Droit de réponse à Monsieur Thomas Hofnung, chroniqueur au journal Le Monde Afrique, Par Prof BALOU BI

Par IvoireBusiness/ Débats et Opinions - Droit de réponse à Monsieur Thomas Hofnung, chroniqueur au journal Le Monde Afrique, Par Prof BALOU BI.

Professeur BALOU BI.

Paris, le 28 février 2019

Comme le disait le Professeur Emérite au MIT, Noam Chomsky (1), linguiste et analyste des médias et de la politique : « la propagande est à la société démocratique ce que la matraque est à l’Etat totalitaire ». Le journal le Monde ne déroge guère à cette règle.

En effet, dans votre parution en ligne du 13 février 2019, votre chroniqueur de la rubrique Le Monde Afrique, sous le titre « L’acquittement de Laurent Gbagbo apparaît comme une forme de réhabilitation », tente d’insinuer que la libération du Président Laurent GBAGBO serait une prime à l’impunité, car pour lui et je cite « …il n’y aurait pas eu sept ans de procédure pour rien si l’ancien Président ivoirien avait reconnu sa défaite dans les urnes.

En tentant de passer en force, il a pris une responsabilité historique, celle de précipiter son pays dans la crise la plus grave qu’il ait connue depuis son indépendance en 1960 ». Il dit par ailleurs pêle-mêle que l’ONU, l’Union Africaine, la CEDEAO, l’Union Européenne ont reconnu, plus ou moins rapidement après le scrutin, la victoire d’Alassane Dramane Ouattara ; et que ceux qui pointent la responsabilité de la France dans la crise ivoirienne seraient des « complotistes » qui tenteraient ainsi de dédouaner Laurent GBAGBO de toute forme de responsabilité dans cette crise.

Ces allégations biaisées, voire mensongères, ou à tout le moins, intellectuellement malhonnêtes, appellent quelques observations de notre part.

1 - De la posture du journal le Monde

Il est bon de rappeler ici que le journal le Monde fait partie des bras armés de cette nébuleuse d’intérêts politico-économiques qui a décidé d’assassiner, au sens figuré comme au sens propre, Laurent GBAGBO, depuis sa première accession au pouvoir, parce que tout simplement il défendait sa liberté et la souveraineté de son pays.

Il en est ainsi dans son édition du samedi 19 janvier 2011, d'un article écrit par un collectif de 38 universitaires dont la grande majorité résidait en France, sous le titre « Laurent GBAGBO, chef ethnocentriste » : ils écrivaient entre autres « Laurent GBAGBO s’est maintenu au pouvoir après avoir récusé les résultats du scrutin présidentiel, favorables à Alassane OUATTARA tels que proclamés par la commission électorale indépendante, certifiés par l’ONU et reconnus par la communauté internationale ».

A peu de mots près, le chroniqueur Thomas Hofnung ne dit pas autre chose, c’est à se demander s’il n’était pas membre du collectif des 38. En réponse à cet article, un collectif d’intellectuels ivoiriens va adresser un droit de réponse en date du 22 janvier 2011 pour rétablir la vérité des faits.

Dans ce droit de réponse, ils vont noter entre autres le manque de démarche intellectuelle de la part de ces pourfendeurs de Laurent GBAGBO qui, pour revendiquer le statut « d’intellectuels », auraient dû s’attacher plutôt à une méthode rigoureuse dans le raisonnement et la recherche de l’objectivité, qui aurait dû justement les éloigner de leurs subjectivités et des préjugés et clichés de type primitivistes quand il s’agit d’obéir à leurs commanditaires dans leur entreprise de « characterassassination » à l’endroit de Laurent GBAGBO.

Ce droit de réponse, comme l’on pourrait s’en douter, ne sera jamais publié par le journal le Monde. Aujourd’hui le monde entier découvre que le véritable chef ethnocentriste, c’est bien Monsieur Alassane Dramane OUATTARA qui a réduit la Côte d’Ivoire en une entreprise familiale où il règne en chef de tribu avec sa famille et ses amis. Là-dessus, le journal Le Monde est étrangement et curieusement muet, ceci expliquant cela.

2 - Du fiasco de la CPI à la supposée impunité de Laurent GBAGBO

A en croire Monsieur Thomas Hofnung, le fait que la cour ait déclaré Laurent GBAGBO innocent et ordonné sa libération immédiate, serait un fiasco pour la CPI ; alors justement que le monde entier l’avait déjà condamné même avant le procès. Cela voudrait, a contrario, signifier que, si Laurent GBAGBO avait été reconnu coupable et condamné, alors la CPI aurait réussi sa mission.

Mais de quoi parle-t-on, de droit, de justice ? Le chroniqueur nous conforte là encore sur la posture de son journal dont la véritable mission était donc d’assassiner Laurent GBAGBO comme les autres soldats de cette armée invisible. C’est justement cette armée de l’ombre qui a voulu instrumentaliser la CPI.

S’il y a donc fiasco, c’est bien dans les rangs de cette nébuleuse constituée de tous ceux dont le sommeil se trouve troublé par Laurent GBAGBO. Le droit devait être dit et la justice rendue, c’est le sens d’un procès. Et c’est cela qui a été fait, même si par un tour d’intrigues l’on veut retarder, contre tout bon sens, et contre toute règle de droit, le retour du Président GBAGBO sur sa terre natale et sa réhabilitation politique.

