien : Ce grand parti ne doit pas continuer dans des Rattrapages et des approximations. Pourquoi doit-il adapter ses pratiques aux réalités ?
Une Contribution ouverte de Claude KOUDOU.

Le parti de Laurent Gbagbo au cours d'une réunion du comité central. Image d'archives.

Avant tout propos, il faut saluer et encourager le travail du Président par intérim du Front populaire ivoirien (FPI), Sangaré Aboudrahamane et de son équipe. Lequel travail est fait dans un environnement très hostile. Après, il s’agit de dire des choses de fond. Les mêmes causes produisant les mêmes effets dans les mêmes conditions normales de température et de pression, on pourrait s’en vouloir de ne pas dire les choses lorsque les élans piétinent à cause d’un agencement inadapté des priorités. Nombre de membres de la direction du FPI se comportent encore comme si rien ne s’était passé en Côte d’Ivoire. Pourtant 2002, 2004 et 2011 sont passés là.

Quel est l’état de la situation au pays ? Laurent Gbagbo et Blé Goudé sont à La Haye. Des personnes dont l’ex-première Dame et des anciens ministres sont emprisonnés arbitrairement ; des enlèvements se poursuivent dans l’indifférence ; des cadres du régime de Laurent Gbagbo continuent de mourir en exil ; des villages et des villes sont mis à feu et des tueries se poursuivent. Un tel régime qui organise tout contre lui, ne peut pas rester au pouvoir. Mon interpellation invite donc à prendre toute la mesure de la situation afin de trouver des solutions à la hauteur des enjeux.

Souvent, il est plus commode que les choses soient dites en interne pour ne pas prêter à la fragilisation des siens. En même temps, des comportements qui s’imposent en institutions tendent aussi à contribuer à pourrir la santé de tout le parti. En fait, parce que le monde a évolué, il y a un équilibre à trouver entre des démarches qui doivent être circonscrites à des échanges en interne et d’autres qui méritent d’être ouvertes surtout quand les premières sont « grippées ». Le rôle des responsables du FPI consiste aussi à reprendre les déçus de la politique de la refondation qui n’a d’ailleurs pas pu aller à son terme. Depuis des années mais surtout au travers de cette crise, il s’est installé une sorte de chape plomb qui amène que des choses ne soient pas dites. A côté d’un angélisme méthodique, il y a des choses qui sont considérées comme tabous et doivent rester dans l’omerta parce qu’on fâcherait des aînés.

Pour ma part, de recherche en recherche, d’écoute en écoute, d’expérience en expérience, il m’est apparu judicieux de faire cette contribution ouverte au vu de la situation que traverse notre pays. Il importe de commencer par dire qu’un parti politique n’est ni une association ordinaire ni un club ni une secte. Le Front populaire ivoirien s’est toujours inscrit dans le paysage politique ivoirien comme un parti de masse. Et c’est l’image que les Ivoiriens – et d’autres Africains qui suivent les choses – en ont.

Si nous en sommes là, ce n’est pas uniquement parce que le « méchant-blanc » ou le blanc-méchant » ne veut pas que ce parti soit aux affaires. C’est aussi et peut-être même surtout parce que nous-mêmes manquons de rigueur.

Les militants, les sympathisants et des soutiens de Laurent Gbagbo grognent et ne comprennent pas pourquoi il y a des rigidités ou de la rétention par rapport à des initiatives qui pourraient grandement apporter à la lutte. Souvent, parce qu’on ne veut pas en rajouter aux difficultés, alors on se tait. Mais aidons-nous ainsi le parti en manquant de recadrer ceux qui cultivent des dérives ou des comportements déviants ? Il me semble que les uns et les autres doivent prendre leurs responsabilités en toute lucidité. Certes, il y a eu un complot contre Laurent Gbagbo. Mais que faisons-nous des échecs ? Parce qu’il y a eu échec ! Le plus apparent est au moins que le complot contre le Président Laurent Gbagbo – qui a choisi des gens pour l’épauler dans sa vision -, a réussi. Il faut donc rénover les méthodes et les pratiques en ouvrant les yeux. Au pouvoir, il y a des camarades qui se sont improvisés spécialistes dans certains domaines. Leur entêtement immodéré à penser qu’ils pouvaient avoir raison sur tout, a contribué à notre chute ou du moins n’a pas réussi à l’éviter. De ceux-là, certains continuent de se tirer la couverture. Ce manque d’humilité vient insulter ceux qui restent engagés spontanément dans la lutte et/ou qui s’apprêteraient à la rejoindre. Il me semble qu’on peut réinventer une démarche politique empreinte d’imagination et d’inventivités, avec des anciens qui veulent changer. Mais on ne peut pas faire du neuf avec des anciens qui, ne voulant pas changer, s’enferment dans leurs certitudes et/ou dans un autisme inacceptables. Surtout que la science infuse n’habite personne. Il faut absolument repenser la pratique politique en cultivant mieux la proximité, en étant à l’écoute de la base et en prenant en compte les suggestions dans la conduite des affaires du parti. Car nous sommes un parti socialiste.

