Tribune: Comment Alassane Ouattara compte-t-il être installé en 2015 par la Communauté internationale ?

Par Correspondance particulière - Comment la communauté internationale peut-elle de nouveau installer ADO en 2015?

La récente conférence de presse d'Alassane Ouattara à Korhogo ne s'adresse pas aux pauvres
nègres que nous sommes. Il suffit d'analyser ses propos pour comprendre qu'ils sont en phase avec
les interventions de la Communauté internationale, les déclarations intempestives de Banki Moon
(le Sécrétaire général de l'ONU) sur le Mali, et les sentences de la CPI sur les dossiers africains. Le
destin du continent africain est aujourd'hui intimement lié à l'issue du procès de Laurent Gbagbo, le
président élu de la Côte d'Ivoire. Devenir des nations africaines souveraines, c'est, entre autres
choses, choisir d'être des partenaires et non des sujets (des esclaves) des autres nations souveraines
du monde. Cela n'est possible que si nous imposons à tous le respect de nos Constitutions africaines
censées offrir à tous nos citoyens les mêmes opportunités. Avant l'arrivée d'Alassane Ouattara sur la
scène politique, la Côte d'Ivoire était une Nation unie, confrontée aux problèmes propres à tous les
pays du monde, où il est donné de constater, naturellement, une forte concentration de la population
dans les zones riches. Détroit (aux USA) est, par exemple, en faillite, après une longue période de
prospérité, parce que ses habitants abandonnent la ville pour d'autres contrées plus prospères. Il est
donc malséant pour Alassane Ouattara d'opposer les habitants du Nord à ceux du Sud de notre pays.
C'est du Nord aride de la Côte d'Ivoire qu'Alassane Ouattara annonce, justement, à ses partenaires
occidentaux, son désir d'être de nouveau installé à la tête de la Côte d'Ivoire. Il leur fait part dans un
discours hermétique de son plan de conquête du pouvoir d'État élaboré, sans aucun doute, par ses
partenaires français. Alassane est un économiste, et non un homme politique: c'est un fonctionnaire
international chargé de veiller sur les intérêts de la France et de l'Occident, et non sur ceux des
Ivoiriens, des Africains. Résumons les messages codés transmis à la Communauté internationale, en
réponse aux déclarations de Laurent Gbagbo, le président élu de la Côte d'Ivoire emprisonné à la
Haye, et à toutes les actions politiques menées par les Africains, en vue de sa libération, et du
respect de nos Constitutions. Face aux juges de la Haye, le président Laurent Gbagbo, à travers un
témoignage assez bref relatif à son parcours politique, exprima son désir de bâtir une nation
ivoirienne démocratique. Il mit surtout en évidence un des obstacles majeurs de la démocratie en
Afrique, quand il affirma que «la démocratie, c'est aussi celui qui proclame les résultats des
élections présidentielles, parce qu'il est inconcevable de voir l'UA et l'ONU soutenir une violation
aussi flagrante de notre Constitution, en permettant que la Commission ivoirienne chargée de
proclamer les résultats des élections présidentielles annonce «la victoire» de son adversaire
politique au QG de ce dernier, face à une presse étrangère». Comment le président élu de la Côte
d'Ivoire, garant de la Constitution ivoirienne, pouvait-il se soumettre à un tel verdict, à une telle
médiation? Alassane Ouattara répond indirectement à Laurent Gbagbo, le président élu de la Côte
d'Ivoire, durant sa conférence de presse du 8 juillet 2013 à Korhogo, qui dura 45mn 36 secondes:
«[...] Je ne me laisse pas émouvoir par ces règles que nous avons copiées, je souhaite d'ailleurs qu'à
l'avenir nos pays s'approprient la manière de gérer nos propres États plutôt que de faire des copiercoller
de tel ou tel pays tel que nous le faisons actuellement. Nous avons besoin d'être proches de
nos populations, nous sommes des pays en voie de développement, où les pays sont pauvres et nous
devons apporter le réconfort et le soutien à nos populations [...]». Ce discours codé est tout un
programme politique de conquête du pouvoir d'État. Nous avons toujours su que le président élu de
la Côte d'Ivoire Laurent Gbagbo est un résistant africain authentique, car il a une vision claire de
son combat politique. Il est emprisonné parce qu'il lutte pour la démocratie dans son pays et en
Afrique, pour des accords gagnant-gagnant. Alassane Ouattara prétend aussi se battre pour la
démocratie, mais en changeant des règles que nous avons copiées de l'étranger. De quelles règles
s'agit-il réellement? Banki Moon lors de sa visite en France, le 15 juillet où il a passé 48 heures, a
longuement discuté avec le président Hollande des élections au Mali, et dévoile ces nouvelles règles
de la «démocratie» en Afrique que le président en exercice de la CEDEAO, Alassane Ouattara, se
devait d'évoquer lors de sa conférence de presse. Banki Moon exige que les Maliens respectent les
résultats électoraux quoiqu'il arrive. Pour le Sécrétaire général de l'ONU, la tenue de l'élection
présidentielle au Mali le 28 juillet n'est pas négociable. Et les résultats devront être acceptés par
