Côte d'Ivoire: OURAGA OBOU, NOTRE DECEPTION, Par Mme BAMBA Massany

Par Ivoirebusiness/ Débats et Opinions - Côte d'Ivoire. OURAGA OBOU, NOTRE DECEPTION, Par Mme BAMBA Massany.

OURAGA OBOU. Image d'archives.

Aujourd’hui, l’actualité politique ivoirienne est dominée par la question de la révision de la constitution ivoirienne. Des voix s’élèvent tant parmi la société civile que dans les groupements politiques, soit pour approuver l’idée, soit pour la décrier. Des experts du droit comme Francis Wodié ou encore Faustin Kouamé ont donné de la voix pour dénoncer ce projet qui vise une constitution pourtant votée à plus de 80% par les ivoiriens.
N’est-ce pas une volonté de monsieur Alassane Ouattara, d’effacer ainsi toutes les traces de son prédécesseur, le Président Laurent Gbagbo, fut-il son bienfaiteur dans un passé récent ? En quoi la révision de la constitution représente-t-elle un besoin ou une urgence pour les ivoiriens en ce moment ?La réconciliation que les ivoiriens appellent de tous leurs vœux ne devrait-elle pas constituer la priorité de tous ? Mais là n’est pas notre sujet.
Notre préoccupation du jour concerne la démoralisation actuelle des ivoiriens face à la perte des valeurs héritées de l'histoire de notre combat politique commun vers la démocratie. Des hommes et des femmes autrefois perçus comme des modèles semblent avoir carrément rompu avec l’éthique et la déontologie de leur profession, laissant le peuple et particulièrement leurs admirateurs dans le doute, l’amertume et la désespérance.
Dans ce lot de personnes sur lesquelles se portent plusieurs interrogations, se trouve M. Boniface Ouraga Obou, professeur émérite, ancien doyen de la faculté de droit de l’université d’Abidjan, constitutionnaliste reconnu et particulièrement au fait des enjeux politiques et juridiques nationaux. Ancien président de la sous-commission chargée d’élaborer la Constitution de la 2ème République en 2000, ancien Président du Comité Scientifique du Forum pour la Réconciliation Nationaleen 2001,c’est à lui qu’échoit encore aujourd’hui la tâche de présider le comité chargé de rédiger une nouvelle Constitution, à la tête d’un groupe de dix experts.
L’acceptation, par lui, de cette autre mission appelle de notre part quelques interrogations :
• Pourquoi M. Ouraga Obou ne se préoccupe-t-il pas de la réconciliation nationale dont il était le président du comité scientifique lors du Forum de 2001 initié par le Président Gbagbo et dont les conclusions n’ont jamais été publiées ?
• Que reproche M. Ouraga Obou à la constitution de l’année 2000 dont il était au cœur de l’élaboration et qui a été votée par les ivoirien y compris par le RDR d’Alassane Ouattara à plus de 80%, pour accepter cette autre mission ?
• Doit-on comprendre que ce vote massif des ivoiriens peut être remis en cause par la seule volonté de M. Alassane Ouattara ?
• Pourquoi ce si long silence de monsieur Ouraga Obou devant les nombreux cas de violations des dispositions constitutionnelles et légales de notre pays par monsieur Ouattara durant ses six ans de règne sans partage dont, entre autres :

- La modification des membres du Conseil constitutionnel en 2011 ;
- La nomination du président du Conseil Economique et Social ;
- Le maintien des ivoiriens en exil ;
- La répression des manifestations de l’opposition ;
- La situation de monsieur Alassane Ouattara à la fois Président de la République et Président de parti ;
- La politique de ‘’rattrapage ethnique’’ ouvertement pratiquée par le pouvoir ;
- L’élection par ‘’dérivation’’ autorisée pour le candidat Alassane Ouattara.
Ces questions n’affectent-elles pas gravement la crédibilité et l’objectivité de notre éminent professeur ? En effet, comment admettre de manière catégorique, au regard de ses choix controversés, que monsieur Ouraga Obou travaille au bonheur du peuple ?Son silence devant les souffrances infligées au peuple ivoirien, au mépris de la constitution (opposants emprisonnés, milliers d’ivoiriens en exil) ne le rend-il pas à la fois complice du régime et bourreau du peuple ?
Pour terminer, nous citerons le romancier Lain Pears qui dit que « La loi n'a pas de valeurs lorsqu'elle est injuste, et alors il faut n'en faire aucun cas », ainsi que Joseph Conrad qui déclare que : « Toutes les ambitions sont légitimes, excepté celles qui s'élèvent sur les misères de l'humanité ».

Une contribution de BAMBA Massany
Ancien Député