Le RDR bloque le Starten pendant deux jours pour distribuer des permis de conduire à ses miliciens

« Ils ont fini de nous tuer et c’est comme ça qu’ils récompensent leurs miliciens avec des permis de conduire ».

« Ils ont fini de nous tuer et c’est comme ça qu’ils récompensent leurs miliciens avec des permis de conduire ».

Dure journée que celle vécue par les agents de la Starten ; société chargée de la visite médicale pour la délivrance du permis de conduire, les mardi et mercredi derniers.
En effet, le mardi 11 janvier dernier, nous nous sommes rendus au siège de ladite société sise aux II plateaux, sur coup de fil anonyme. Notre interlocuteur nous a fait part d’une descente musclée des militants du Rdr dans les locaux de cette structure.
Sans plus attendre, nous nous rendons sur les lieux. Il est 13h32 mn, grande fût notre surprise de voir le monde qui s’y trouve. Nous nous renseignons sur la présence de toutes ces personnes, il en ressort que tous sont là pour la visite médicale pour le permis de conduire.
Tout suite, nous remarquons que quelque chose s’était passée dans les heures qui ont précédé notre arrivée à entendre les propos qui fusèrent ça et là. Nous approchons certains petits groupes qui s’étaient formés pour en savoir davantage. Il n’a pas fallu longtemps pour être situé sur l’objet de cette tension qui régnait au siège de la Starten.
Les badauds du Rdr étaient passés par là. Selon les informations recueillies, une trentaine de militants du Rdr est arrivée au siège de l’entreprise aux alentours de 08h30 et sans perdre de temps, ces militants ont voulu traverser tous les candidats présents pour atteindre l’enceinte de la structure. Ce que ces derniers ont refusé bien évidemment puisqu’ils ont veillé sur les lieux pour certains depuis deux jours, pour d’autres depuis trois jours. Alors nos camarades « républicains » qui n’ont pas voulu l’entendre de cette oreille, ont décidé un passage en force. Après plusieurs heures d’altercation, ceux-ci parviennent à rentrer.
Un jeune homme la trentaine environ nous expliquait que ce qui a soulevé le courroux des personnes présentes c’est lorsque l’un des responsables de la Starten croyait bien dire en annonçant que ces candidats venaient au nom de la direction du Rdr. Il n’en fallait pas plus pour déchaîner la colère des autres candidats. Il s’en est suivi plus de deux heures d’échauffourées selon ce dernier, puisque tout le monde voulait avoir accès aussi à l’enceinte de cette structure.
Pour en avoir le cœur net, nous décidons d’entrer nous aussi. Après plusieurs tentatives infructueuses, nous réussîmes à rentrer avec la complicité d’un policier à qui nous avons expliqué le but de notre présence sur les lieux. Ce dernier semblait nous soutenir dans notre démarche de dénoncer les agissements de ces voyous.
Une fois à l’intérieur, nous nous dirigeons vers la salle censée accueillir les candidats pour la visite sans grand effort à cause du cafouillage qui y régnait. Sur une table, devant une jeune dame, nous voyons une chemise à rabat rouge sur la laquelle il est écrit Rdr. Devant une autre dame dans le fond de la salle, une autre chemise bleue avec la même inscription. Je dévisage bien les gens pour voir qui peut me donner des informations sans grande difficulté et sans me dévoiler. Je repère trois jeunes qui ne cessaient de rouspéter depuis un moment. Je feins de vouloir passer moi aussi la visite. Alors, je grogne comme eux : « Depuis là rien n’avance ils font quoi même dedans. » L’un des trois, le plus grand en taille me répond : « Grand frère nous, nous sommes là depuis 04h du matin, on nous dit que le collectif Rdr doit passer d’abord. » et un autre d’ajouter : « Avec ça ils se plaignaient que les autres étaient corrompus or eux-mêmes sont pires ». Un sexagénaire qui était dans notre dos et qui suivait la causerie s’approcha de nous et lança : « Ils ont fini de nous tuer et c’est comme ça qu’ils récompensent leurs miliciens ; avec des permis de conduire ».
