Le secrétaire général de l’Oif à Abidjan : Les dessous de la visite d’Abdou Diouf

Publié le mercredi 3 août 2011 | Notre Voie - Le secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie (Oif), l’ex-Président sénégalais, Abdou Diouf, effectue à partir

Abdou Diouf, secrétaire général de l'OIF.

Publié le mercredi 3 août 2011 | Notre Voie - Le secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie (Oif), l’ex-Président sénégalais, Abdou Diouf, effectue à partir

d’aujourd’hui, mercredi 3 juillet à demain, jeudi 4 juillet 2011, une visite de travail en Côte d’Ivoire. Selon le communiqué de l’Oif, M. Abdou Diouf rencontrera demain, le nouveau chef de l’Etat ivoirien, Alassane Dramane Ouattara. « Il s’entretiendra également avec le Premier ministre et ministre de la défense, Guillaume Soro, avec le président de la Commission dialogue, vérité et réconciliation, Charles Konan Banny, ainsi qu’avec le ministre de la Culture et de la Francophonie, Maurice Bandaman. Abdou Diouf recevra également le Représentant spécial du secrétaire général de l’Onu en Côte d’Ivoire, Young Jin-Choi, et le Représentant spécial du facilitateur et Président du Burkina Faso, Boureima Badini. Le secrétaire général profitera de son séjour pour réitérer aux autorités, la disponibilité de l’Organisation internationale de la Francophonie (Oif) à accompagner, conformément aux dispositions de la Déclaration de Bamako, la Côte d’Ivoire en vue de contribuer à l’instauration d’une démocratie et d’une paix durables, soutenues par des institutions fortes et respectueuses des droits et des libertés », précise le communiqué.
Selon des sources diplomatiques concordantes, cette visite de M. Abdou Diouf vise, en réalité, à tâter le terrain et prendre contact avec les nouvelles autorités ivoiriennes. Puisque le secrétaire général de l’Oif envisage de s’impliquer dans la réconciliation des Ivoiriens. En clair, il voudrait être l’un des acteurs de ce processus. Il aurait pour cela obtenu l’accord de la France. Au-delà de la justesse des intentions de M. Diouf, la question qu’on pourrait se poser est celle de savoir si le secrétaire général de l’Oif constitue un acteur crédible pour réconcilier les Ivoiriens. En effet, le patron de l’Oif a, depuis septembre 2002, début de la crise en Côte d’Ivoire, adopté une posture partisane qui le décrédibilise aujourd’hui pour jouer les réconciliateurs.
La Déclaration de Bamako
Le communiqué de l’Oif évoque la Déclaration de Bamako (Mali) comme fondement de l’action présente d’Abdou Diouf. Pourquoi est-ce maintenant que l’Oif trouve nécessaire de respecter la Déclaration de Bamako ? Faite en novembre 2000, la Déclaration de Bamako fut l’aboutissement du symposium international sur le thème : « Bilan des pratiques de la démocratie, des droits de l’homme et des libertés dans l’espace francophone ». Ce symposium s’est tenu du 1er et 3 novembre 2000. La Déclaration de Bamako réaffirme l’attachement des pays francophones aux valeurs démocratiques et vise à garantir leur respect. Les Etats signataires de cette déclaration ont témoigné, par leurs paraphes respectifs, de leur engagement pour la consolidation d’un Etat de droit, la tenue d’élections libres, fiables et transparentes, une vie politique apaisée, la promotion d’une culture démocratique intériorisée, le respect des droits humains et l’égalité devant la loi des hommes et des femmes. Cette déclaration endossée par tout l’espace francophone a été remise aux chefs d’Etat et de gouvernement lors du 9ème sommet de la Francophonie à Beyrouth (Liban), du 18 au 20 octobre 2002. Lorsque le régime Gbagbo a essuyé une tentative de coup d’Etat qui s’est mué en rébellion armée, en septembre 2002, ni l’Oif ni son secrétaire général n’ont condamné, conformément à la Déclaration de Bamako, cette grave entrave à la démocratie. Bien au contraire, l’Oif a quasiment adoubé les auteurs de la rébellion armée comme des acteurs normaux de la vie politique ivoirienne. Donnant ainsi la nette impression que le coup d’Etat et la rébellion armée sont des phénomènes acceptables. Le Représentant du secrétaire général de l’Oif dans les négociations entre le pouvoir Gbagbo et la rébellion armée, M. Lassana Kouyaté, n’a jamais posé le désarmement des rebelles comme un élément clé de la normalisation de vie politique en Côte d’Ivoire. On se souvient qu’en 2004, Abdou Diouf avait soutenu sur la radio française Rfi, parlant du retour de la paix en Côte d’Ivoire, qu’il suffit que « le Président Laurent Gbagbo permette à M. Alassane Ouattara d’être candidat à l’élection présidentielle et nous nous mobiliserons avec toute la communauté internationale pour obtenir le désarmement des rebelles ». Quelque temps plus tard, le Président Laurent Gbagbo a pris l’article 48 de la Constitution ivoirienne pour permettre à M. Ouattara d’être candidat. Mais l’Oif ne s’est pas mobilisée avec la communauté internationale pour obtenir le désarmement des rebelles. L’Oif n’a jamais fait du désarmement des rebelles, une préoccupation. Même avant la tenue de l’élection présidentielle en 2010.
Alors qu’elle n’ignore pas que le scrutin de novembre 2010 s’est déroulé dans des conditions en violation flagrante avec la Déclaration de Bamako, l’Oif a été l’une des premières structures internationales à reconnaître, les fameux résultats proclamés par Youssouf Bakayoko, président de la Cei, au quartier général du candidat Ouattara. Alors que le processus de proclamation officiel des résultats n’était pas arrivé à son terme. En tant que structure attachée au droit, l’Oif aurait dû faire attention à tout cela avant de prendre position.
Pourtant, Abdou Diouf a affiché tout au long de la crise, une partialité évidente. Ce qui n’en fait pas un acteur crédible pour conduire les camps Gbagbo et Ouattara à la réconciliation. Les deux camps ont leur part de responsabilité dans la crise. Il faut donc un acteur indépendant et impartial, pour conduire le processus de réconciliation en Côte d’Ivoire. Un tel acteur peut être trouvé en Afrique, en Europe, en Afrique ou en Asie.

Didier Depry
didierdepri@yahoo.fr