Découverte d'une poudrière au domicile de Ange KESSI : Et si le Procureur militaire plaidait honnêtement coupable !

Par IvoireBusiness - Découverte d'une poudrière au domicile de Ange KESSI : Et si le Procureur militaire plaidait honnêtement coupable ! Par Roger Dakouri Diaz, juriste.

L'arsenal de guerre découvert au domicile du procureur militaire Ange Kessy.

LU POUR VOUS

Depuis quelques jours, ce qui pouvait être mis au compte de purs commérages, s'est révélé réalité : une perquisition du domicile de Monsieur KESSI Ange, ci-devant inamovible Procureur militaire, s'est soldée par la découverte d'un arsenal de guerre et autres outils militaires.

Pour sa défense, le Procureur du parquet militaire fait carrément valoir que :
«Ces armes ont servi pour des jugements…J'ai envoyé ces armes à mon domicile parce que la Tour A était en réhabilitation. D'abord ces armes sont vieillissantes. Elles ne peuvent pas retentir… Si l'affaire est aujourd'hui aux yeux de tous, c'est parce que l'un de mes gardes aurait volé quelques armes pour les vendre. Dans tous les cas, ils sont jaloux de moi…». Fin de citation.

De la part d'un magistrat du parquet, de telles allégations sont non seulement intenables mais choquantes.
Qu'induisent les allégations «Ces armes ont servi pour des jugements » ?

Par de tels propos, le Procureur militaire est-il en train de nous dire que les armes découvertes à son domicile ne sont autres que des corps de délit, en d'autres termes, des pièces à convictions placées sous scellés dans le cadre des procès qui ont déjà eu lieu ?

LA CONSERVATION DES SCELLÉS RELÈVE-T-ELLE DU CHAMP DE COMPÉTENCE DU PROCUREUR MILITAIRE OU DE CELUI DU GREFFE ?

L'inanité des arguments de Monsieur KESSI Ange est d'autant manifeste que la conservation des scellés échappe à la compétence du Procureur militaire.
En effet, il est certes constant que lorsque les officiers de police judiciaire défèrent un militaire ou un civil devant le Procureur militaire, le mis en cause est accompagné, le cas échéant, des instruments ayant servi à la Commission de l'infraction. Il peut s'agir donc d'une arme à feu ou d'une arme blanche ou d'une simple matraque.

Mais, à l'instar du Procureur des parquets civils, le Procureur militaire donne immédiatement suite au dossier en l'attribuant à un juge d'instruction militaire en vue d'une information judiciaire. Dès lors, le dossier est donc remis au juge d'instruction avec toutes ses pièces à conviction. Il revient donc à ce juge d'instruction, et à lui seul, de placer sous scellés le corps du délit, c'est-à-dire, l’arme du crime, assorti de l'établissement d'un état des pièces à conviction à verser au dossier, à charge pour le greffier militaire de réceptionner et de conserver cette pièce à conviction pour les besoins de l'instruction, et le cas échéant, du procès.

Il importe d'indiquer que l'établissement d'un état des pièces à conviction dans une procédure judiciaire répond au souci cardinal d'enregistrer l'arme du crime dans un registre spécifique dont les références sont estampillées sur ladite pièce à conviction, avec pour souci d'éviter une dommageable confusion dans le lot de la multitude de preuves similaires. Cela veut donc dire qu'une pièce à conviction ne circule pas, d'un lieu à un autre, sans laisser traces.

Finalement, la pièce à conviction est forcément conservée par le greffier militaire jusqu'à la clôture de l'instruction. Si l'enquête menée par ce juge d'instruction se soldait, par exemple, par un non lieu, c'est-à-dire qu'il n'y a pas lieu à poursuivre, le mis en cause serait en droit de solliciter la restitution de l'arme. Autrement, la pièce à conviction sera présentée lors du procès à l'audience par les juges, et non le Procureur militaire.

PAR QUELLE ALCHIMIE DES SCELLÉS AYANT SERVI AU JUGEMENT SE RETROUVENT-ILS ENCORE ENTRE LES MAINS D'UN PROCUREUR MILITAIRE ?

Faire croire que les puissantes armes découvertes au domicile du Procureur militaire sont des scellés ayant servi à des procès, relève d’allégations manifestement mensongères.
En effet, tout comme devant le juge d'instruction militaire, le jour du procès, les scellés sont à la disposition des juges, et non du Procureur militaire, lequel Procureur militaire ne vient à l'audience que comme une partie en appui de son accusation. Les scellés qui vont servir au procès n'ont donc aucun contact avec lui.

Il suit de cela que si les juges retenaient la responsabilités d’un prévenu ou d'un accusé, non seulement qu'ils entreront en voie de condamnation, mais ils prononceront concomitamment des mesures de confiscation du corps du délit.

Sera-ce à partir de ce moment-là que les juges auraient encore restitué ces armes au Procureur militaire pour en assurer la conservation ? Tant s'en faut.

Comme nous l'avons indiqué précédemment, depuis la saisine d'un juge d'instruction militaire, et le dossier judiciaire, et l'ensemble des éléments de preuve, lui sont transmis jusqu'au procès.
Dès lors, comment ces armes ou pièces à convictions, régulièrement placées sous scellés, se retrouveraient-elles encore sous l'autorité du Procureur militaire pour en assurer la conservation, et non à la salle des scellés placée sous la responsabilité du greffier militaire ?

DU CARACTÈRE INOPÉRANT DE L'ARGUMENT TENANT À LA DÉFECTUOSITÉ DES ARMES SAISIES

Cet autre argument ne saurait être salvateur pour notre puissant et éternel Procureur militaire Ange KESSI.
Il est de règle, en effet, que tout corps de délit, n'étant d'aucune utilité, fait forcément l'objet d'une destruction publique pure et simple.

Dès lors, en vertu de quel principe légal la résidence du Procureur militaire devient le musée de scellés de pièces à conviction défectueuses ?
On dit à Abidjan : «Si c'est mou, c'est mou…».

Ange KESSI doit impérativement justifier, et l'origine des armes découvertes à son domicile, et l'usage qu'il entendait faire d'un tel arsenal de guerre ou passer à la guillotine. Épicétou !

L'Activateur Tchedjougou OUATTARA