toutes les parties même si le scrutin est imparfait. Alassane Ouattara, président de la CEDEAO,
parle d'élections libres et transparentes au Mali. Avec François Hollande et Banki Moon, il a été
aussi question des hélicoptères français prêts à intervenir aux côtés de la MINUSMA pour «rétablir
l'ordre», pour installer, en réalité, le président choisi par l'Occident, et surtout par la France. Nous
retrouvons au Mali le schéma ivoirien où Sarkosy, le président français, a donné l'ordre de
bombarder la résidence de Laurent Gbagbo, le président élu de la Côte d'Ivoire, les forces
républicaines, et l'armée ivoirienne, dans le but d'installer son candidat Alassane Ouattara. Le 18
juillet, dans un film amateur sur France 24, nous avons pu constater que l'arrivée d'Alassane
Ouattara fut annoncée par un griot aux habitants du Nord de la Côte d'Ivoire, qui lui cachaient,
selon le commentateur français, leur véritable misère, en retirant de leurs ruelles les ordures qui s'y
trouvaient. Ce marketing politique entretenu par France 24 ne vient que soutenir Alassane Ouattara
qui a choisi de changer, avec la bénédiction de la France, les règles du jeu démocratique en Afrique.
Il ne fera pas du copier/coller, parce qu'il a choisi de ne pas importer en Afrique les valeurs de la
démocratie occidentale. Les pauvres indigènes que nous sommes ne peuvent accéder, selon lui, au
message subtil et complexe de la démocratie dont parle le président Laurent Gbagbo et les
mouvements panafricains. Les populations du Nord de la Côte d'Ivoire ne recherchent, pour
Alassane Ouattara, que le pain quotidien, de l'électricité, des plans de développement rural. Elles se
contentent de peu même si elles vivent sur des mines d'or, du diamant dont elles ignorent
l'importance. Avec cette visite au Nord et les déclarations hermétiques, offensantes, d'Alassane
Ouattara et de Banki Moon, nous nous retrouvons dans le contexte de l'époque coloniale. Lorsque
nos pères utilisaient pour monnaie les cauris, l'or et les richesses de nos terres étaient exploités,
exportés vers l'Europe par les Occidentaux. Avec Alassane Ouattara ce contexte colonial n'a pas
changé. Nous avons seulement face à nous, en lieu et place, des colons Français, ou Occidentaux de
peau blanche, des Européens de peau noire; une domination noire au service d'une domination
blanche. Comment Alassane Ouattara peut-il affirmer que la Côte d'Ivoire est pauvre, quand il
inaugura un lundi 24 octobre la mine d'or de Tongon entrée en activité en 2010? La production de
cette mine en 2015 est estimée à 17 tonnes, et 20 tonnes en 2020. La pauvreté des Africains dépend
simplement de la volonté politique de nos dirigeants, c'est à ce niveau qu'il y a véritablement une
divergence politique entre le président élu ivoirien Laurent Gbagbo emprisonné, à dessein, à la
Haye par la France, et Alassane Ouattara qui a choisi de changer les règles de la démocratie en
Afrique, en mettant les décisions des Organisations internationales au-dessus de nos Constitutions.
Il affirme qu'il tient sa légitimité de l'ONU et de l'UA et non du verdict des urnes, du respect du
droit de vote des Ivoiriens (des Africains) qui lui importe peu. Pour les élections de 2015, le ton est
déjà donné. Il s'agira, d'une part, d'enclencher un peu de troubles entre baoulé et Burkinabé pour
affaiblir le PDCI, et emprisonner, d'autre part, les partisans du président Laurent Gbagbo qui
bénéficient de libertés provisoires. La France et Alassane Ouattara intensifieront ces troubles pour
faire intervenir la MINUSMA, dans le but de l'installer de nouveau. L'on évoque la fragilité des
Institutions judiciaires africaines, afin que la CPI ait le droit de poursuivre les présidents et les
hommes politiques africains, arguant de l'article 27 du Statut de la CPI, qui prive, en définitive, les
nations africaines de leur souveraineté. Avec Alassane Ouattara l'on commence à évoquer
l'incapacité de nos armées à assurer la sécurité de nos citoyens, l'incapacité de nos administrations à
organiser des élections présidentielles transparentes, libres, dans le but de permettre à la France et
aux Organisations internationales de faire intervenir les soldats de l'ONU, et mettre surtout les
décisions des Organisations internationales au-dessus de nos Constitutions. L'objectif de la France
et de l'ONU est d'étouffer toute aspiration des Africains à la démocratie. Il y aura dans le monde,
avec la présence d'Alassane Ouattara à la tête de la Côte d'Ivoire, une démocratie occidentale, et une
«démocratie» africaine, parce les pauvres nègres que nous sommes ne méritons pas, en réalité, de
vivre sur des terres riches. Si la démocratie, selon le président Laurent Gbagbo, c'est aussi celui qui
dit les résultats des élections, il n'y aura plus de démocratie en Afrique parce que l'ONU s'arroge
déjà le pouvoir des Conseils constitutionnels africains, en installant des présidents quoiqu'il arrive.

Une contribution par Isaac Pierre BANGORET (Écrivain)