Côte d’Ivoire: Qu’attendre du show Ouattara-Gbagbo du 27 juillet ?

Par Lhorizoninfo.net - Côte d’Ivoire. Qu’attendre du show Ouattara-Gbagbo du 27 juillet ?

Le Président Laurent Gbagbo et son rival Alassane Ouattara, lors d'une rencontre au sommet. Image d'archives.

Un show est un anglicisme qui désigne un « spectacle de variétés centré sur une vedette » ou une « prestation …d’une personnalité ». Ce qui va se passer le 27 juillet 2021 au Palais présidentiel d’Abidjan, entre l’actuel chef de l’Etat Alassane Ouattara et l’ancien président de la République acquitté de la CPI après dix ans de prison, Laurent Gbagbo, n’est rien d’autre qu’un show.

Un spectacle de haute audience qui met déjà en transe avant même son amorce, les fans, les partisans des deux hommes. Parce qu’il ne s’agit pas ici d’une vedette ou d’une personnalité, mais de deux autorités dont les moindres gestes déclenchent des passions, au point même que les méchantes langues parlent d’Ado-moutons ou de Gbagbo-moutons. En fait, il n’y pas que ceux-là qui soient intéressés par le sujet, mais toute nation.

C’est pourquoi au-delà des symboles et des sourires protocolaires pour l’affichage diplomatique, que faut-il attendre d’un tel show, dans un pays en lambeau, après tant d’années de plongée ? Un pays dont les dirigeants ne font pourtant que s’autocélébrer…

Il faut d’abord se rappeler que c’est une prise de contact après dix longues années. Et des années au cours desquelles chacun n’est pas allé en vacances ou en tourisme après une belle parie amicale. Et l’adage dit pour avoir le plaisir de se retrouver, il faut savoir se quitter.

Or, le moins qu’on puisse affirmer, c’est qu’en avril 2011, Ouattara et Gbagbo n’ont pas su se quitter. Le premier, à la Présidence, déporte le second à la prison de la CPI, à La Haye, avec le sentiment “d’adieu ». Il s’est donc passé des choses difficiles entre les deux.

Maintenant qu’ils doivent se revoir à cause de la Côte d’Ivoire, il va falloir jauger la psychologie, la disposition d’esprit de l’autre. C’est donc en fonction de la nature du terrain (sablonneux, marécageux, rocailleux, troué, etc.) que l’un ou l’autre peut avancer ses pions.

En ce qui concerne Laurent Gbagbo, si les exilés, pour les plus en vue, sont rentrés, il a tout à négocier auprès du tenant du pouvoir. Voulons-nous aller vraiment à la réconciliation ? Plusieurs civils et militaires arrêtés dans le cadre de la crise de 2010-2011 croupissent encore en prison après dix années.

Si lui, Laurent Gbagbo, alors chef suprême des Armées au moment des batailles en 2011, et qui répondait en leur nom, a été innocenté et acquitté, il faut comprendre la nécessité de libérer ces personnes. Militaires et civils. Mais il y a aussi le cas des autres prisonniers politiques, arrêtés dans le cadre de la lutte démocratique dont Koua Justin, SGA du FPI de Gbagbo.

Gbagbo de retour va engager davantage son parti dans les batailles électorales. Mais pour cela, il faut que le jeu électoral inspire confiance. Et tout cela ne peut être obtenu pour l’instant que du chef de l’Etat Alassane Ouattara.

Concernant la cherté de la vie et les questions de l’Ecole, Laurent Gbagbo pourra-t-il les aborder toutes ce 27 juillet ? Aura-t-il un mot sur la souffrance de la Constitution de son pays ? Et la justice qui sert de « gourdin » à certains citoyens pour fragiliser la démocratie des partis politiques ? Obtiendra-t-il son impartialité du chef de la Magistrature suprême ?

Tout est possible, mais rien n’est sûr. Seulement, les deux hommes vont se parler, faire leur show. Et il ne faut pas s’attendre à ce qu’ils rapportent à la presse totalement tout ce qu’ils se sont dit entre quatre murs. Ce sont deux hommes d’Etat, et selon l’art de gouverner, il n’est pas bon que le peuple sache tout, tout. Mais l’essentiel.

Ouattara est dans la peau de celui qui a envoyé en prison un chef de l’Etat en exercice et que celui-ci en est revenu acquitté, auréolé de gloire, après dix ans de souffrance. Comment va-t-il se sentir en face de Gbagbo ? Coupable au fond de lui-même ?Un peu gêné ? Ou alors toujours persuadé d’avoir raison ? Plutôt déchiré par des regrets de n’avoir pas pu agir autrement ce 11 avril 2011 ? Avec un esprit de réconciliation ou bien un nouveau complot pour coûte que coûte écarter Gbagbo ? L’avenir nous situera.

Le 27 juillet 2021, donc, Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara feront leur show, à guichets fermés. Les partisans sont déjà émus. Qu’attendre de ce show ? Pourvu que le peuple n’en tire pas pour seule gloriole, leurs sourires et leur poignée de mains, comme celle du président américain d’alors Donald Trump et du leader nord-coréen Kim Jong Un, le 30 juin 2019.

Germain Séhoué