Je pose la question de savoir ce qu’en pensaient les policiers sur place. Le plus grand des trois jeunes nous répond que les policiers ne sont pas contents car il y a l’un d’entre eux qui était fâché et qui a lancé : « Ce n’est pas Rdr qui nous a envoyé ici. Ils savent tricher non ! Ils n’ont qu’à tricher l’examen de la visite médicale aussi et puis c’est fini. »
Nous sommes restés sur les lieux jusqu’à 17h35mn avant de nous retirer pour remettre cela au lendemain.
Mercredi 12 janvier 2012, il est 06h42mn quand nous arrivions au siège de la Starten avec un nouvel accoutrement. Veste, cravate, soulier, dans le but d’impressionner. Nous prenons attache avec notre complice d’hier, le policier. Après les salutations d’usage, nous prenons les nouvelles. Notre interlocuteur nous signale la présence des « républicains ». Ils sont venus très tôt accompagnés de loubards, de Frci et de dozos. Nous entrons sans peine toujours avec l’aide de notre compagnon. A l’intérieur, je me dirige tout droit vers le groupe des hooligans du Rdr reconnaissable à leur accoutrement d’apprentis gbaka (chaussures plastiques, sac en bandoulières, T-shirt à l’effigie de leur mentor etc.). Je retranscris la conversation que j’ai eue avec l’un d’entre eux qui se faisait passer pour le responsable du groupe. Il portait un T-shirt à l’effigie d’Alassane Dramane Ouattara, un képi blanc, une paire de chaussure noire et un collier de rasta.
Je pose la question au groupe (plus de vingt personnes) : « Bonjour messieurs, vous obstruez le passage. Qu’est-ce qu’on peut faire pour vous ? »
Le soi disant responsable s’empresse de répondre : « Bonjour chef, c’est le collectif Rdr, nous sommes là au nom du président Yayoro pour la visite pour le permis de conduire. »
- Est-ce qu’on vous a reçu ? Vous êtes combien de personnes ?
- Nous sommes trente. Mais il y a vingt personnes qui sont là. Les autres arrivent. Hier au moins 30 trente autres sont passés, et c’est à notre tour. Bon, il y a un monsieur qui nous a dit d’attendre qu’ils vont nous recevoir.
- Ok. Restez calmes vous allez passer. Mais, vous avez semé la pagaille dehors. Ce n’est pas comme cela qu’on fait. Quand vous venez, designer une personne pour croiser les responsables ainsi tout se passe facilement.
- Excusez chef. Mais chef, on a un problème. Il y a certains qui n’ont pas de pièces alors qu’on exige la pièce d’identité.
- Bien sûr, vous ne le saviez pas ?
- Si. Mais le président Yayoro nous a dit de venir et que sur place cela va s’arranger.
- Même pas un extrait d’acte de naissance ou un jugement supplétif ?
- Non chef.
(M’adressant un jeune à ma droite) : « Toi, tu as voté non ? »
Celui-ci : Oui chef
- Donc avec quoi tu as fait ta carte d’électeur ?
Apeuré, le visage hagard, il ne sait que répondre.
- La visite n’est qu’une étape donc comportez vous bien.
- Oui chef répond le responsable et d’ajouter : « Pour le reste tonton Gaoussou (le ministre des Transports) va gérer ça.
Je les rassure.
- N’ayez pas peur nous sommes ensemble. Dites au président Yayoro que son ami Silué
Namogo le salue. Un peu détendu, notre responsable de reprendre
- Merci chef. (Il dira tout le reste en senoufo)
De peur de me faire prendre, je souris et me précipite vers la sortie.
Je remercie mon complice policier et je prends congé de lui.
Après avoir fait massacré les ivoiriens par ses miliciens, c’est ainsi le Rdr les récompense.

Charles Tiekpo
tiekpocharles@yahoo.fr