Politique ivoirienne: Yao N’Dré couronne le coup d’Etat militaire par un coup d’Etat constitutionnel

Le 06 mai 2011 par IvoireBusiness - "Les normes et dispositions internationales acceptées par les organes nationaux compétents ont une autorité supérieure à celle des lois et aux décisions

Paul Yao N'dré, président du Conseil constitutionnel.

Le 06 mai 2011 par IvoireBusiness - "Les normes et dispositions internationales acceptées par les organes nationaux compétents ont une autorité supérieure à celle des lois et aux décisions

juridictionnelles internes sous réserve de leur application par l`autre partie". C'est en ces termes que M. Yao N'Dré Paul a tenté de justifier le coup d'Etat constitutionnel qu'il a opéré ce 5 mai 2011, en s'appuyant sur la décision de l'Union Africaine. Ce discours est-il réellement conforme aux convictions juridiques, intellectuelles et éthiques du Président du Conseil constitutionnel et des membres de cette institution? S'est-il adressé à des ignorants qui pourront gober ce gros et scandaleux mensonge? Ne sait mieux tordre le coup à la loi que celui qui la connaît mieux. C'est bien ce qu'à fait le Président du Conseil constitutionnel. Pour le comprendre, analysons l'article 87 de la Constitution ivoirienne. Cet article stipule: «Les Traités ou Accords (sous-entendus exclusivement internationaux) régulièrement ratifiés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque Traité ou Accord, de son application par l'autre partie." Pour qu'un Traité ou un accord ait une autorité supérieure à celle des lois ivoiriennes, il doit remplir deux conditions essentielles: primo, il doit être ratifié, secondo, il doit être appliqué par l'autre partie. A ce niveau, il convient de clarifier les choses en répondant à deux questions fondamentales. La décision de l'Union africaine a-t-elle fait l'objet d'Accord? Si oui cet Accord a-t-il été ratifié ou constitutionnellement approuvé?
La décision du Conseil de paix et de Sécurité de l'Union africaine, émanant de sa 265ème réunion tenue le 10 mars 2011, n'a ni dans sa forme ni dans son fond les caractères d'un Accord ou d'un Traité, pour la simple raison que l'Etat ivoirien n'a, selon les dispositions constitutionnelles, ni négocié ni apposé sa signature sur cette décision. Dans l'hypothèse que cette décision fut l'objet d'un accord, elle faisait droit à l'impératif d'une révision constitutionnelle avant sa ratification. Selon l'article 86 de la Constitution, la révision constitutionnelle est un impératif quand le Traité ou l'Accord devant être appliqué comporte une clause contraire à la Constitution. Dans cette même hypothèse, il aurait fallu réviser l'article 98 de la Constitution ivoirienne, selon lequel " Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics, à toutes autorité administrative, juridictionnelle, militaire et à toute personne physique ou morale." Cette révision de la Constitution s'imposait dans la mesure où la proclamation d'Alassane Dramane Ouattara comme Président des ivoiriens par le Conseil constitutionnel est une violation manifeste, scandaleuse, voire ridicule de l'article 98 de la Constitution ivoirienne. Dans tous les cas, la justification fallacieuse de cette deuxième proclamation d'un autre Président de la République par le Conseil constitutionnel, ne saurait prospérer dans l'entendement des observateurs avertis de la situation politique ivoirienne. L'on dira peut-être que la Côte-d'Ivoire a ratifié l'Acte constitutif de l'Union africaine, ce qui a pour conséquence le fait que les décisions de celle-ci s'imposent à elle. Cet argument n'est en réalité que pur sophisme. Car en ratifiant l'Acte constitutif de l'Union africaine pour en être membre, l'Etat de Côte-d'Ivoire a adhéré à ses objectifs formulés en son article 3, notamment celui qui consiste à "défendre la souveraineté, l'intégrité territoriale et l'indépendance de ses Etats membres". Cette défense de la Souveraineté et de l'indépendance ne peut que reposer sur le strict respect de la Constitution de chaque Etat membre et sur la coexistence pacifique des Etats membre de L'Union africaine. Par ailleurs, aucun règlement de L'Union africaine ne prévoit de décision contraignante à l'endroit d'un Etat souverain membre. Ce qui est dit ici de l'Union africaine vaut également pour l'ONU, même si cette dernière, dans le contexte de la crise ivoirienne, a la pratique fâcheuse et révoltante de se manifester comme une Organisation supranationale.

ZEKA TOGUI, copaci_infomail