Débats et opinions: La tragédie israélo-palestinienne dévoile les limites de la sagesse humaine

Par Correspondance particulière - La tragédie israélo-palestinienne dévoile les limites de la sagesse humaine.

Morts palestiniens après les bombardements israéliens.

LA TRAGÉDIE ISRAÉLO-PALESTINIENNE DÉVOILE LES LIMITES DE LA SAGESSE
HUMAINE

Nous ne pouvons rester insensibles à l’article du professeur Nyamsi
publié le samedi 02/08/2014 sur le site Afric53.com dans lequel il
s’évertue à démontrer que la tragédie Israélo-palestinienne se
déguise dans les habits pervers du nationalisme. Il écrit : « La tragédie
israélo-palestinienne est incontestablement une illustration parfaite de la
bêtise humaine […] La bêtise humaine, c’est la domination de la chose
publique par les amateurs d’intérêts égoïstes et de glorioles
éphémères. Or, le nationalisme, culte du veau d’or de l’appartenance
exclusive à une ethnie, une terre, une idéologie exclusiviste fondant une
humanité qui se croit supérieure à toutes les autres, c’est justement la
source de tous les mépris de l’Homme pour sa propre humanité et pour
celle d’autrui. Le sionisme d’aujourd’hui, comme la logique de mort du
Hamas, c’est comme l’ivoirité de Gbagbo. C’est comme l’apartheid de
Botha.». Il est, de prime abord, utile de sauvegarder la mémoire collective
ivoirienne (notre Histoire), en rappelant au sieur Nyamsi, professeur
agrégé de philosophie, d’origine camerounaise, que le président Gbagbo
n’est pas le père de l’ivoirité. Sa lutte politique a pour fondement la
révision des accords signés à l’aube des « indépendances » entre la
France et ses ex-colonies devenues, après 1960, des « territoires autonomes
» et non des nations indépendantes. Dénoncer les actes politiques
d’Alassane Ouattara, qui brade la nationalité ivoirienne à un électorat
venu d’ailleurs, se défendre contre des « apatrides » armés par la
France, dans le but de conquérir le pouvoir politique en Côte d’Ivoire,
pour le compte de Ouattara, n’est pas faire la promotion du nationalisme.
Les démocrates ivoiriens luttent pour la survie de leur peuple annexé par
des étrangers armés venus du Nord, sous le couvert de la France. Conquérir
notre souveraineté dans les urnes, en choisissant librement, dans la
transparence, au suffrage universel, nos propres gouvernants, capables de
défendre les intérêts de notre peuple est un objectif politique loin
d’être égoïste puisque conforme aux objectifs assignés par la Charte
des Nations Unies. L’un des buts des Nations Unies est de développer, en
effet, entre les nations des relations amicales fondées sur le respect du
principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer
d’eux-mêmes, et à prendre toutes autres mesures propres à consolider la
paix du monde. L’intervention militaire de la France dans la politique
intérieure de notre pays dans le cadre d’un contentieux électoral est
l’illustration parfaite de la violation du respect de ce principe de
l’égalité, puisqu’aucun pays ne se permettra d’intervenir
militairement en France pour résoudre une crise similaire. Si la France nie
volontairement, et de manière subtile, le droit des pays africains à
disposer d’eux-mêmes cela signifie que nos pays africains sont régis, en
réalité, par l’article 73 de la Charte des Nations Unies qui stipule que
les Membres des Nations Unies qui ont ou qui assument la responsabilité
d’administrer des territoires dont les populations ne s’administrent pas
encore complètement elles-mêmes reconnaissent le principe de la primauté
des intérêts des habitants de ces territoires. Ils acceptent comme une
mission sacrée l’obligation de favoriser dans toute la mesure possible
leur prospérité… La destruction de l’armée républicaine ivoirienne et
de nos institutions souveraines par l’armée d’occupation française, la
déportation à la Haye de Gbagbo, un Chef d’État africain torturé et
humilié sont l’illustration parfaite de notre statut de territoires
