Maintien de Laurent Gbagbo en prison: "Quand la CPI se rend complice d'un acharnement judiciaire", Par Dagbo Raphaël

Par Ivoirebusiness/Débats et Opinions - Maintien de Laurent Gbagbo en prison "Quand la CPI se rend complice d'un acharnement judiciaire", Par Dagbo Raphaël.

Dagbo Raphaël, président de l'association des Amis de Laurent Gbagbo.

Le mardi 15 janvier dernier, la chambre de première instance qui jugeait le
Président Laurent Gbagbo et le Ministre Charles Blé Goudé a rendu sa
décision.

Celle-ci s’est résumée en ces termes : acquittement (entendre
: de toutes les charges de crimes contre l’humanité) et libération
immédiate.

Le procureur a alors déposé une requête aux fins de voir
ajoutées des conditions strictes à la libération du Président Gbagbo et
du Ministre Blé Goudé.

En somme il souhaitait voir remplacer la libération
immédiate et sans condition découlant de l'acquittement par une libération
conditionnelle, en évoquant des risques de fuite, tandis qu'il envisage de
faire appel de l'acquittement.

Comme il fallait s'y attendre, la requête du
procureur a été rejetée et il en a interjeté appel, alors même que le
Président Laurent Gbagbo et le Ministre Charles Blé Goudé assistés de
leurs avocats s’étaient engagés à se tenir à la disposition de la cour
si et quand celle-ci le jugerait utile.

Ce qui est choquant dans ce déroulé judiciaire chaotique, c’est qu'après
l'audience du 16 janvier 2019 ayant rejeté la requête du procureur, Laurent
Gbagbo et Charles Blé Goudé étaient théoriquement libres du fait de
l'absence de tout titre de détention.

Cependant, à la suite de l'appel du procureur sur ce rejet de requête, la
Chambre d’appel rendit une première décision pour maintenir en prison le
Président Gbagbo et le Ministre Blé Goudé, dans l'attente de la réunion
de tous les juges d'appel le lendemain.

Puis le 18 janvier 2019, les juges de la Chambre d'appel feront produire un
effet suspensif à la décision de rejet de la requête du procureur.

Comment la suspension des effets d'une décision rejetant la requête du procureur
peut-elle produire comme effet le placement en détention de deux personnes
acquittées et donc innocentées ?

En réalité, il ne s'agit pas d'un maintien en détention qui laisserait supposer l'existence d'un titre de
détention, mais bien d'un placement en détention décidé par la Cour. Ici la question se pose de savoir quelle finalité vise en réalité la CPI dans
cette procédure.

De toute évidence, devant le spectacle indigne de harcèlement judiciaire
qu'elle nous donne à voir, il apparaît une fois de plus que le scénario
semblait écrit d’avance.

Au terme de celui-ci, il lui fallait coûte que coûte obtenir que, bien qu'innocentés, le Président Laurent Gbagbo et le
Ministre Charles Blé Goudé ne soient pas libérés. Toutes les acrobaties
judiciaires dont les plis se déploient les uns après les autres convergent
pour habiller cette mise en scène grossière et inhumaine.

Personne ne sera assez dupe pour considérer que nous assistons au déroulement normal d’une
justice sereine.

Au lieu de cela, le scénario qui se construit sous nos yeux par ce procureur
aidé de cette chambre d’appel semble clairement être le suivant :
détenir illégalement en prison des personnes innocentes et déjà victimes
d'une période de détention préventive délirante de 8 ans.

Quelle est donc cette justice qui garde sous les chaînes de la détention des personnes
acquittées et innocentées ? Le procureur et la Chambre d'appel sont en
train de réinventer tout simplement le tonneau des Danaïdes adapté au
droit pour obtenir à tous les prix la condamnation du Président Laurent
Gbagbo et du Ministre Charles Blé Goudé pourtant acquittés.

Pourquoi la CPI refuse-t-elle de se poser cette question évidente et simple : a-t-on
les véritables responsables des crimes contre l’humanité dans le box des
accusés ?

En cela, elle transgresse sans état d'âme les droits humains de
Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. Ou alors ne les considère-t-elle pas
comme des êtres de chair et de sang ? Cela est choquant de la part d’une
cour de justice, qui plus est internationale.

Mais quelle était à l’origine la vocation de la CPI ? Rendre justice aux
victimes..., nous semble-t-il. En prononçant l’acquittement du Président
Laurent Gbagbo et du Ministre Charles Blé Goudé, la cour affirme en creux
que le procureur s’est trompé dans la désignation des accusés et surtout
dans l’instruction de ce dossier, commettant une faute dont les
conséquences furent terribles pour Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé,
leurs familles respectives, leurs amis, leur vie, mais aussi pour leur pays,
la Côte d’Ivoire.

Au lieu d’allonger artificiellement à l’infini une
procédure sur laquelle cette même cour a dû officiellement et publiquement
se prononcer, le plus raisonnable est de libérer purement et simplement ceux
qui viennent d’être acquittés.

Cet acharnement judiciaire choquant à
tous égards auquel la CPI commence à se livrer pour tenter de satisfaire un
procureur qui erre est tellement indécent qu’il risque fort de transformer
le chagrin des Ivoiriens, des Africains et de tous ceux qui croient en la
justice en une fureur aux conséquences incalculables.

La Côte d’Ivoire attend la paix. Elle veut se réconcilier avec
elle-même. C’est pourquoi elle reste calme face à ce chaos judiciaire.
C’était en effet déjà une provocation de déporter le Président Laurent
Gbagbo à la Haye au mépris du respect des procédures juridiques en la
matière.

C’était aussi une provocation de confirmer des charges
fabriquées sur la base de coupures de journaux partisans, de témoignages
mensongers et de reportages montés artificiellement avec des mises en scène
aussi puériles qu’affligeantes…

Il est évident que le Président Laurent Gbagbo et le Ministre Charles Blé
Goudé seront incontestablement des acteurs décisifs dans cette Côte
d’Ivoire apaisée que nous appelons de nos vœux et à laquelle tout le
monde a intérêt.

Leur libération immédiate et sans condition qui est la
suite logique de leur acquittement correspond simplement à la vérité des
faits. Il faut donc les libérer hic et nunc.

Une contribution de Raphaël DAGBO
Président de l’Association des Amis de Laurent Gbagbo.