Les rapports du Front populaire ivoirien avec la Diaspora

Il y en a qui se méprennent encore sur le fait que les centres de décision de nos politiques africaines se trouvent dans les lieux de résidence de la Diaspora. Cet aspect mérite d’être examiné sérieusement.

Nous avons vu que dans le pays qui attaque la Côte d’Ivoire, en l’occurrence la France, l’on a laissé Affi N’guessan – sans droit de regard – garder à la tête de la Représentation du FPI (pendant treize ans) une dame qui pouvait faire des choses sauf de la politique qui solidifie et ancre le FPI à l’international. Aussi, la France étant le plus grand pays d’accueil de la Diaspora ivoirienne, il n’est pas acceptable que l’état du parti soit ce que nous observons et que rien n’est fait pour défaire le statu quo. Mais l’état de léthargie du parti n’habite pas que la seule France. Cela doit pousser à une réflexion en profondeur. Il faut arriver à effectuer une réelle distribution du travail et s’en tenir à cela, en établissant par exemple des cahiers de charges dont la mise à exécution doit faire l’objet d’évaluation à des dates indiquées. Les tournées au pays ne peuvent pas empêcher que des campagnes de sensibilisation se fassent aussi à l’international. Souvent, le parti a mis « tous ses œufs dans un même panier ». Il n’est pas judicieux que les choses continuent ainsi.

Par ailleurs, quand Affi N’guessan provoque une crise au FPI, le parti ne se mobilise pas d’une façon ou d’une autre pour expliquer, sensibiliser et rassurer ses militants sur - au moins en Europe - cette implosion fratricide. Laisser les militants livrés à eux-mêmes sur des réseaux sociaux ne paraît pas pertinent en termes de gestion des ressources humaines. Car si certains cadres sont assez forts psychologiquement et mentalement pour amortir le choc de la trahison, il n’en est pas de même pour les militants et sympathisants en général.

Concernant l’importance de la Diaspora, certains petits partis ivoiriens ont tellement bien compris les choses qu’ils font de l’activisme en Europe surtout dans l’Hexagone. Le FPI ne doit pas regarder cet état de fait surtout quand des activistes associatifs se croient investis de pouvoirs qui les autoriseraient à peser sur le Front populaire ivoirien. Des membres de la direction du parti favorisent cette situation ; certains pour des desseins malicieux et d’autres pour des objectifs inavoués. En fait, ce moment de difficultés se trouve être l’occasion pour certains de cultiver des envolées carriéristes pour se positionner. Dans l’entendement commun, un poste dans la direction d’un parti est pour accomplir une tâche. Ce n’est pas une position pour une « jouissance personnelle ».

La gestion d’un parti politique doit aussi s’inspirer des considérations sociologique et psychologique de ses différentes cibles. Même si des membres de la direction sont nommés dans la Diaspora, cela ne suffit pas comme signal d’accompagnement. Parce que certains des membres de cette même direction, ne comprenant pas l’intérêt qu’il y a à la mutualisation des efforts, tirent sur les ficelles dans la Diaspora. Ils parlent alors accessoirement du parti au détour de courses pendant leurs passages par la France ; ils ne prennent pas le temps qu’il faut pour écouter, se croyant investis de mission qui les autoriserait à décider tout seul de haut. Aussi, me semble-t-il que du fait du manque de solidarité à l’endroit de militants, pendant l’exercice du pouvoir, des frustrations se sont accumulées. Même si les faits sont réels, il reste que beaucoup d’Ivoiriens ne comprennent pas pourquoi après dix ans, il n’y ait rien comme moyens disponibles pour travailler à replanter le parti. Pour cela, il faut des missions spécifiques pour exposer une opération d’autocritique et repartir sur de nouvelles bases. L’égocentrisme, l’arrogance et la suffisance qui existent encore chez certains sont inadmissibles lorsque le peuple attend que le FPI soit vraiment à la hauteur des enjeux. En faisant son aggiornamento d’une part et en envoyant des messages clairs de l’autre, il pourra multiplier les adhésions.

