Coup de tonnerre à la CPI : Me Altit demande à la CPI d’ordonner au gouvernement ivoirien le retour de Gbagbo

Par Ivoirebusiness - Coup de tonnerre à la CPI. Me Altit demande à la CPI d’ordonner au gouvernement ivoirien le retour de Gbagbo.

Me Emmanuel Altit, conseil principal du président Laurent Gbagbo. Image d'archives.

Me Emmanuel Altit, avocat principal du président Laurent Gbagbo, a interpellé le 17 septembre 2020 la cour pénale internationale dans une requête musclée sur le droit au retour de son client en Côte d’Ivoire, a appris un journaliste d’Ivoirebusiness.

Il a demandé à la CPI d’ ordonner au gouvernement ivoirien le retour du président Laurent Gbagbo dans son pays.

Il a plaidé que « Compte-tenu de l’urgence, la cour doit:
- Ordonner aux Autorités ivoiriennes qu’elles respectent les dispositions de droit international et de droit national qui consacrent le droit d’un citoyen ivoirien à pouvoir rentrer chez lui quand il le souhaite ;
- Ordonner que les Autorités ivoiriennes satisfassent à leur obligation de coopérer avec la Cour et, dans le cadre de cette obligation, qu’elles répondent de manière précise et complète aux questions qui leur étaient posées dans la Note Verbale du 10 juin 2020 ».

Ci-dessous les extraits de sa requête à la CPI.

« Requête aux fins d’obtenir des Autorités ivoiriennes des réponses quant au retour de Laurent Gbagbo dans son pays

29. Aujourd’hui, sept semaines après l’envoi de la Note Verbale du 10 juin 2020, les Autorités Ivoiriennes ne se sont, à la connaissance de la Défense de Laurent Gbagbo, pas manifestées. Elles n’ont répondu ni à la Note Verbale, ni aux relances que le service de coopération de la Cour a indiqué à la Défense effectuer.

30. Pis, les Autorités Ivoiriennes ont, par la voix du porte-parole du Gouvernement, affirmé n’avoir rien reçu de la Cour . Une telle attitude donne à penser à l’opinion publique internationale et à l’opinion ivoirienne que la Cour n’est pas entrée en contact avec les Autorités ivoiriennes contrairement à ce qu’annonçait la Cour elle-même : « Du côté de la CPI, on confirme que cette requête a bien été adressée et transmise aux autorités ivoiriennes.

Une autre source précise que la demande a été transmise le 10 juin, depuis trois semaines, mais que jusqu’ici les autorités ivoiriennes n’ont ni confirmé ni accusé réception de la demande » .
31. De plus, en ne répondant pas à la Note Verbale envoyée par le Greffe de la Cour, et en faisant mine de ne pas l’avoir reçue, la Côte d’Ivoire contrevient à ses obligations en tant qu’Etat-Partie de coopérer pleinement avec la Cour28. Cette obligation, d’ordre général, s’applique à toutes les demandes émanant de la Cour, telles que celles qui sont listées dans la Note Verbale du 10 juin 2020.

32. Par ailleurs, Laurent Gbagbo n’a toujours pas reçu de passeport, malgré les démarches qu’il a effectuées.

33. Laurent Gbagbo, citoyen ivoirien a le droit de retourner chez lui en Côte d’Ivoire.

34. Ne pas répondre, comme le font les Autorités Ivoiriennes, ni à la Cour, ni à Laurent Gbagbo, revient à lui interdire de rentrer chez lui. Laurent Gbagbo est un citoyen ivoirien qui ne peut se voir refuser le droit de retourner dans son pays. C’est en Côte d’Ivoire que Laurent Gbagbo, acquitté, pourra pleinement jouir de tous ses droits d’homme et de citoyen et participer à la vie publique de son pays.

35. Il convient de rappeler que si les Autorités Ivoiriennes devaient s’opposer au retour de Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire, ou ne prenaient pas les mesures nécessaires pour permettre ce retour, elles contreviendraient à leurs obligations tant en droit international qu’en droit national.

36. En droit international, l’article 12(4) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques prévoit que : « Nul ne peut être arbitrairement privé du droit d’entrer dans son propre pays ». L'article 13(2) de la Déclaration universelle des droits de l'homme énonce : « Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays ». Ce principe est consacré au niveau Européen, puisque l’article 3(2) du Protocole n° 4 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prévoit que : « nul ne peut être privé du droit d’entrer sur le territoire de l’Etat dont il est le ressortissant ».

37. En droit ivoirien, l’article 21 de la Constitution prévoit que : « Tout citoyen ivoirien a le droit de quitter librement son pays et d’y revenir » . Cet article précise que « L’exercice de ce droit ne peut être limité que par la loi ». Par conséquent, la capacité de Laurent Gbagbo à exercer son droit constitutionnel de rentrer en Côte d’Ivoire ne peut dépendre d’une décision discrétionnaire de la part des Autorités ivoiriennes, en l’absence de dispositions législatives limitant ce droit, qui, à la connaissance de la Défense, n’existent pas.

38. Dans ces conditions, il convient que la Chambre exige des Autorités ivoiriennes 1) qu’elles respectent les dispositions de droit international et de droit national auxquelles elles sont soumises, 2) qu’elles satisfassent à leur obligation de coopérer avec la Cour et que, pour ce faire, elles répondent de manière précise et complète aux questions posées dans la Note Verbale du 10 juin 2020, à savoir :

PAR CES MOTIFS, PLAISE À LA CHAMBRE D’APPEL, DE :

Compte-tenu de l’urgence,

- Ordonner aux Autorités ivoiriennes qu’elles respectent les dispositions de droit international et de droit national qui consacrent le droit d’un citoyen ivoirien à pouvoir rentrer chez lui quand il le souhaite ;
- Ordonner que les Autorités ivoiriennes satisfassent à leur obligation de coopérer avec la Cour et, dans le cadre de cette obligation, qu’elles répondent de manière précise et complète aux questions qui leur étaient posées dans la Note Verbale du 10 juin 2020, à savoir :

Emmanuel Altit

Conseil Principal de Laurent Gbagbo

Fait le 17 septembre 2020 à La Haye, Pays-Bas"