Côte d'Ivoire: Les défis qui attendent le candidat Ouattara à Bondoukou, en pays Koulango, Par Kouakou Dapa Donacien

Par Ivoirebusiness/ Débats et Opinions - Côte d'Ivoire. Les défis qui attendent le candidat Ouattara à Bondoukou, en pays Koulango, Par Kouakou Dapa Donacien.

Le Roi des Koulango de Bondoukou, Dagbolo Saye 1er. Image d'archives.

Excellence Monsieur le Président de la République

Au moment où vous êtes attendus à Bondoukou, ce mardi 20 octobre sauf changement de calendrier, je voudrais vous remercier pour le décaissement, depuis belle lurette, de l'argent destiné à la purge des droits coutumiers grevant le site de la probable construction d'une éventuelle université promise lors des campagnes électorales présidentielles successives de 2010 et 2015.Quand à la gestion de ce pactol, mystère... Bien sûr que le non commencement des travaux de construction n'est pas lié à l'utilisation opaque de cet argent. La tentation serait grande alors de dire qu'on peut l'ignorer. Soit.

Or, en accord avec Arnold Glasow,nous sommes tenus de reconnaître que "l’un des tests du leadership est la capacité à reconnaître un problème avant qu'il ne devienne une urgence". Autrement dit, un problème n'a jamais cessé d'exister parce que quelqu'un a décidé de l'ignorer.

Et c'est suivant ce principe que je voudrais attirer votre attention sur un sujet qui risque de devenir la pomme de discorde dans la région, si l'Administration ivoirienne continue de frustrer une population forte de plus 3/4 du poids électoral de la région du Gontougo (nom originel de Bondoukou en Koulango à sa création). C'est tout vous dire...

Monsieur le Président, il se trouve qu'en dépit du fait que, les Koulango de Bondoukou,à l'origine, précurseurs de la notion de royauté dans l'actuelle Côte d'Ivoire et de l'actuel Ghana (cf les archives pertinentes accessibles également par le moteur révolutionnaire de recherches google), ne sont point représentés à la Chambre Nationale des Rois et Chefs Traditionnels de Côte d'Ivoire ! Un scandale qui ne vous est certainement pas parvenu.

En effet, le royaume de Kimpu avec pour capitale Saye (occupée partiellement par l'actuelle réserve de la Comoé ou parc de Bouna) est le premier royaume, reconnu, unanimement,par les historiens, anthropologues et sociologues sérieux, non seulement venus des métropoles britanniques et françaises envoyés en espionnage avant la traite des esclaves,mais aussi par les chercheurs Ghanéens et Ivoiriens des plus sérieux.

Dépeuplé par vagues successives vers le sud, ce sont les transfuges de ce royaume Koulango de Saye qui vont créer plus de 80% des villages actuels du Gontougo dont Bondoukou (c'est vérifiable). Une autre vague va migrer après l'invasion Mandé Dyula de 1470 pour fonder le premier Etat traditionnel au Ghana: Adansi et introniser en 1480 un roi portant le titre Koulango de Dabo sur une terre estimée fertile d'où l'appellation de ce clan "Clan Akyerekyere/Akorekyere" entendement par ces expressions Koulango "Sakerekyere/Sokorekyere" pour ainsi dire: cette terre est fertile. C'est de notoriété que les intellectuels ghanéens se plaisent à rappeler que le premier Etat traditionnel au Ghana qui a servi d'expansion aux tributs Akan part du Clan Akorekyere. Par honnêteté, ils ne manquent pas de préciser que c'est du nord-est de l'actuel Cote d'Ivoire qui est le lieu de provenance du clan Akorekyere ou Akyrekyre.

Quant au sous groupe Koulango, constitutés par les Wolomo/Wulomo dont la tradition raconte qu'elle est partie sur une terre inconnue, l'historiographie les a pistés, puis retrouvés à Accra: ce sont les Ga-Nkran fondateurs de l'Etat traditionnel d'Accra en 1510 après avoir fondé Kpalgon autour de 1480. Non seulement ils sont friands de fétichisme dont les prêtres sont les Wolomo, mais aussi l'ordre disciplinaire dans leur royaume est basé sur un principe cardinal Koulango: " Mangô ta mangô'n". (Cf Manko ta manko'n" dans les archives et l'encyclopédia britannica".

Comment les détracteurs peuvent donc insinuer que les Koulango n'auraient pas une tradition de royauté ?

