Tribune: Le monopole de la violence physique légitime aux mains d'Alassane Ouattara et de la France

Par Correspondance particulière - Le monopole de la violence physique légitime aux mains d'Alassane Ouattara et de la France.

LE MONOPOLE DE LA VIOLENCE PHYSIQUE LÉGITIME
AUX MAINS
D'ALASSANE OUATTARA ET DE LA FRANCE

La Côte d'Ivoire se retrouve aujourd'hui dans un beau désordre suscité, de manière subtile,
par les dynasties rassemblées autour d'Alassane Ouattara, qui ne peuvent supporter de voir le
pouvoir exécutif aux mains du peuple, de leaders politiques dont le patronyme est «insignifiant».
KKB et de nombreux militants anonymes sont déjà traités de coquins par certains militants du PDCI
parce qu'ils demandent seulement le respect scrupuleux des textes qui régissent leur parti politique.
Laurent Gbagbo à la tête de la magistrature suprême ivoirienne fut un crime de lèse-majesté; une
atteinte à la respectabilité de ces familles honorables. Les ordres reçus du fils d'un policier étaient
perçus comme un affront. Le conflit de génération propre à tout peuple qui vit Laurent Gbagbo
mettre légitimement en cause la bonne gouvernance de Nanan Houphouët Boigny (du Vieux, du
Sage) lui attira les foudres de cette domination noire qui nourrit le secret espoir de le voir croupir à
jamais à la Haye. Lorsque nous constatons que le PDCI est un parti parrainé par l'UMP, la droite
française, tout s'explique. Le combat mené par KKB au sein du parti d'Houphouët nous permet de
découvrir le visage de ces députés chargés de préserver les intérêts de la France, de ces dynasties,
au détriment de ceux du peuple. Il n'y a en réalité aucune différence entre la gestion du PDCI (du
RHDP) et celle de l'UMP où Copé et Fillon ont été incapables de se mettre d'accord sur le verdict
des urnes. Le maître des intrigues reste dans l'ombre Sarkosy qui, en 2007, faisait cette belle
déclaration rappelée par Slate.fr: «Les institutions, c'est notre règle commune, qui nous permet de
vivre ensemble. Elles ne sont fortes, elles ne sont efficaces que si chacun les accepte, que si chacun
leur reconnaît une légitimité». Son discours ne fut plus le même quand le Conseil constitutionnel
invalida ses comptes de campagne: «Respecter les institutions, ce n'est pas en accepter toutes les
décisions». Il nous faut simplement comprendre que les partisans de Sarkosy, d'Alassane Ouattara,
des dynasties ivoiriennes, sont au-dessus des textes, des lois qui régissent la vie de leur Nation. Tous
ceux qui gravitent autour de cette domination noire et blanche sont identiques à Zimmerman, car
leurs partisans peuvent tuer le peuple, les pro-Gbagbo, les partisans de la démocratie: les Trayvon
Martin, et plaider avec le soutien de la France et de l'ONU la légitime défense. Vainqueurs d'une
guerre grâce au soutien de la France, ils peuvent tout se permettre sans courir le risque d'être jugés
ou d'être envoyés à la Haye. Leur stratégie consiste, en effet, à susciter le désordre, l'insécurité, afin
d'avoir la possibilité de prendre des décisions exceptionnelles, qui peuvent se passer du respect des
textes; c'est ce qui transparaît dans la déclaration des 80 députés qui apportent leur soutien au
président Bédié. Lorsque Francis Wodié, le président du Conseil constitutionnel sous Alassane
Ouattara affirme qu'il est inapproprié de voir un juge porter un jugement sur un autre juge Yao
N'Dré, et se contredit, par la suite, en déclarant qu'il est, contrairement à son prédécesseur, Yao
N'Dré partisan du FPI, au-dessus de son parti politique (le PIT), on assiste, de nouveau, à ces
diatribes voilées à l'origine de la crise ivoirienne, et des divisions au sein du PDCI. L'unité des
Ivoiriens ne sera possible que si nos intellectuels, nos dirigeants politiques, nos députés cessent de
pratiquer la politique du ventre, de rejeter du revers de la main nos textes pour être des messagers
d'une doctrine politique répréhensible: «Le rattrapage ethnique». Seule la vérité nous rend libres,
elle nous permet d'être fidèles aux vertus que nous prétendons défendre. Il est mieux d'avoir à la tête
d'une Nation un pauvre intègre qu'un riche incapable de discerner le bien du mal, la vérité du
mensonge, car seule la justice affermit toute autorité. Aujourd'hui le monopole de la violence
physique légitime est, en Côte d'Ivoire, aux mains de personnes qui ignorent leurs origines et
l'importance capitale que revêt ce pouvoir dans la construction d'une Nation. Alassane Ouattara qui
a décidé de ne pas faire du copier/coller, et s'arroge surtout le droit de jeter les bases d'une
démocratie à l'ivoirienne (d'une démocratie africaine conforme à la vision politique de ses alliés de
la communauté internationale, de la France) se doit de comprendre que les doctrines politiques ne
s'improvisent pas. De grands philosophes, bien avant nous, s'évertuèrent à trouver des définitions
politiques, scientifiques, à mêmes de satisfaire les grands principes universels dans le but de
rassembler, sous une même bannière (celle des droits universels), tous les peuples sous le ciel. Le
