Côte d’Ivoire : Élections présidentielles en 2020 pour quoi faire ? Par Dr Kock Obhusu

Par Ivoirebusiness/ Débats et Opinions - ELECTIONS PRESIDENTIELLES EN COTE D’IVOIRE EN 2020 POUR QUOI FAIRE, Par Dr Kock Obhusu.

Dr Kock Obhusu.

L’année 2020 approche à grands pas. Avec elle, les échéances électorales en Côte d’Ivoire arrivent aussi. Ces élections sont de l’avis de certains observateurs censés être les véritables consultations électorales depuis la crise de 2010.

Ce qui reste, bien entendu, à prouver. Force est de constater malheureusement que les invectives, les petites phrases creuses, les procédures judiciaires expéditives sans tête ni queue et autres procès bidons et controversés contre les adversaires politiques et les personnalités de la société civile sous de fallacieux prétexte restent la règle.

Est-ce vraiment cela faire la politique ? Nous pensons, pour notre part, que ce n’est pas çà faire la politique. Si c’est vraiment çà, c’est à désespérer. La politique consiste ouvrir des perspectives aux citoyens, à leur tracer des voies à suivre pour que chacun trouve sa route, à leur garantir plus de libertés pour qu'ils s'épanouissent.

SORTONS DE LA BELLIGERANCE PERMANENTE EN REGARDANT NOTRE PASSE POUR MIEUX AVANCER

Notre pays a connu une très longue période de crises successives. Des crises qui ont débuté en 1977. Et nous avons encore les deux pieds dedans. A partir de cette année-là, les institutions internationales ont commencé à tremper leur nez dans les affaires intérieures de la Côte d’Ivoire. Ils ont commencé par la situation économique du pays.

Puis aujourd’hui ont leur nez dans la situation politique du pays. Cette situation a beaucoup fragilisé l’Etat de Cote d’Ivoire au point qu’il n’est pas exagéré de parler d’émasculation de l’Etat en Côte d’Ivoire.

Malgré les différents remaniements gouvernementaux dont le plus significatif a donné lieu au départ de ceux qui furent découverts par les auditeurs de ces institutions comme les fossoyeurs de l’économie du pays rien n’a vraiment changé.

Il s’agit d’un certain Henri KONAN BEDIE en charge de l’économie et des finances, d’Abdoulaye SAWADOGO en charge de l’agriculture et de Mohamed TIECOURA DIAWARA à la planification.

Les efforts d’Albert VANIE BI TRA, ce cadre de grande probité, nommé ministre du travail et de l’ivoirisation des cadres se sont avérés vains bien qu’il fût dans son cabinet entouré de cadres aux compétences avérés. Ce cuisant échec marquera la rupture entre le Président Félix HOUPHOUËT BOIGNY et le Président Philippe YACE.

CES POLITIQUES ECONOMIQUES STERILES QUI ONT FAIT TANT ET TANT DE MAL

Les plans économiques dits « programmes d’ajustement structurels » se sont succédés dès lors, sous la houlette des ministres Moïse KOUMOUO KOFFI et Dramane ALASSANE OUATTARA sans changer le cours des choses. Bien au contraire, ces plans ont plutôt empiré la situation.

L’insécurité s’est grandement accrue avec les braquages à gogo dans les grandes villes, surtout à Abidjan. Le taux de scolarisation s’est affaissé de façon monumentale. La décennie 1984 -1994 a été celle où l’illettrisme a connu en termes de proportion le niveau de 1960 en Côte d’Ivoire.

Toute cette misère sociale a été couverte par un discours démagogique auréolé du manteau de « Miracle » en lieu et place de Mirage. En matière économique, les ivoiriens et leurs autorités semblent oublier qu’on ne joue dans une cours des miracles. Seuls les faits font actes. Il n'y a pas de place pour le fétichisme et la fantasmagorie spirituelle.

Il faut dire que ce dont certains parlent aujourd’hui en faisant référence au passé date de 1960 à 1977. Une période où le pays a vécu sous l’héritage des réalisations coloniales avec entre autres : des vaccinations obligatoires et gratuites avant toute entre à l’école primaire, la distribution gratuite de tenues scolaires à l’école primaire et de matériel scolaire, les contrôles dentaires suivi de distribution gratuite de pâtes dentifrices, les programmes d’assainissement des espaces publics avec les agents de santé et de développement rural, etc.

Depuis à quoi assistons-nous ? Nous assistons à une dégradation inexorable en termes de proportion toujours, bien entendu, par rapport aux richesses produites des conditions de vie des familles.

Cela n’est pas normal. Pour couronner cette spirale négative, certains n’ont rien trouvé de mieux que faire basculer le pays dans une guerre stupide sous des prétextes fallacieux. Une guerre dont les seuls gagnants sont eux-mêmes et leurs familles. Ils ont rempli en un temps record leurs comptes bancaires pour ceux qui en avaient.

TOUT LE MONDE DEVRAIT AU MOINS S’ACCORDER SUR UNE CHOSE: LE RETOUR DU PRESIDENT LAURENT GBAGBO, PERE INCONTESTE DU MUTIPARTISME

2020, ce n’est pas demain. C’est aujourd’hui. Après des années de galère, ce qu’attendent les ivoiriens de ceux qui aspirent les gouverner demain, ce sont des programmes claires. Des programmes lisiblement chiffrés et ponctués d’échéances clairement définies, etc.