La place de la Diaspora et de la jeunesse dans le projet de société du Front populaire
Il faut dire que le peuple ne doit se mobiliser que s’il reçoit un message qui lui donne de l’espoir. Si une jeunesse ne voit pas une perspective à l’horizon, elle ne voit pas pourquoi elle ferait de nouveaux sacrifices.
Sur la Diaspora, nous prendrons deux exemples de diaspora pour illustrer notre propos :
• La diaspora chinoise
L'arrachement au territoire d'origine a pour conséquence que le territoire est partout et nulle part. Il devient donc imaginaire en s'accompagnant d'une mythification et d'une mystification de la terre d'origine.
La perception des échanges et des relations au-delà des frontières se fait à travers une double référence spatiale : le local et l'international reliés par une multitude de réseaux d'un point à un autre (de localité à localité) davantage que d'un pays à un autre .
• La diaspora israélienne
« Israël et Diaspora » est très édifiant pour être une boussole dans notre combat politique. « Le traumatisme … prit en Israël la forme d'un mot d'ordre : plus jamais cela ! Ne plus jamais vivre dans des conditions où notre existence, son affirmation ou sa négation, serait déterminée par d'autres, et où nous serions les récepteurs passifs de notre destin. Nous voulions être responsables des décisions vitales auxquelles nous ne pouvions nous dérober. Cela entraîna des réactions telles qu'on n'en avait pratiquement jamais connu au sein de notre communauté, et qui, en tous cas, ne furent jamais un phénomène central à ses propres yeux.
En Israël, bien des choses ont été déterminées par la volonté passionnée de faire en sorte que la tragédie des Juifs, qui s'était déroulée alors que les grandes puissances s'en étaient tenues à un silence équivoque, ne se reproduise plus. Le problème de la violence qui, dans notre vie, ne jouait auparavant qu'un rôle marginal, et était même rejeté comme tel par nombre d'entre nous ou ne pénétrait pas notre conscience, se posait expressément et de manière inéluctable.
Auprès des deux exemples cités ci-dessus, celui de la Côte d’Ivoire est également illustratif. En effet, parce que le pouvoir local, dans son élan de confiscation des libertés et de musèlement de l’opposition s’avère féroce, les pays d’accueil de la Diaspora, notamment ceux de l’Europe et des USA se sont imposés comme théâtres d’expression des vagues de protestation, en vue de dénoncer la dictature dans notre pays. Mais plus, la diaspora ivoirienne, à l’image de celle globale africaine, fait des transferts de fonds pour venir en aide à des parents où proches, restés dans les pays d’origine.
Ces considérations plaident sans ambages pour qu’il soit mis en place une véritable passerelle entre le pays et les Ivoiriens de la Diaspora mais particulièrement entre le FPI et la diaspora ivoirienne. Notre parti devrait donc s’investir résolument pour envoyer un signal de confiance en direction de cette partie de nos ressortissants qui sont disponibles, mais qui attendent un message direct. Il faudrait mener la réflexion de façon ouverte parce que les retombées bénéfiques peuvent être inestimables.
La place de la jeunesse
Dans nos pays en quête de liberté, la jeunesse doit être vue comme un enjeu social et politique, sur la socialisation et les formes de transmission générationnelle. Une jeunesse est par définition fougueuse. Alors, même si elle a besoin d’être guidée, elle apprécie qu’on la valorise. Quand une jeunesse est oisive surtout quand elle a acquis un minimum d’apprentissages, elle peut devenir dangereuse pour toute la société. Par définition, une jeunesse qui n’est pas préparée à prendre la relève ne saurait la faire spontanément lorsque des échéances ou certaines contingences peuvent l’exiger.
Le temps de la lutte est une période spéciale qui demande qu’il soit fait preuve d’inventivité et d’imagination pour affronter le système d’asservissement et de prédation qui sévit dans le pays. Cela nécessite par ailleurs une répartition réelle des tâches sinon une véritable division du travail qui soit à la hauteur des enjeux. « Lorsqu’on entend, nous sommes dans la braise ici ; les choses se passent ici ; …). Non ! L’histoire nous a montré que cette vision des choses est erronée. Il faut noter que Nkosazana Dlamini-Zuma, Oliver Tambo, et Thabo Mbeki de l’ANC ont fait l’exil à Londres … On ne peut pas penser que la lutte au pays est la seule qui soit utile.

