Côte d'Ivoire: Le temps du faux et des lendemains qui déchantent, Par Raphaël DAGBO

Par IvoireBusiness - Le temps du faux et des lendemains qui déchantent, Par Raphaël DAGBO.

Raphaël DAGBO.

En refusant d’aller aux urnes une énième fois, le peuple ivoirien vient de redire en acte et avec éclat son refus de cautionner le faux. Il prouve encore une fois que ce n’est nullement au sein d’institutions bricolées sur du faux qu’il convient de bâtir l’avenir de la Côte d’Ivoire.
Que dire des personnes qui, ayant pourtant montré par le passé leur rigueur intellectuelle, ont trouvé étonnamment dans ces législatives dilatoires quelque crédit !
Si nous convenons que personne n’a le monopole de la vérité, convenons-en aussi qu’en toute chose, mais plus encore en politique, la cohérence reste sans doute la meilleure mesure des convictions.
Reconnaissons que la Côte d’Ivoire est aujourd’hui sous le règne du faux et de la tricherie. En acceptant d’accompagner cette tricherie et ce faux et de les légitimer par la même occasion, force est de constater que l’on s’en rend piteusement complice. Comment penser un seul instant qu’en mentant avec les menteurs, l’on puisse espérer les convertir à la vérité ?
Mais lorsqu’on a affirmé cela, il reste encore ce régime illégitime depuis 2010 et à mille lieues des attentes de la majorité des Ivoiriens qu’il infantilise et qu’il emprisonne au sens propre comme au sens figuré dans la violence sociale, judiciaire et policière.
Alors que faire ?
Les Ivoiriens semblent avoir choisi le silence persuasif qui s’adresse à l’intelligence. Ils ont regardé passer les dernières élections dites présidentielles avec un taux de participation minable aussitôt remaquillé. Ils ont vu, et le monde avec eux, le soi-disant référendum constitutionnel sensé conduire à une troisième République dans leur pays. Là aussi, ils ont exprimé leur indifférence de façon cinglante. Mais ce régime qui enchaîne les diversions électorales comme l’on enfile de mauvaises perles leur a répondu par le mépris en organisant des législatives dont nous connaissons aujourd’hui les vrais résultats tout aussi misérables.
Dans un pays normal où les autorités ont le devoir de respecter le peuple dans sa majorité, ces désaveux consécutifs et répétés auraient été analysés objectivement dans leurs causes pour chercher le moyen de concerner davantage les citoyens. Au lieu de cela, la machine à fabriquer le faux, la très discréditée Commission électorale indépendante, comme à son habitude, a écrit une histoire onirique à l’image de celle qu’elle avait servie au terme des présidentielles de 2010 et suivantes...
Le moment est venu pour tous ceux qui en ont assez du ridicule dont la Côte d’Ivoire est désormais couverte de quitter les postures confortables, les égos surdimensionnés, les appétits coupables de minuscules intérêts égoïstes et immédiats… Il faut maintenant mobiliser le peuple qui y est prêt pour demander le départ du système BEDIE/OUATTARA y compris dans la rue de façon démocratique naturellement. Mais pour y parvenir, il convient de mettre en place, au plus vite, une transition politique qui refuse la stérile composition avec ce qui nous est servi aujourd’hui. Nous n’avons nullement besoin pour cela d’appartenir au même parti politique. L’échec de la réconciliation, l’échec sur le plan social, l’échec de la sécurité et j’en passe les meilleurs du tandem infernal au pouvoir, mais aussi sa déconnexion totale du peuple qui débouche sur son impopularité silencieuse mais historiquement massive dans les urnes… Tout cela constitue autant de raisons à même de nous fédérer naturellement au-delà de toutes les évidences.
Car enfin, quelle émergence espérons-nous de ce tandem crépusculaire qui n’a le soutien que d’une petite minorité de profiteurs violents ? Quel avenir espérons-nous de ces leaders hors sol qui se mirent narcissiques dans l’illusion qu’ils ont de leur grandeur supposée ?

Une contribution de Raphaël DAGBO
Enseignant Chercheur en relations internationales (sécurité et défense) à Paris