autonomes et non de nations indépendantes. La lutte politique du président
Gbagbo pour notre droit à disposer de nous-mêmes, et même l’ivoirité de
Bédié, tant combattue par ses propres partenaires politiques du RHDP,
n’ont jamais fait l’apologie des armes, avant l’arrivée de Ouattara
dans l’arène politique ivoirienne, le père de la doctrine politique du
rattrapage ethnique, fondée justement sur la lutte armée. Le combat
politique du président Gbagbo et des démocrates ivoiriens ne peut, par
conséquent, être comparé au « sionisme d’aujourd’hui » qui
revendique et défend, au moyen des armes, son droit à l’existence ou à
la lutte armée du Hamas. Falsifier les faits c’est contribuer à
l’éclosion de nouveaux conflits fratricides. La réconciliation en Côte
d’Ivoire ne sera possible que si chaque ivoirien accepte de se remettre en
cause et choisit surtout d’avoir pour compagne la vérité. Que dire de la
tragédie Israélo-Palestinienne ? Affirmer que la tragédie
Israélo-Palestinienne est incontestablement une illustration parfaite de la
bêtise humaine, en se contentant d’égrener les sept principaux aspects du
conflit israélo-palestinien susceptibles de permettre aux Juifs aux
Palestiniens, et aux Musulmans de vivre en paix, c’est poser simplement un
regard occidental sur cette tragédie. La lutte politique des africains pour
leur souveraineté implique aussi le refus de ce suivisme béat, car les
africains juifs, chrétiens ou musulmans, qui ont connu un parcours
historique loin des compromis, des compromissions, des intrigues, des
passions, des préjugés du monde occidental et arabe, se doivent de poser un
regard nouveau sur le conflit Israélo-Palestinien. Il nous faut, en effet,
apprendre à analyser ces conflits internationaux, sous une optique nouvelle,
sous un angle propre à notre histoire, à nos propres réalités. Prétendre
que la tragédie Israélo-palestinienne a pour origines l’amateurisme
d’hommes politiques juifs, arabes, des jouisseurs de pouvoir avides
d’intérêts égoïstes et de glorioles éphémères qui se déguisent,
comme en Afrique (en Côte d’Ivoire, dans les habits pervers du
nationalisme est une analyse purement simpliste et erronée. Les chrétiens
arabes en Irak ou en Syrie seraient-ils persécutés par des groupes
extrémistes musulmans pour des motifs nationalistes ou sous les habits
pervers du nationalisme? La guerre de sécession aux États-Unis qui a
opposé, comme en Côte d’Ivoire, des citoyens qui vivaient sur un même
territoire avait-elle une connotation nationaliste ? Non ! Dès l’instant
où les mêmes effets (les luttes fratricides, religieuses) ne sont pas
produits par les mêmes causes, la tentative du professeur de qualifier la
tragédie Israélo-Palestinienne de bêtise humaine est infondée,
incomplète. Nous sommes, par conséquent, invités à rechercher ailleurs
les véritables causes de cette tragédie qui sont loin d’être la
conséquence de la bêtise humaine ou de sentiments nationalistes. Le
professeur Nyamsi propose de surcroît une solution à ce conflit fratricide,
quand il écrit: « Voilà pourquoi, je partage l’option du Président
Mahmoud Abbas, Chef de l’Autorité Palestinienne, qui en appelle à
l’intervention salvatrice d’une Force Armée Internationale des Nations
Unies, pour désamorcer la spirale de mort entretenue par les extrémistes
d’Israël comme ceux du Hamas. Et redonner une chance à ces Israéliens et
ces Palestiniens qui, depuis la nuit des temps sémitiques, tels Ismaël et
Isaac leurs ancêtres, veulent vivre ensemble en bons voisins, tout
simplement en tant qu’êtres humains sur la même terre, habités par un
désir commun de joie, de justice, de vérité et de sens. » Observons les
faits pour juger de la pertinence de cette solution politique qui vise à
résoudre un conflit enraciné dans des questions religieuses. Il est bon de
souligner, à partir de notre propre histoire, de nos propres crises
politiques, que les Forces Armées Internationales envoyées par l’ONU dont