La stratégie de communication du FPI ne peut pas s’accommoder d’approximations. Communiquer : C’est identifier le bon message, construire le bon argumentaire et les éléments de langage appropriés à chaque situation, suivant la nature de la cible ; le contexte du champ d’expression et la prise en compte de la culture sociologique, psychologique et démocratique des observateurs (auditeurs comme téléspectateurs) sont des éléments essentiels qui ne doivent pas alors souffrir d’improvisation. Le parti de Laurent Gbagbo ne doit pas agir dans des rattrapages.

La pression des « cyber-activistes » qui pousse à produire un communiqué sur la saisine de la justice contre Affi N’guessan est illustratif du manque de volonté à faire des prévisions ; donc à anticiper parce qu’il n’est pas donné une place réelle aux réflexions prospectives.

J’ai observé les choses ; j’ai mesuré et j’ai profondément éprouvé le besoin de décliner ce que ressens, comme nombre de « sans voix ». A la lumière de moult observations, lorsqu’on sent des choses ou quand on les voit, le rôle des responsables est de contribuer à ce que cela change. On ne peut pas réduire les partisans à la résignation par manque de perspectives clairement affirmées.

Les circonstances de la tenue du Congrès de Mama n’ont pas permis de faire le point réel que les militants de ce parti attendaient. Néanmoins, il ne faut pas considérer le sursis tacite accordé au FPI comme un blanc seing. L’injustice faite à Laurent Gbagbo motive une tolérance sans limite qui rejaillit alors sur son parti. Il faut plutôt capitaliser cette bienveillance du peuple qui n’est en aucune manière de la naïveté. Parce que le peuple de Côte d’Ivoire sait ce qu’il veut.

Dans la vision de transformation de la société ivoirienne, nous constatons que le Président Sangaré Aboudrahamane avec Laurent Akoun et quelques autres ont la volonté de faire avancer les choses. Mais leurs élans sont plombés par des camarades qui mettent leurs égos, leurs calculs et leurs postures au-dessus de l’intérêt du peuple. Il faut se mobiliser à changer ces pratiques parce que les enjeux sur la Côte d’Ivoire sont beaucoup plus grands que de petites démarches nombrilistes.

Nombre de camarades de la direction du parti n’ont pas compris que Laurent Gbagbo est un homme humble qui sait se plier en cas de besoin. Il a donné des chances à des camarades. Ceux-là ne les ont pas capitalisées dans le sens de l’intérêt du peuple. On ne peut pas prendre les mêmes pour recommencer. Les « clans » qui s’entendent pour imposer le silence à ceux qui se battent contre des dérives et l’immobilisme sont dépassés. Je suis fondamentalement convaincu qu’il faut faire autrement.
A côté des pratiques qui rigidifient les élans, le copinage, le manque de rigueur, l’attentisme et des lourdeurs semblent ne pas gêner. Les habitudes changeraient plus tard. Dit-on ! Pour excuser ? Mais pourquoi changeraient-elles demain si aucune amorce n’est perceptible ? C’est maintenant que les pratiques doivent changer !

Qu’est-ce qui résiste à la mise sur pied d’un front contre la gouvernance d’Alassane Dramane Ouattara. On ne voudrait pas fréquenter ou associer certains acteurs du paysage politique ivoirien parce qu’ils seraient corrompus soit matériellement soit psychologiquement et mentalement. C’est une vue qui paraît réductrice. L’inclination à tomber dans le piège de l’ancien colonisateur qui arrive souvent à nous diviser est malheureusement vivace. Quand même, à quelques variables près, les Ivoiriens sont les mêmes avec des peurs, la versatilité et autres travers sous le Président Houphouët. Laurent Gbagbo avait quand même su rallier les syndicats et d’autres acteurs de la société. Pourquoi croire que parce que la CNC n’a pas marché, on devrait se méfier de tout le monde. Pourtant, les foyers de mécontentement se multiplient au pays.

D’ailleurs, aucun point n’a été fait aux Ivoiriens sur la CNC. En plus, des mouvements et partis politiques sont pléthoriques dans l’opposition parce que les jeunes ne voient pas une lueur de rajeunissement dans les pôles de décision. Le rassemblement de ceux qui sont favorables à Laurent Gbagbo se fait toujours attendre. Aussi, la gestion du problème Affi N’guessan a-t-elle été mal faite (trop temps a été perdu sur la question du logo et ses incidences).

Il importe de noter qu’appartenir à une équipe confère un effet de corresponsabilité. Je suis au FPI depuis 1989. Je peux assurer par ailleurs ici que je ne suis pas adepte du masochisme. Mais ayant été témoin de choses aussi graves que sérieuses, je ne comprends pas l’état actuel des choses où l’élan n’est pas assez fort pour corriger des insuffisances dont certaines nous valent nos statuts actuels. On ne doit pas différer certains débats parce que les temps de crise sont aussi des moments de reconstruction.

