Forum économique franco-africain - François Hollande: "La France a besoin des investissements africains”

Par France 24 - "La France a besoin des investissements africains” selon François Hollande.

Photo: De gauche à droite : Pierre Moscovici, ministre français de l'Économie, François Hollande, Alassane Ouattara, le président ivoirien, et à l’extrémité, Donald Kaberuka, le président de la Banque africaine pour le développement. (Crédit : Pierre René-Worms).

Le président François Hollande a abordé, lors de son allocution de clôture du forum économique franco-africain, le sujet sensible des visas économiques, affirmant que Paris devait faciliter les investissements africains en France.
“Doubler les échanges économiques entre la France et l’Afrique” dans les cinq ans à venir. Tel est le cap que s’est fixé François Hollande lors de son allocution de clôture du Forum économique franco-africain, qui s’est déroulé à Bercy mardi 4 décembre.
Un objectif ambitieux que le chef de l’exécutif français pense atteindre en s’appuyant, notamment, sur les recommandations du rapport Vedrine, remis plus tôt dans la journée au ministre de l’Économie Pierre Moscovici. François Hollande a, d’ailleurs, déjà repris à son compte certaines idées de l’ancien ministre des Affaires étrangèrs, telle que la création d’une fondation franco-africaine pour la croissance qui devrait voir le jour en 2014.
À l’issue d’une journée de débats à Bercy entre 600 chefs d’entreprises français et africains pour essayer de remettre la France en selle sur le continent africain, le président français a souligné que cet événement démontrait que “l’heure de l’Afrique était venu”. Pour lui, les entreprises françaises ne doivent plus hésiter à tenter l’aventure africaine car, avec ses plus de 5 % de croissance par an, “c’est le continent de l’avenir”. Un regard tourné vers le futur adopté par la totalité des intervenants au forum.
Mais pour François Hollande, ce “nouveau partenariat” n’est pas qu’une affaire de parts de marché en Afrique, où la France est actuellement à la traine par rapport aux pays émergents comme la Chine et le Brésil. “La relation avec l’Afrique ne doit pas être à sens unique”, a insisté le chef de l’État, précisant que la France “avait besoin que les entreprises africaines investissent chez nous”.
Plus de visas économiques : une priorité ?
“C’est très innovant de la part d’un chef d’État français d’appeler ainsi les groupes africains à investir en France”, souligne à FRANCE 24 Moctar Thiam, président du Club HEC du Mali. “Ça montre que le regard change à l’égard de l’Afrique”, ajoute Alain Kouadio, vice-président du Patronat de Côte d’Ivoire.
Pour concrétiser cet appel à une plus grande implication des entreprises africaines en France, François Hollande s’est emparé du sensible sujet des visas économiques. Le président français a souligné que les visas accordés aux entrepreneurs, étudiants ou encore artistes africains ont déjà augmenté de 13 % depuis le début de l’année. C’est, pour le chef de l’État, une manière de répondre au rapport Vedrine qui prône l'assouplissement des conditions d’octroi pour les ressortissants africains. “C’est un point que tous nos interlocuteurs africains ont soulevé”, a expliqué Hubert Vedrine.
Mais ce n’est pas, pour autant, la priorité pour tous les Africains. “Si on avait à hiérarchiser les priorités, la question des visas n’arriverait sûrement pas en haut de la liste”, assure Alain Kouadio. Pour lui, avant d’aller investir en France ou ailleurs, les entreprises africaines doivent déjà “consolider leur avantage chez eux et participer à densifier le tissu des PME pour répondre à la demande intérieure”. C’est sur ce terrain là qu’il attend plutôt la France. “Elle peut nous aider à faciliter l’accès à une formation de qualité et nous permettre de réaliser des projets d’infrastructure au coût le plus bas possible”, affirme Alain Kouadio.
Même si ce n’est pas une priorité, assouplir les conditions d’octroi des visas “est nécessaire”, souligne Moctar Thiam. Si la France poursuit sur cette voie, cela pourrait être, d’après lui, un signal intéressant “envoyé à certains pays africains qui commencent eux aussi à imposer de longues démarches administratives pour obtenir des visas économiques”.