Par ailleurs, s’il y a eu, aux dires de Thomas Hofnung, 7 ans de procédures à la CPI, et un procès pour rien, ce n’est point la faute à Laurent GBAGBO, c’est tout simplement que le montage de mensonges de ses commanditaires a fondu comme neige au soleil devant la vérité des faits. Non il n’y a pas eu 7 ans de procédures pour rien, il y a 7 ans de procédures pour démontrer qu’il n’y avait rien contre Laurent GBAGBO, et cela tout à l’honneur des propres témoins de l’accusation.

Et puis que Monsieur le Chroniqueur se le tienne pour dit, il y a bel et bien des institutions qui ont autorité pour dire le vote, c’est ce qui a été fait pour la Côte d’Ivoire ; en l’occurrence c’est la Cour constitutionnelle qui dit le vote, et aucune autre institution. Il n’appartient ni à l’ONU, ni à aucune autre organisation, fût-elle la communauté dite internationale, ni à aucun autre pays, de reconnaître les résultats des votes d’un état souverain.

Pourquoi diantre ce qui fonctionne dans vos démocraties, ne le devrait pas dans les nôtres, il est temps de mettre fin à cette condescendance et à ce mépris que vous affichez dès qu’il s’agit de l’Afrique.

A propos d’impunité, Laurent GBAGBO a été reconnu innocent et acquitté, alors de quoi parlons-nous ! S’il y a impunité, c’est bien dans le camp de votre protégé OUATTARA, lui qui a reconnu être bel et bien le père de la rébellion. S’il y a eu la guerre, il y avait au moins deux belligérants, or, jusqu’à ce jour, aucune enquête n’a été initiée dans l’autre camp ; naturellement cela n’émeut nullement le chroniqueur de Le Monde Afrique, c’est tout simplement intellectuellement malhonnête.

3 - De la théorie du complot à la responsabilité de la France

C’est toujours la même rengaine, dès qu’une puissance est mise face à ses propres forfaits, la technique c’est de marginaliser celui aux ceux qui ne partagent pas sa vérité ; c’est ce que Chomsky appelle « l’art de fabriquer le consentement ». Dans cet art, « le bien commun est une notion qui échappe complètement à l’opinion publique ».

Il ne peut être compris et géré que par une classe spécialisée. C’est cette classe qui seule est à même de comprendre en quoi consiste le bien commun et savoir ce qui est important et bien pour la collectivité. Au cas où Monsieur Hofnung ne le verrait pas, c’est bien la posture dans laquelle la France se trouve vis-à-vis de ses ex-colonies (pour ne pas dire ses colonies).

C’est bien la France qui gère et « garantit la stabilité », dit-elle, du franc CFA pour perpétuer sa domination immorale sur l’économie, la politique et la vie de millions de peuples et de citoyens d’une quinzaine de pays africains. C’est bel et bien la France qui initie toute résolution onusienne concernant ces pays. N’est-ce pas la France qui a initié la résolution qui a permis l’intervention en Libye, où la même France, outrepassant le mandat onusien, s’est servie de l’OTAN et de ses barbouzes pour assassiner le Colonel Kadhafi et détruire la Libye.

C’est encore la France qui a formé la rébellion qui a défiguré la Côte d'Ivoire et qui s’est ensuite servie de l’ONU pour détruire la résidence de son Président, en tentant d’assassiner Laurent GBAGBO. Pour en convaincre le Chroniqueur, nous allons rappeler quelques extraits de courriers échangés entre Monsieur SARKOZY, Président de la République française pendant la crise en Côte d’Ivoire et certains chefs d’état et responsables africains :

Lettre adressée à Monsieur Youssouf Bakayoko, Président de la Commission Electorale Indépendante, en date du 01 décembre 2010 :

« Monsieur le Président,

A la suite de notre communication téléphonique, ainsi que le contexte particulier pour la République de Côte d’Ivoire……

Vous disposez du soutien sans faille de notre ambassadeur, du Ministère des Affaires Etrangères pour une facilitation de votre mission. ………, il est nécessaire que notre Ambassadeur soit informé de façon quasi automatique de la suite des évènements… »

Il y a également la lettre que Monsieur Sarkozy a adressée en date du 25 février 2011 au Président Jonathan Goodluck, Président en exercice de la CEDEAO, pour l’informer de la mise à sa disposition des forces françaises pour déloger Laurent GBAGBO ; ou encore la lettre adressée à Monsieur Sarkozy par Monsieur Blaise Compaoré du Burkina Faso le 25 mars 2011, lui demandant d’accélérer les choses en Côte d’Ivoire, notamment en initiant une résolution du Conseil de sécurité.

Toutes choses qui situent donc l’implication totale et entière de la France dans les évènements de la Côte d’Ivoire. Parler de « complotistes » à ce niveau de faits, c’est bien faire la preuve d’une mauvaise fois caractérisée.

Pour conclure, et pour la propre gouverne de Monsieur Thomas Hofnung, nous voulons rappeler ce que le Président Laurent GBAGBO lui-même déclarait le 05 décembre 2011 devant la chambre préliminaire 1, et je cite : « Si l’on m’accuse, c’est qu’on a des éléments de preuve pour m’accuser, donc je comparais, je vais voir ces éléments de preuve, je vais les confronter à ma vérité à moi et puis vous jugerez……. Madame, je ne regrette pas, je suis là, on ira jusqu’au bout. »

Nous y sommes, et les masques sont en train de tomber.

Prof BALOU BI
Enseignant-Chercheur
Ancien Secrétaire Général de l’Université de Cocody
Ancien Président du Réseau Africain des Secrétaires généraux des Universités Francophone

(1) Propagande, Médias et Démocratie, Editions Ecosociété, mai 2018