le professeur Nyamsi se fait le chantre, ne prospèrent que lorsqu’elles
entretiennent, de manière subtile, comme en Côte d’Ivoire, le feu de la
division, le désordre, l’insécurité, l’impunité. Comment expliquer,
en effet, le mutisme de ces Forces armées et de leurs représentants
politiques dans le dialogue social en Côte d’Ivoire où Ouattara ne fait
que jeter les bases de conflits fratricides, d’une révolution sociale?
Pourquoi n’interviennent-elles qu’après les incendies et ne
s’attellent-elles pas à lutter contre leurs causes? Les origines de la
tragédie Israélo-Palestinienne remontent, en effet, à la nuit des temps
sémitiques, où Ismaël et Isaac, leurs ancêtres, étaient déjà
confrontés aux prémices de ce conflit fratricide, lorsque Sara, mère
d’Isaac, invita le patriarche Abraham à répudier sa servante Agar et son
fils Ismaël, à l’éloigner de la descendance juive. Elle dit à son
époux : « Chasse cette servante et son fils (Ismaël), il ne faut pas que
le fils de cette servante hérite avec
mon fils Isaac » (Gn 21, 10). Cette prophétie sera reprise au moment de la
naissance de Jacob, le père des douze tribus d’Israël et de son aîné
Esaü, qui s’unira à la descendance d’Ismaël . Les enfants se
heurtaient dans le sein de Rebecca, l’épouse d’Isaac. Elle alla
consulter le Dieu unique qui lui dit : «Il y a deux nations en ton sein,
deux peuples issus de toi, se sépareront, un peuple dominera un peuple,
l’aîné Esaü (les descendants d’Ismaël le fils aîné d’Abraham,)
servira le cadet Jacob (la descendance juive) » (Gn 25, 23). Quand Isaac
bénit l’aîné Esaü, il lui dit : « Loin des gras terroirs sera ta
demeure, loin de la rosée qui tombe du ciel. Tu vivras de ton épée, tu
serviras ton frère. Mais quand tu t’affranchiras, tu secoueras ton joug de
dessus ton cou » (Gn 27, 39-40). Le Dieu unique fit des fils de Jacob une
nation en leur concédant une « Loi fondamentale » par l’entremise du
prophète Moïse. Il leur donna en héritage la terre promise où
ruisselaient le lait et le miel. Il excita, cependant, leur jalousie,
lorsqu’imbus de leur propre sagesse, ils se rebellèrent contre Lui. Des
descendants d’Ismaël qui vivaient dans le désert, loin des gras terroirs,
Dieu fit alors une nation par l’entremise du prophète Mahomet, en leur
concédant, à leur tour, une Loi fondamentale inscrite dans le Saint Coran.
Ces différentes communautés religieuses (Juives, chrétiennes, musulmanes),
une fois aveuglées par la sagesse humaine (prônée par le monde politique),
seront enfermées, selon la prophétie de l’apôtre Paul, dans la
désobéissance. Elles se combattront, se haïront, comme annoncé par les
Patriarches. Nos solutions politiques, notre sagesse humaine ne pourront
mettre fin à la tragédie Israélo-Palestinienne. Ces peuples sont invités,
depuis les temps sémitiques, à découvrir, au moyen de la foi et non des
armes, le Message divin qui leur est caché pour vivre en paix. Les Juifs
sont héritiers de la Promesse divine, les chrétiens, héritiers de la
grâce divine, et les musulmans dépositaires de la Loi qui ne sera jamais
abrogée. La Promesse divine, la grâce divine, et la Loi constituent la
triade, la pierre d’angle sur laquelle doit reposer toute oeuvre humaine
qui aspire à la perfection, à la paix. Si l’Occident se limite à poser
un regard politique sur la tragédie Israélo-Palestinienne, nous africains,
éduqués dans la foi en un Être suprême, sommes invités à prendre
d’avantage en considération l’aspect religieux, spirituel, de ce conflit
fratricide, dans le but de surmonter tout préjugé à l’endroit des
musulmans, des chrétiens ou des juifs, puisque le conflit
Israélo-Palestinien sème les germes d’un conflit religieux mondial, en
opposant, avant tout, les fidèles de toutes les religions révélées. La
sagesse humaine limitée est incapable d’accueillir la sagesse divine, qui
est folie pour les hommes : c’est ce qui constitue, en fait,
l’illustration parfaite de la bêtise humaine.

Une contribution par Isaac Pierre BANGORET (Écrivain)