Affaire «Gbagbo a refusé le soutien d’avocats africains» : Me Habiba Touré dément !

Par Le Temps - Affaire «Gbagbo a refusé le soutien d’avocats africains». Me Habiba Touré dément !

Me HABIBA TOURÉ, avocate de Madame Simone Ehivet Gbagbo. Image d'archives.

Des avocats africains ont voulu apporter leur soutien au Président Gbagbo. Pourquoi ce soutien ? Quels sont les arguments qu’ils ont avancés ?

Tout d’abord, permettez moi de préciser un point, car il faut savoir rendre à César ce qui est à César: je ne suis ni l’initiatrice ni la rédactrice de la requête Amicus Curiae. Il ne s’agit d’ailleurs pas spécifiquement d’avocats mais plutôt d’intellectuels africains, réunis semble-t-il au sein de l’Adsf, qui est une association représentée par Me Jean de Dieu Momo, et qui a déposé une requête Amicus Curiae auprès de la Cpi. La possibilité du dépôt d’une telle requête est prévue par la règle 103 du règlement de procédure et de preuve de la Cpi. En l’espèce, ces intellectuels africains souhaitaient attirer l’attention de la Cour sur les révélations faites par la presse et par certaines Ong quant à l’attitude du Procureur, et plus largement de son bureau. Ils ont sans doute voulu participer à une bonne administration de la justice, en lui apportant des éléments qui leur paraissaient importants.

Il ne s’agirait peut-être pas pour eux d’apporter un soutien au Président Laurent Gbagbo ?

A titre de comparaison, quand Mediapart a fait ses révélations sur l’attitude du Procureur de la Cpi, cela n’était pas pour soutenir le Président Laurent Gbagbo, mais pour dénoncer un comportement répréhensible attribué au Procureur de la Cpi. Bien sûr, cela peut être profitable à une partie, mais il n’en demeure pas moins que les révélations ont été faites dans un souci d’informer le public. Et bien là, c’est la même chose, ces intellectuels africains semblaient plutôt vouloir intervenir pour participer à une bonne administration de la justice par la Cpi, et cela en présentant des observations, compte tenu de ces révélations et des incidences qu’elles pourraient avoir sur la perception du procès en cours.

Des informations font état de ce que le Président Gbagbo aurait refusé le soutien de ces intellectuels africains. Peut-on avoir de plus amples informations sur la question?

Comme je vous l’ai indiqué, une requête amicus curiae n’est pas un soutien mais des observations faites pour participer à une bonne administration de la justice. Une telle requête ne requiert donc pas l’accord ou le refus du Président Laurent Gbagbo. D’ailleurs, et sauf erreur de ma part, le Président Laurent Gbagbo ne s’est jamais exprimé pour « refuser » cette requête, cela n’aurait d’ailleurs eu aucun sens. Par contre, le Juge-Président a, à l’occasion du dépôt de cette requête, demandait tant à l’accusation qu’aux équipes de défense du Président Laurent Gbagbo et du ministre Charles Blé Goudé, de faire part de leurs éventuelles observations. C’est ainsi que des critiques ont été, semble-t-il, faites quant au contenu de la requête, et que des réserves ont été formulées sur le principe juridique de cette démarche.

A quoi doit-on s’attendre maintenant ?

La Cour doit se prononcer sur l’acceptation ou le rejet de la requête, qui sera fort probable. Mais même si la requête est rejetée, je pense qu’il faut tout de même saluer l’initiative de l’Adasf qui a souhaité par son intervention attirer l’attention de la Cour sur les révélations de la presse et des critiques des Ong. Cela montre aussi que des intellectuels africains ne souhaitent plus se limiter à un rôle de spectateurs dans la procédure Cpi, et souhaitent pouvoir faire des observations dans l’intérêt de la justice, en attirant l’attention de la Cour sur tout ce qu’il leur parait fondamental.

Interview réalisée par :

Yacouba Gbané