Sébastian SEIBT

LA FRANCE RISQUE DE "MANQUER LE BATEAU" DE LA CROISSANCE AFRICAINE

Paris (AFP)

La France, qui perd des parts de marché en Afrique, pourrait "manquer le bateau" de la croissance de ce continent où affluent les investissements d'entreprises de Chine, d'Inde ou du Brésil, a averti mercredi le Nigeria, deuxième marché du continent.
Le ministre français de l'Economie Pierre Moscovici et son homologue nigériane, Ngozi Okonjo-Iweala, lors d'un forum franco-africain, le 4 décembre 2013 à Paris
afp.com - Eric Piermont
"Nos partenaires traditionnels comme la France (....) pourraient avoir à travailler un peu plus dur pour nous convaincre de travailler avec eux dans les investissements menés sur le continent", a souligné lors d'un forum franco-africain à Paris la ministre des Finances du Nigeria, Ngozi Okonjo-Iweala.
"Ceux qui ne sont pas encore sur le terrain doivent commencer maintenant. Parce que, croyez-moi, si vous manquez le bateau, si vous n'êtes pas en Afrique maintenant, vous allez rater l'occasion de toute une vie", a-t-elle ajouté, sous les applaudissements de quelque 560 entrepreneurs africains et français.
L'ancienne haute responsable de la Banque mondiale a martelé qu'il était "temps pour le secteur privé français de venir".
"L'Afrique est éveillée et nous devons nous réveiller", a admis la ministre française du Commerce extérieur, Nicole Bricq.
"Notre part de marché diminue nettement dans les pays d'Afrique francophone, où elle a été divisée par deux en 20 ans, passant de 31% à 13% en Côte d’Ivoire ou encore de 36% à 14% au Cameroun par exemple", a-t-elle déploré. "Et, en parallèle, nos parts de marché dans les pays africains anglophones peinent à décoller". Au Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique, cette part n'est que de 3,6%, a-t-elle noté. Ce chiffre est de 8,2% pour les Etats-Unis, 4,3% pour le Royaume Uni et 18,5% pour la Chine, selon le Direction générale du Trésor.
Reconnaissant la perte de parts de marchés de la France, le président, François Hollande, a annoncé comme objectif de doubler les échanges avec l'Afrique "dans les deux sens, exportations et importations", en clôturant ce forum organisé par le Medef et Bercy à l'avant-veille de l'ouverture à Paris du Sommet de l'Elysée pour la paix et la sécurité en Afrique, qui réunira près de 40 dirigeants du continent.
200.000 emplois potentiels en cinq ans
Evoquant un rapport de l'ancien ministre français des Affaires étrangères, Hubert Védrine, publié à cette occasion, le président Hollande a souligné que "ses conclusions sont claires: si nous ne regardons que l'intérêt de la France, nous pouvons évaluer à 200.000, le nombre d'emplois en France qui pourraient être créés en cinq ans si nous doublions nos exportations vers le continent africain".
"L'Afrique n'est pas, ne peut pas être le récipiendaire de notre aide au développement, ni le terrain gardé de situations acquises, qui en réalité ne le sont plus", a déclaré le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, à l'ouverture du forum.
Il a appelé à l'ouverture entre les pays d'Afrique et la France d'un "agenda commun (...) construit évidemment autour des entreprises".
"Selon certaines estimations, le secteur privé est le moteur de la croissance du continent, il contribuerait à près de 80% du PIB et créerait environ 90% de tous les emplois", a pour sa part déclaré le président ivoirien, Alassane Ouattara. Abondant en ce sens, la ministre nigériane a estimé que la réunion de mercredi avait été "utile (...) parce qu'elle avait réuni autour de la table des entrepreneurs sérieux".
Rappelant que l'investissement sud-sud avait pris le dessus en Afrique, Mme Okonjo-Iweala a déclaré à l'AFP en marge de la conférence que la France était "un peu en retard sur cette conception des choses".
"Je suis venu dire aux entreprises française d'accentuer leurs investissements et de le faire dans la réciprocité", a insisté pour sa part François Hollande, estimant que Paris devait aussi "favoriser l'installation d'entrepreneurs africains en France".
"Je pense que le regard vers l'Afrique, sur l'Afrique doit profondément changer", a-t-il estimé en annonçant la création d'une "fondation franco-africaine pour la croissance" à laquelle seraient associés les patronats africain et français.
Les organisations patronale française Medef et africaine Business Africa ont émis mercredi plusieurs propositions communes, notamment dans le domaine des infrastructures, de la formation et de l'innovation.
Mais l'"image positive" véhiculée par une Afrique jeune, à la croissance de plus de 5% en moyenne ces dix dernières années "ne doit pas cacher que l’Afrique subsaharienne reste aussi la région la plus pauvre du monde", a tempéré mercredi l'ONG One dans un communiqué.
"Le partenariat économique entre la France et l’Afrique doit avant tout être le moteur du développement pour l'Afrique et pour tous les citoyens africains et contribuer à la lutte contre l’extrême pauvreté" , a déclaré One.

Par Ursula HYZY