MICHEL BAROAN (PDT DES RÉFUGIÉS IVOIRIENS EN FRANCE) : «Le régime prépare une autre crise en Côte d’Ivoire»

Par Le Temps - MICHEL BAROAN (PDT DES RÉFUGIÉS IVOIRIENS EN FRANCE) «Le régime prépare une autre crise en Côte d’Ivoire».

Les membres du Bureau de l'URIF Georges Aka, Serges Kassy, Michel Baroan (Président), la Ministre Clothilde Ohouochi, et Christian Vabé (parrain de l'URIF). Le 20 juin 2014 Paris Iremmo.

Michel Baroan, ancien Dg du Burida, est le président des réfugiés ivoiriens en France, depuis la fin de
la crise postélectorale. Il évoque la situation sociopolitique de la Côte d’Ivoire et du procès de Gbagbo.

Quand mettrez-vous fin à
votre exil pour rentrer en
Côte d’Ivoire ?

Il n’est pas du tout aisé de vivre
loin des siens et de ses repères
historiques et culturels. Si nous
sommes en exil, c’est bien parce
que nous y avons été contraints
par la dictature et la violence du
pouvoir de Monsieur Ouattara,
avec son lot d’exactions et de tueries.
Et pour répondre en toute
sincérité à votre question, je serai
de retour dans mon pays, quand
les conditions de la paix seront
réunies. Quand le pouvoir en
place empruntera enfin le chemin
de la réconciliation et non de la
justice des vainqueurs

Comment se porte
l’Union des réfugiés ivoiriens
résidents en France
que vous dirigez ?

Notre Union est encore jeune, car
c’est la première du genre en ce
qui concerne les Ivoiriens qui se
sont exilés en Europe en général
et en particulier, en France. A ce
titre, nous démarrons certes timidement,
mais nous comptons
amplifier nos activités graduellement.
Sinon L’Urif (l’Union des
refugiés ivoiriens en France) se
porte très bien. D’ailleurs, nous
comptons sur vous, pour porter
haut son message.

Comment il vous est venu
l’idée de créer cette Union ?

L’idée nous est venue de par le
vide qui existait dans le domaine,
et auquel nous avons nous-même
été confrontés quand nous avons
entamé les démarches pour nous
faire reconnaître comme refugiés,
en France. En réalité, dans notre
pays d’accueil (la France), nous
n’avions aucune structure pour
nous aider et nous conseiller.

La structure regroupe
aujourd’hui, combien
d’Ivoiriens ?

Il faut sortir de la guerre des
chiffres. Notons qu’elle regroupe
en son sein, des artistes, des
cadres Ivoiriens en exil, des corps
habillés et des ivoiriens lambdas.
Vu les appels de détresse que
nous recevons de nos compatriotes,
nous pensons compter
d’ici quelque temps, entre 500 et
1000 membres au moins, car ils
sont nombreux ceux parmi nous,
qui n’ont pas encore de titre de
séjour.

Quelles sont les conditions
pour être membre ?

Comme toute association, pour
être membre, il faut s’acquitter de
son droit d’adhésion, et par la
suite, payer ses cotisations. C’est
l’occasion de préciser que, peuvent
être membres de l’Urif, non
seulement des personnes demandeurs

Pensez-vous que votre
message passe dans
l’opinion française ?

Bien entendu, que L’Urif (Union
des refugies ivoiriens en France)
est soumise à la législation
française, dès lors qu’elle est
déclarée officiellement et s’est fait
connaitre auprès d’elle. Ne manquons
pas de souligner que c’est
une très jeune association et
qu’elle nous appelle à la construire,
à la faire grandir pour qu’elle
devienne incontournable dans les
opinions en France et au-delà.

Quel est votre regard sur
la situation sociopolitique,
avec le procès des
pro-Gbagbo qui s’ouvre
en Côte d’Ivoire ?

L’histoire de la crise postélectorale
est récente et nous en sommes
des acteurs ou des spectateurs. Ce
qui nous permet de dire sans
risque de nous tromper que ce
procès qui va s’ouvrir à La Haye,
contre le Président Laurent
Gbagbo est un procès politique.
En même temps que nous le
disons, nous remarquons que
depuis qu’il est pris en otage, la
Cote d’Ivoire n’arrive pas à
retrouver la paix. Ceux qui pensaient
qu’en l’envoyant loin de la
terre de ses ancêtres, allaient le
faire oublier, ont eu tort. Le
déroulement des évènements
nous montrent bien que Gbagbo
est indispensable à la réconciliation.
Aussi, l’actualité politique
n’est pas rassurante. Pour preuve,
au fil du temps qu’on approche
des prochaines échéances électorales,
les tensions s’exacerbent,
et l’opposition est aux portes des
prisons avec ce procès aux Assises
à venir. C’est à croire qu’on prépare
le lit d’une prochaine guerre
postélectorale. Pourtant, le pays
porte encore les stigmates de la
précédente crise, que le pouvoir a
du mal à faire effacer.

Comment vous voyez la
suite du processus de
réconciliation en Côte
d’Ivoire ?

Le Cdvr ayant montré ses limites.
Le pouvoir ne doit pas avoir peur
du dialogue, de la justice transitionnelle,
de sorte à ce que la
vérité soit dite et sue, qu’elle éclate
et soulage ces nombreuses victimes
qui n’attendent que cela. La
justice aux ordres du pouvoir ne
peut pas réconcilier. Seule la
vérité et la vraie justice peuvent
exorciser les douleurs et les souffrances.

Comment vous jugez la
chute de Compaoré ?

Blaise Compaoré est un déstabilisateur
de la sous-région et je
pense que son cas fera école en
Afrique. Tous les dictateurs qui
voudront tripatouiller les constitutions
de leurs pays pour s'imposer
subiront le même sort que
Blaise. En tant que Chrétien, je
ne me réjouis pas du malheur de
mon prochain. Mais je pense que
ce qu'il vit en ce moment, loin de
son palais et de son pays lui servira
de leçon.

Et comment vous appréciez
son exil en Côte d’Ivoire ?

En ce qui concerne son exil en
Côte d’Ivoire, je n'y vois aucun
mal à cela. Tout individu dont
l'intégrité physique et morale sont
menacés pour son appartenance
ou son opinion politique et ou
appartenance à un groupe à le
droit de demander et d'obtenir le
droit d'asile dans le pays où il se
sent en sécurité. Cependant, la
Convention de Genève ne protège
tout individu convaincu et poursuivi
de crime de sang ou de
crime économique. En l'espèce, il
appartient donc au peuple du
Burkina Faso de décider de son
sort en ce qui concerne les faits
susmentionnés.

Entretien réalisé par
Guehi Brence
gbrence02063193@yahoo.fr