Ces élections de 2020 seront-elles véritablement libres, véritablement démocratiques ?

Ce qui se passe en ce moment permet d’en douter. Alors que nombreux ivoiriens commençaient à espérer avec l’acquittement du Président Laurent GBAGBO et du ministre Charles BLE GOUDE par une Cours Pénale Internationale partisane et véritablement hostile, voilà que de sordides machinations politiques sont orchestrées par le pouvoir en place pour maintenir très loin du pays, le père du multipartisme en Côte d’Ivoire.

Ils célèbrent Houphouët en tant que père de l’indépendance mais ils oublient de célébrer celui-là même qui ouvert le pays au pluralisme démocratique, Laurent GBAGBO. Ce faisant, ils oublient pour paraphraser un célèbre chanteur ivoirien « sans Gbagbo, il n’y aura jamais la paix en Côte d’Ivoire ».

Ce qu’attendent aujourd’hui les ivoiriens après tant et tant d’années de crise en tout genre et de misères, c’est en premier lieu le retour de Laurent GBAGBO en Côte d’Ivoire. Lui seul saura définir la place qu’il compte occuper dans la vie de son pays. Ensuite, voir les différents partis présenter de façon claire et nette leurs projets de société ainsi leurs programmes de gouvernement des années qui vont suivre 2020.

En faisant cela, ils répondront mieux aux préoccupations quotidiennes des ivoiriens au lieu de se fendre en petites phrases et invectives à longueur de journée.

QUELQUES AXES DE PROPOSITIONS A EXPLORER DANS LE CADRE D'UN PROGRAMME POLITIQUE

Concrètement il s’agit, selon nous de proposer aux ivoiriens :

Proposition 1 :
Comment assurer un droit à l’emploi à chacun par une implication directe de l’Etat ivoirien dans la création d’entreprises en sortant des postures idéologiques convenues.

Proposition 2 :
On voit les casses des baraquements précaires chaque jour, la démolition des constructions anarchiques à tous les coins de rue dans les grandes villes. L’Etat a le devoir bien entendu d’assainir l'environnement des citoyens. Mais l'Etat ne doit pas se contenter de celà. Il doit aussi humaniser les conditions de vie des populations concernées par les démolitions. Le peuple attend des propositions chiffrées et rythmées dans ce sens. Concrètement, il faut penser le développement de ce pays au-delà du petit périmètre d’Abidjan. Le réfléchir et le concevoir depuis Korhogo, Man, Abengourou, San-Pedro, Lakota, Gagnoa, Bouna, Ferkessédougou, etc.

Proposition 3 :
Quelle politique de transport public dans les villes, quelle politique de l’habitat pour résorber l’expansion de certaines pandémies qui bouffent des vies entières. Voila un axe que les ivoiriens attendent de voir clarifié.

Proposition 4 :
Aujourd’hui, on parle plus de la culture qu’on ne la fait et qu’on ne la soutient. L’essentiel des prestations artistiques se passent dans des équipements mis en place par des ambassades de France et d’Allemagne, etc. Une politique de promotion culturelle ne consiste pas à donner une enveloppe à un artiste ou à plastronner à ses côtés à l’occasion d’un événement. Les artistes, les écrivains et autres ne doivent pas être réduits à la mendicité. Il n’y a aucun centre culturel digne dans les villes de ce pays. L’expression culturelle commence par là. Que proposent les partis en présence à ce niveau.

Proposition 5 :
Assurer la sécurité et les libertés des ivoiriens. Les ivoiriens ne se sentent plus du tout en sécurité dans leur environnement. Ce n’est pas normal. Il ne s’agit plus seulement de constater et réprimer les infractions. Il s’agit surtout de les prévenir autant que faire se peut. Et cela sur l’ensemble du territoire national, y compris dans les plus petits campements. Aujourd’hui pour un oui ou un non, c’est la MACA. Ce n’est pas cela une politique sécuritaire digne. Il faut bien au contraire, faire un maillage de l’espace national afin de prévenir les actes délinquance et rassurer les honnêtes citoyens en dissuadant les malhonnêtes.

Proposition 6 :
Quel projet économique porte-t-on et qui est capable d’induire une dynamique meilleure ?
Çà, on ne voit rien de ce côté là. Nous pensons qu’il est temps aujourd’hui de changer de paradigme dans la politique de développement de la Côte d’Ivoire. L’Etat dans un pays comme celui-là doit se positionner clairement en tant qu’investisseur dans des activités économiques avec le lancement de sociétés d’Etat. Quitte à se donner une période pour faire un bilan (vingt ans, trente ans, etc.). C’est de cette façon que des pays puissants aujourd’hui comme par exemple le Japon, la Chine, le Brésil pour ne citer que ceux là, ont opéré leur transformation économique. Ils n’ont jamais cédé aux chants des sirènes d’un libéralisme castrateur.

Proposition 7 :
Enfin, chaque parti doit pouvoir préciser aux ivoiriens comment il compte diffuser les responsabilités à tous les niveaux pour mieux équilibrer les pouvoirs dans l’Etat et comment asseoir des règles partagées et accepter de tous.

En conclusion,
Voilà à notre avis, ce qui devrait prévaloir en cette période dans la perspective des élections à venir pour permettre aux ivoiriens de faire leur choix en toute connaissance de cause.

Dr Kock Obhusu
Economiste, Ingénieur