Côte d’Ivoire - Scandale financier à la douane: 4 milliards de recette disparaissent

Par Le Temps - 4 milliards de recette disparaissent aux douanes ivoiriennes.

Photo: © Autre presse par DR. Le Directeur General des Douanes, le Colonel Major Issa Coulibaly.

En dépit des 1000 milliards déclarés par le Directeur général des douanes, il y a quelques jours et la certification Iso hautement médiatisés, un scandale financier couve à la Douane. Il s’agit d’une sulfureuse affaire de vol à col blanc de près de 4 milliards qui fait rage à la recette principale. Celleci veut tout mettre en œuvre pour occulter ce scandale.

Une affaire financière bouscule la Direction générale des Douanes ivoiriennes via sa recette principale et la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao).
Ce, à propos du rejet de plusieurs chèques des opérateurs économiques exerçant dans les sociétés de transit par la Banque centrale. Et l’on évoque un préjudice d’environ 4 milliards Fcfa au détriment des caisses de l’Etat. Un scandale qui serait passé inaperçu, si l’un des agents de la Bceao n’avait pas éventé publiquement ce qui se tramait entre quatre murs. Sentant donc le danger venir, le Dg des Douanes ivoiriennes, le colonel-major, Issa Coulibaly et son directeur des recettes le colonel Yéo Gninankan, veulent étouffer l’affaire, loin des bruits, caméras et plumes de la presse. Pourtant, à en croire des sources dignes de foi ce qui est qualifié de scandale financier aurait pris forme, depuis le mois de mars 2013. En effet, pour le paiement des droits de douanes, les transitaires déposent les chèques à la direction des recettes. Ces papiers qui ont la caution des différentes banques où sont logés les fonds des opérateurs économiques, sont ensuite acheminés par les services de cette direction à la Bceao. Où, il y a un cahier d’enregistrement et de décharge tenu par les deux entités afin d’avoir une traçabilité de toutes les transactions, outre l’existence du système informatique. Pour tout dire, quand le transitaire émet un chèque qui n’est pas fourni en liquidité, il est automatiquement rejeté par la Bceao. Dès lors, les services de la Direction des recettes douanières interpellent le mis en cause afin de recouvrir ladite créance selon les formalités dans un court délai de sorte à ne pas subir des pénalités allant jusqu’à la fermeture du compte d’exploitation lié à l’agrément en douane. Ce que l’on peut qualifier de sécurité financière( ?) a failli dans ce scandale financier.
Dans le cas d’espèce, des sociétés de transit, émettrices de divers chèques rejetés, travaillent allègrement sans être inquiétées. Ce, grâce à une malversation montée de toutes pièces avec la complicité de nombreux agents et du patron des recettes. Sinon comment comprendre et expliquer qu’une société qui a émis un chèque revenu rejeté, arrive-t-elle toujours à travailler sans payer sa créance ? Pour ce faire, deux systèmes de fraude, selon nos investigations, ont été peaufinés par les fossoyeurs. Primo, le transitaire en entente avec des agents de la recette et du service de recouvrement, émet de façon volontaire un chèque avec une signature non conforme qui de facto sera rejetée par la Bceao. En lieu et place du règlement de la créance, ledit transitaire et ses complices font établir à ce dernier un moratoire de paiement étalé sur plusieurs mois. De fait, un semblant de remboursement mais à hauteur de 3 à 4% du montant dû, le reste étant partagé entre lesdits agents et le transitaire véreux à qui, est remis une quittance afin de travailler sans être inquiété. L’autre stratégie consiste à faire acheminer les chèques à la Bceao où ceux-ci sont bel et bien enregistrés dans le registre à cet effet mais aussitôt repris. Portés ainsi disparus, la douane ne peut accuser le transitaire, émetteur. La valeur est donc partagée entre les agents véreux et la société de transit. Voulant en savoir davantage, le directeur de la recette principale, nous ayant refoulé, nous avons approché le service de communication de la douane, qui nous a tenu ces propos : «L’opérateur véreux peut-être suspendu d’émission de chèques dans l’espace de l’Union Economique et Monétaire de l’Afrique de l’Ouest (Uemoa). Il n’y a donc, pas de risques», a déclaré le colonel Méa de la Direction de la communication des Douanes ivoiriennes. «C’est vrai que des erreurs peuvent se produire. Mais très vite, les choses rentrent dans l’ordre ou bien c’est la banque qui paie les frais», a-t-il ajouté. Mais ici, bien que des chèques soient rejetés par la Bceao, ils n’ont jamais été retournés aux services de recouvrement pour être traités. Et c’est ici que l’équation se pose. Et comment ?

Grand bruit à la Douane
Toutes nos démarches auprès du Directeur des recettes douanières sont restées vaines. Depuis, la matinée du mardi 17 décembre 2013 jusqu’à ce jour, le receveur principal le colonel Yéo Gninankan refuse tout contact avec les journalistes. Pourtant, nous aurions voulu savoir pourquoi une telle légèreté ? Dans la mesure où le système informatique censé donner des résultats fiables n’est pas outillé en ce qui concerne le retour des chèques impayés. A ce propos, des indiscrétions nous ont fait savoir à la Douane que la direction de l’informatique a maintes fois interpellé la direction générale quant à cette faille dans la gestion du retour des chèques impayés sans que celle-ci ne réagisse. Est-ce donc fait de façon volontaire de sorte à constituer une poche d’enrichissement illicite ? Rappelons-nous de l’affaire Simat. Dans laquelle, il a été découvert un scandale de 6 milliards de nos francs avec Stéphane Eholié et Gnako Marcellin, alors receveur principal à la douane. Existe-t-il un réseau qui s’étend de la recette principale à la Bceao via les services de recouvrement de la douane? Quelles sont les sociétés impliquées dans cette affaire qui, selon des sources dignes de foi, fait perdre plus de 4 milliards Fcfa à l’Etat de Côte d’Ivoire ? Sur la question, nous avons pu avoir le nom de plusieurs sociétés entre autres, STK Transit, Sono Transit, EVT Transit et UNITRANS dont le patron est porté disparu depuis le bruissement dudit scandale. Approchés, le chef du personnel d’Unitrans et son collègue ont refusé tout commentaire. «Notre patron est souffrant et celui qui s’occupe de la gestion ici qui pouvait vous donner des informations fiables n’est pas présent.»Est-ce pour ce problème que le patron d’Unitrans, société de transit joue le malade imaginaire alors qu’un des employés ayant requis l’anonymat, a confié que le patron d’Unitrans et ses premiers responsables ont pris la
poudre d’escampette? Qui sont leurs complices ? De sources proches du dossier, C’est le capitaine des douanes, Ouattara qui a eu l’affaire en main. Pourquoi n’at-il pas saisi sa hiérarchie ? Veuton étouffer cette affaire en fermant sa bouche ? Veut-il protéger un certain Yobouet, principal maître d’orchestre dudit système au service recouvrement ? En tout état de cause, toutes nos démarches pour avoir la version des mis en cause ont buté sur un refus. Que veut-on cacher aux journalistes si on ne se reproche rien ? N’a-t-on pas fait de façon spéciale, une émission télé (un publi-reportage) quand la Douane a eu la certification Iso? De quelle certification parle-t-on quand un vol à col blanc de près 4 milliards de Fcfa s’opère et qu’on veuille l’étouffer? Le nouveau ministère du Budget, à qui revient désormais la gestion des régies (Douanes, Impôts) qui avait d’ailleurs réclamé un audit à la Douane, gagnerait à y investiguer.

Fabrice Tété