droit de vote est, par exemple, un droit universel inaliénable, sur lequel est fondé toute démocratie,
aussi bien dans la forêt de l'Amazonie que dans la jungle du Gabon ou dans les réserves mondiales
ivoiriennes détruites par ses partisans. Lorsque Max Weber s'efforça de donner à la politique une
définition, du point de vue sociologique, il finit par conclure que la vraie spécificité de l'État est
qu'il est le seul groupement susceptible de bénéficier de la violence physique légitime. L'homme
inculte, manipulé, aveuglé par ses désirs, par sa jalousie, par son égoïsme, par sa haine, étant un
loup pour l'homme, pour son prochain, des philosophes comme Thomas Hobbes, John Loke ont
trouvé opportun inventé une personne morale (l'État) capable de défendre la vie, les droits des
citoyens qui, librement, lui confient leur vie. Les rois passent,et la couronne reste. Elle permet
d'introniser un autre roi capable de protéger et de guider le peuple. Les leaders politiques passent et
les textes, les constitutions survivent à leur vénérée personne, pour conduire les générations futures,
d'où leur importance capitale dans la vie de toute Nation qui ne doit être gouvernée, selon le bon
vouloir des dynasties, du peuple (bien qu'il soit souverain), ou de ses dirigeants. Si le monopole de
la violence physique légitime est l'apanage de l'État, un pouvoir exclusif concédé «librement (grâce
au droit du vote)» par le peuple à son souverain, à l'État, il est tant que nous sortions de cette
confusion politique générale, de ce désordre qui nous empêche de transmettre à nos enfants le
véritable savoir. Comment parler d'excellence dans un pays où nous sommes incapables de
distinguer le bien du mal, le vrai du faux? Sur quelles valeurs, sur quels principes universels
construisons-nous une Nation ivoirienne qui aspire à la réconciliation? De 2002 jusqu'au jour de la
proclamation des résultats par Yao N'Dré, le président du Conseil constitutionnel de la Côte d'Ivoire,
il existait un seul État qui détenait le monopole de la violence physique LÉGITIME. Nous avions,
par conséquent, jusqu'à cette date une seule armée, une seule police. Le groupe rebelle dirigé par
Soro Guillaume avait, avant cette date, bénéficié de l'amnistie du président Laurent Gbagbo et se
préparait à faire une seule chose avec l'Armée ivoirienne. Les soldats républicains qui ont défendu
l'intégrité territoriale de la Côte d'Ivoire de 2002 jusqu'à la guerre voulue par la France et Alassane
Ouattara pour résoudre un contentieux électoral sont étrangement en prison, accusés de crimes
contre l'humanité, tandis que les soldats rebelles qui n'étaient pas des instruments de ce pouvoir
exclusif de l'État ivoirien sont libres, malgré les crimes contre l'humanité qu'ils ont commis. A quel
moment l'Armée ivoirienne a-t-elle perdu le monopole de la violence légitime? Que l'on nous dise à
quel moment a-t-elle cessé d'être une Armée républicaine, quand nous savons que toute Armée jure
fidélité à ses institutions et à son chef suprême légitimement élu, et non aux organisations
internationales, à un leader, à un parti politique ou à la France? Une armée exerce un rôle coercitif
et dissuasif dans le but de garantir la paix, d'inciter le peuple à obéir aux institutions, aux textes, aux
lois que nous sommes tous invités à respecter; pauvres ou riches, originaires du Nord ou du Sud,
Ivoiriens ou étrangers. C'est dans cette confusion monstrueuse que sont exhibés 14 prisonniers
victimes d'une guerre menée par une armée rebelle qui n'était pas un instrument de ce pouvoir
exclusif de l'État. La libération de ces prisonniers que nous saluons tous bénéficient
malheureusement d'une liberté provisoire dont la complexité est assez étayée par le docteur N'Zi
dans ses différents articles. L'armée, la police, la gendarmerie instruments de ce pouvoir coercitif de
l'État ont, apparemment, pour rôle de bâillonner, en quelque sorte, les pro-Gbagbo ou les partisans
de la démocratie, afin de les empêcher d'être une opposition crédible. Si la Côte d'Ivoire veut
réellement aller à la paix dans ce beau désordre, ses dirigeants actuels se doivent de méditer ces
recommandations de Thomas Hobbes qui affirme que toute peine qui ne vise pas à favoriser
l'obéissance des sujets n'est pas une peine, mais un acte d'hostilité; la vengeance ne peut être
une sanction pénale. Et tout acte d'hostilité conduit à légitimer la résistance des citoyens (des
sujets) qui deviennent de facto ennemis de l'État. Lorsque les partisans d'Alassane Ouattara et du
rattrapage ethnique exigent des pro-Gbagbo, des Ivoiriens, dans leur majorité, le pardon, et les
humilient, nous déduisons que les prisonniers partisans du président élu Laurent Gbagbo ne
subissent pas une sanction pénale, mais un acte d'hostilité qui ne facilite guère la réconciliation
entre les Ivoiriens. Les dynasties ivoiriennes (africaines) doivent impérieusement se débarrasser de
ce carcan virtuel à l'origine de toute ségrégation patronymique au sein des partis politiques.

Une contribution par Isaac Pierre BANGORET (Écrivain)