Monsieur le Président de la République, imprégné de ces pré requis, le flair d'historien de votre prédécesseur, le Président Laurent Gbagbo ne s'est point laissé divertir par ceux qui, pour des motivations subjectives ont tenté de lui cacher la vérité.C'est pourquoi, il n'a point hésité à donner de la considération au peuple Koulango du Gontougo en composant avec leur roi intronisé des années bien avant son avènement au pouvoir d'Etat. Des mauvaises bouches vous diront que c'est le président Gbagbo qui l'auraient intronisé.Jamais. Il l'a trouvé intronisé par le peuple Koulango du Gontougo et la participation active du Chef du village mythique de Saye.

Je ne sais pas si le président Gbagbo en a tiré des dividendes politiques dans la région ou pas. A vous d'en juger sans perdre de vue que le peuple Koulango fondateur est celui qui a accueilli sur ses terres tous les peuples y compris les Abron.

L'Etat étant une continuité et conformément à la loi n° 2014-428 14 juillet 2014 portant Statut des rois et chefs traditionnels de Côte d’Ivoire
( dont vous êtes l'initiateur), vous n'aurez pas violé la loi en reconnaissant, comme votre prédécesseur , l'existence du roi du peuple Koulango du Gontougo, désigné suivant les us et coutumes Koulango comme le prévoient les dispositions pertinentes de la l’article 3 de ladite loi.
En effet aux termes de l'article 3 : « Les rois, les chefs de province, les chefs de canton, les chefs de tribu et les chefs de village sont désignés suivant les us et coutumes dont ils relèvent. Ils exercent leur autorité sur au moins un village ».
Je ne le dis pas à cause des dons en matériels et numéraires que vous ferez à un clan de chefs traditionnels triés sur le volet lors de ce voyage dans le Gontougo.

Je ne le dis pas non plus parce que c'est Sa Majesté Dagbolo Saye 1er, Roi du peuple Koulango du Gontougo.Nous défendons un principe et rien d'autre.

Je le dis afin que personne ne vous trompe comme ç'a été le cas du Président Bédié et Guéi Robert à qui on avait masqué la vérité historique.

Ce royaume n'est pas à confondre avec le royaume de Bounkani. Le royaume de Kumbu (déformation de Kimpu) doit son nom au rocher Kimpu lieu de sécurisation du trône dans une grotte qui existe jusqu'aujourd'hui à Saye à moins de 2km du village Saye.Les gardiens de la tradition Koulango n'ont jamais accepté ni voulu que ce secret soit rendu public par crainte de pillage et de vol de leur trésor: le trône d'or massif.
Et lorsque ces réalités exagérément cachées commencent à jouer contre les intérêts vitaux voir contre la survie des Koulango, nous n'avons d'autre choix que de dire ce qui est.
Cela dit, un pasteur baptiste qui a tenté de violer la montagne rocheuse Kimpu/Kumbu éminemment sacré en outrepassant l'interdiction d'accès en a eu pour son compte. Jusqu'à ce jour, il ne peut raconter sa mésaventure qui a failli lui coûter la vie.

Les Koulango ne revendiquent rien d'autre que le bénéfice du principe du SANKOFA (retour aux sources ) et le principe d'autodétermination qu'a tout peuple de se diriger par lui-même dans le strict respect de la primauté des lois de la république.
Une aspiration toute légitime surtout que ce peuple est précurseur en accueillant tous ceux qui manoeuvrent pour l'écraser ou le vassaliser en retour du bien fait.C'est inacceptable aujourd'hui et demain. Les valeurs d'humanisme et d'hospitalité ne sauraient s'analyser en faiblesse.

Lorsqu'un peuple est conscient de son poids électoral en plus d'être précurseur accueillant, il n'a pas à pleurnicher de toutes les façons. Si nous ne sommes pas entendus aujourd'hui, nous le serons demain assurément.

Je n'ignore pas que cette mise au point ne plaira pas à tous selon ce qui m'a été enseigné: "Le leadership efficace implique que vous preniez des responsabilités pour le bien-être du groupe, ce qui veut dire que certaines personnes vont s’énerver face à vos actions et vos décisions. C’est inévitable – surtout si vous êtes Honorable" (Colin Powell).
Pour terminer, Excellence Monsieur le Président, je voudrais soumettre à votre appréciation le constat plus que d'actualité de Bill Gates:"Tandis que nous envisageons le prochain siècle, les leaders seront ceux qui habilitent les autres".

Par Kouakou Dapa Donacien,

Cadre Koulango.
Initiateur et promoteur du Festival de la Renaissance du peuple Koulango.
Email:dapadonacien@gmail.com