Présidentielle 2020/Réconciliation : Tête-à-tête tendu entre Alassane Ouattara et les Evêques au Palais

Par Ivoirebusiness - Présidentielle 2020/Réconciliation. Tête-à-tête tendu entre Alassane Ouattara et les Evêques au Palais.

Le président Alassane Ouattara a reçu la conférence épiscopale de Côte d'Ivoire le mercredi 19 février 2020.

Les Evêques ivoiriens ont été reçus ce mercredi 19 février 2020 au palais présidentiel d’Abidjan-Plateau par le Président Alassane Ouattara, a appris un journaliste d’Ivoirebusiness.
De source officielle, il s’agissait d’une rencontre conviviale sur la réconciliation nationale et la paix.

Le Président Alassane Ouattara se réjouissant même d’une rencontre portant sur la marche de la nation et la réconciliation.

« J’ai eu une rencontre, ce mercredi 19 février, avec une délégation de la Conférence des Évêques catholiques de Côte d’Ivoire conduite par le Cardinal Jean-Pierre KUTWA.
Nos échanges ont porté sur la marche de la Nation et le processus de réconciliation nationale », a déclaré le chef de l’Etat à l’issue de la rencontre.

Même son de cloche du côté des Evêques.
« Nous sommes venus pour tout d’abord pour saluer le président et échanger avec lui sur la marche du pays, particulièrement autour des questions concernant la réconciliation de tous les ivoiriens », a déclaré le président de la conférence épiscopale de Côte d’Ivoire, Mgr Ignace Bessy Dogbo.

Mais selon une source bien introduite, cette rencontre de vérité entre les hommes de Dieu et le chef de l’Etat à 8 mois de l’ élection présidentielle, était tendue.

Les Evêques réitérant au chef de l’Etat leurs conditions pour des élections présidentielles apaisées et crédibles en 2020.
Et cela passe passe nécessairement par la réconciliation nationale.

Il s’agissait aussi pour eux de vider avec le chef de l’Etat, tous les malentendus et contentieux, surtout après l'annulation de la marche priante du 15 février 2020 par le gouvernement.
Le tout durant un huis clos de 2 heures toujours selon nos informations.

Pour rappel, les Evêques de Côte d’Ivoire, à l’issue de leur 114ème Assemblée plénière tenue dans le diocèse de Korhogo le 19 janvier 2020, ont adressé un message aux Ivoiriens et 4 conditions pour des élections apaisées en 2020.
Voici leurs 4 conditions :

« CONDITIONS POUR DES ÉLECTIONS APAISÉES

Les élections d’octobre 2020, nous en convenons, représentent un tournant décisif pour notre pays. Nous saisissons les enjeux importants qui se jouent dans ces consultations électorales, qui doivent être préparées minutieusement et avec la conscience qu’il s’agit là du destin et de l’avenir d’un peuple, d’une nation, voire d’une sous-région, en raison de ce que représente la Côte d’Ivoire pour la partie occidentale de l’Afrique. La situation sécuritaire de cette sous-région, rendue particulièrement délicate ces dernières années, doit nous convaincre que nous n’avons pas droit à l’erreur.

Au vu de cette situation, la première condition qu’il faut observer dans la préparation de ces élections doit être la réconciliation. Cette réconciliation suppose, voire exige le retour des exilés avec des garanties de sécurité et de réintégration, la libération de tous les prisonniers politiques et d’opinion, sans exception et le dégel des avoirs. Nous saluons tous les efforts accomplis par nos gouvernants dans le sens de la réconciliation, et les encourageons à aller plus loin.

Nous rappelons qu’il est de leur devoir de créer toujours davantage un climat d’apaisement nécessaire à la conduite d’élections apaisées. Tous les leaders politiques doivent s’inscrire dans cette dynamique, sans recourir à la violence comme solution aux problèmes.

La deuxième condition est celle de la concertation et du consensus, pour prendre en compte les exigences et les aspirations légitimes de tous les acteurs sociopolitiques et les avis éclairés de la communauté internationale. Le dialogue entre acteurs politiques et société civile si bien relancé récemment, la concertation nationale périodique, s’ils sont effectués dans la transparence et le respect de la différence, peuvent nous apporter un regain d’énergie et de fraternité constructive. Nous devons en effet nous accorder sur le fait que les prochaines élections doivent être transparentes, crédibles et pacifiques, pour que tous acceptent les résultats qui en sortiront comme expression de la volonté de la majorité des Ivoiriens.

La troisième condition doit être l’instauration et la consolidation de l’Etat de droit qui implique le respect de la Constitution, afin que personne ne nourrisse l’intention ou la volonté de manipuler les personnes, les textes ni les institutions qui seront impliquées dans le processus électoral. Par ailleurs, le Pouvoir Exécutif devra agir de sorte à garantir aux personnes et aux institutions, notamment la Commission Electorale Indépendante (CEI), une totale indépendance. Comme toute compétition, les élections ont besoin d’un arbitre. De la position de l’arbitre dépend le bon déroulement de la compétition. Si l’arbitre est à la fois joueur et arbitre, la fin de la compétition est déjà connue. Par contre, si l’arbitre n’est qu’arbitre, avec une indépendance qui ne souffre d’aucun doute, la compétition se termine paisiblement. Voilà pourquoi le rôle d’arbitre dévolu à la CEI exige son indépendance totale. Or, la question de l’indépendance des structures devant arbitrer ces joutes électorales, comme la CEI divise et cristallise encore les tensions autant que le sont celles du découpage électoral, la question des pièces d’identité, de la liste électorale, du code électoral. Toutes ces questions exigent absolument un dialogue et une concertation entre tous les acteurs politiques, et méritent d’être étendues à la société civile.

La quatrième condition, qui est une conséquence logique de l’indépendance de la CEI, est celle d’une élection présidentielle ouverte, qui garantisse l’égalité des chances de tous les candidats désireux de compétir. La lutte contre l’exclusion trouverait ici tout son sens.

L’histoire est maîtresse de vie, et la Côte d’Ivoire d’aujourd’hui peut éviter de laisser aux générations futures, l’image d’un pays miné par des dissensions politiques. Nous invitons donc tous nos concitoyens à vivre cette année 2020 de façon sereine, à reconnaître dans le calme et la lucidité, la gravité des problèmes qui sont les nôtres, sans désespérer de l’avenir.

Au terme de notre message, nous implorons la miséricorde divine sur notre pays et tous ses habitants, par l’intercession de Notre Dame de la Paix, afin que nos efforts de conversion soient soutenus, nos désirs de vérité, de justice, de réconciliation et de paix affermis et que notre nation continue sa marche dans la sérénité et la paix.

Fait à Korhogo, le 19 janvier 2020.

Les Archevêques et Evêques de Côte d’Ivoire. »
Serge Touré