Ensuite, la lourdeur que l’on constate depuis des années est une question qu’il faut absolument aborder pour le bon fonctionnement du parti. Parce que personne ne peut penser que la lourdeur est congénitale au FPI. Aussi, au-delà de l’intentionnalité souvent proclamée, convient-il d’aller à l’opérationnalité. Et nous voulons que les Ivoiriens suivent alors que notre démarche n’est pas clairement affichée.
Enfin, nous avons acté être mobilisés pour la libération du Président Laurent Gbagbo. Raison et cause nobles. Mais après avoir par ailleurs réussi à démontrer - à chaque consultation électorale depuis 2011 - que le peuple continue de rejeter les imposteurs des élections présidentielles de 2010, quelle capitalisation en fait-on ? Il y a la question du changement de la Constitution ; il y a les échéances pour les législatives et les élections locales. Comment capitalisons-nous la force de nos mots d’ordre qui ont provoqué le désert électoral aux différentes élections ? Est-il tabou de débattre de ce qu’il faut revisiter certaines choses pour ne pas être en marge, le temps que le Président Laurent Gbagbo est en otage ? Laurent Gbagbo demande qu’un certain travail soit abattu. Ce ne sont pas les actes d’adoration de sa personne – qui n’ont jamais été de sa culture – qui vont le libérer.

En conclusion, à la lumière de l’argumentaire décliné ci-dessus, il faut retenir que la libération du pays est une priorité sur toutes autres considérations. Tous ceux qui veulent participer à la rénovation des pratiques politiques doivent se mobiliser. Il y a un grand besoin de remettre la transparence au cœur de notre philosophie politique. Cet élan ne sera jamais contre le FPI. Il est aussi pour le FPI.

Notre démarche politique ne doit donc pas se faire par rapport à Affi N’guessan. Sinon, ce serait l’aider dans sa mission. Après le traumatisme intervenu dans le pays, l’inclination chez certains au copinage, à la suffisance, à l’arrogance, au manque de rigueur et de vigilance et au clientélisme, doit être combattue.

Nous sommes face à un pouvoir dont nous connaissons les pratiques. Mais nous continuons de nous comporter comme si nous le découvrions. Il faut toujours avoir à l’esprit que le système de prédation que nous avons en face est bien organisé. Et nous ne devons pas mordre au piège qu’il nous tend à chaque fois en vue de nous diviser. Quel est le message pendant les tournées ? Il faut construire des éléments de langage qui donnent un horizon et une espérance aux jeunes en particulier et au peuple en général. Il faut sans tarder appeler à un rassemblement de tous ceux qui sont favorables au retour de Laurent Gbagbo. Il me semble – à quelques nuances près – qu’un tel rassemblement n’est pas antinomique à un front contre la politique d’Alassane Dramane Ouattara.

Qu’attendent les Ivoiriens ? Ils veulent la fin de la dictature pour vivre libres ; pour qu’il n’y ait plus de régime d’exception ; pour que leurs conditions de vie s’améliorent ; pour que les prisonniers soient libérés, pour que les exilés rentrent au pays. Toutes les petites manœuvres qui tendent à faire obstacle ou à ralentir le cours des choses pour garder des positions, n’intéressent pas les Ivoiriens et doivent être combattues.

Aussi dans notre démarche politique, devons-nous faire de la place aux réflexions prospectives et moyens d’anticipation. Il est vrai que certains acteurs et/ou leaders politiques ont eu des comportements incompréhensibles à un certain moment de l’histoire de notre pays. Mais refuser de travailler avec eux parce qu’ils auraient posé des actes inattendus, ne parait pas totalement recevable. Il est bien indiqué qu’il ne s’agit pas de travailler avec la « race des KKB ». Mais il faut un vaste rassemblement pour libérer la Côte d’Ivoire. Et c’est au FPI de construire les conditions. Il a l’envergure d’en être la locomotive. Pour appeler utilement chacun à faire une autocritique, il faut sans tarder rappeler à l’ordre tous ceux qui – de par leurs positions –, font tourner le FPI en rond. Parce que le pays mérite autre chose que des faiseurs de calculs mesquins et des nombrilistes.

Il faut toujours avoir à l’esprit que le manque de solidarité pendant les années du pouvoir a contribué à l’affaiblissement du Front populaire. Ce manque qui laisse un dénuement inimaginable pour les moyens de lutte, doit encore pousser à combattre des attitudes déviantes.

Fait à Paris le 14 avril 2016

Une Contribution ouverte de Claude KOUDOU