Côte d’Ivoire : Le candidat de l’AIRD à l’élection présidentielle, c’est le Président Laurent Gbagbo. 2500 parrainages remis à EDS

Par Ivoirebusiness - Côte d’Ivoire. Le candidat de l’AIRD à l’élection présidentielle, c’est le Président Laurent Gbagbo. 2500 parrainages remis à EDS.

Le ministre Eric Kahe, président de l'AIRD. Image d'archives.

L’AIRD (l’alliance ivoirienne pour la République et la démocratie), le parti du ministre Eric Kahé, vice-président de la coalition EDS, a choisi à l’unanimité le président Laurent Gbagbo comme son candidat à l’élection présidentielle de 2020, a appris un journaliste d’Ivoirebusiness.

C’était au cours de sa conférence nationale tenue le samedi 22 août 2020 à l’hôtel Belle Cote de Cocody à Abidjan.
Joignant l’acte à la parole, L’AIRD a joint son dossier de parrainage du candidat Laurent Gbagbo le 25 août 2020 au siège de EDS par les soins de son vice-président Georges Temanin assurant l’intérim du président Eric Kahé en exil.

Ce sont 2500 parrainages contenus dans le dossier qui ont été remis au président de la coalition EDS (ensemble pour la démocratie et la souveraineté).

A cette occasion, le ministre Eric Kahé a prononcé un important discours d’orientation politique. Ci-dessous, le texte intégral de son discours dont Ivoirebusiness a eu copie.

Eric Lassale

EXTRAIT DU DISCOURS DU MINISTRE ÉRIC KAHÉ, PRÉSIDENT DE L'AIRD :

En décidant de poser une journée de regard sur « les exigences démocratiques pour la pérennité de la République » vous choisissez de répondre à la violence qui a cours dans notre pays depuis près de 20 ans, par la meilleure des façons : être une force de propositions afin de nous accorder sur l’essentiel et offrir à la nation entière les balises nécessaires au progrès partagé, au véritable « vivre ensemble » en lieu et place d’un « vivre en cendres » qui nous condamne et ne profite à personne.

Nous nous réunissons dans un contexte de feu et de cendres. Je voudrais m’incliner en votre nom à tous, devant la mémoire de tous ceux de nos compatriotes qui ont péri pour leur idéal démocratique et républicain face à la folie des ambitions des autres et souhaiter prompt rétablissement aux blessés.

En décembre 1999, et depuis septembre 2002, la violence est devenue notre quotidien et tous nos enfants qui ont aujourd’hui moins de 20 ans n’ont connu que la violence ou la crainte du lendemain. Autrement dit, les moins de 25 ans représente près de 60% de la population totale. Les plus âgés de cette tranche ont 24 ans. Ils avaient 3 ans en 1999 et 6 ans en 2002. Plus de 60% de notre population a ainsi grandi dans la violence avec une dérèglementation de la vie sociale ces deux dernières décennies, marquées par une forte inversion des valeurs, pour ne pas dire une promotion des contre valeurs.

Pour ne citer que quelques exemples de cette inversion, le mérite par le travail et les bonnes études scolaires et universitaires a été remplacé par la promotion par les armes, la nation a été remplacée par la préférence ethnique, le projet de société qui doit convaincre l’électeur a été remplacé par l’arithmétique tribale . Et au nom d’un tel calcul, les alliances se font et se défont au gré des intérêts des élites, au détriment des populations.

Comme beaucoup d’entre nous, j’avais applaudi sous cape le coup d’État contre le président Bédié en décembre 1999, n’ayant pas pensé à la boîte de pandore qu’il ouvrait. 20 ans après, le désastre est là. La sortie de ce désastre passe par une prise de conscience sincère, par les élites, de leur échec, de notre échec. Ensuite, une volonté non hypocrite de participer au changement. Non pas ce changement qu’on attend des autres mais le changement qu’on impulse soi-même. Non pas cet Ivoirien nouveau qu’on proclame quand on est soi-même assis dans la corruption, la gabegie et « l’ivoirophobie ». Cela suppose le renoncement à la communication politique de séduction que, hélas les actes de gouvernance contredisent. « Quelles exigences démocratiques pour la pérennité de la République ?», tel est le thème que nous avons décidé d’aborder, en toute humilité car la réponse est d’abord collective.

Comme beaucoup d’entre nous, j’avais applaudi sous cape le coup d’État contre le président Bédié en décembre 1999, n’ayant pas pensé à la boîte de pandore qu’il ouvrait. 20 ans après, le désastre est là.
Manifestation à Abengourou contre le 3ème mandat d'Alassane ouattara
Manifestation à Abengourou contre le 3ème mandat d’Alassane ouattara
Si « les peuples ont les dirigeants qu’ils méritent », ils ont aussi les systèmes politiques qu’ils se choisissent. Et ce sont ces systèmes politiques qui accouchent de dirigeants.

Vu la qualité de l’auditoire nous n’allons pas nous étendre sur les définitions de notions comme la démocratie qui implique la participation de tous à la vie politique afin que la souveraineté appartienne au peuple, encore moins sur la République si ce n’est pour insister sur le fait que c’est une forme de gouvernement où le chef de l’État (président) n’est pas seul à détenir le pouvoir qui n’est pas héréditaire. C’est dire que dans une république, s’acharner à choisir et imposer son successeur est une hérésie républicaine.
C’est dire que dans une république, s’acharner à choisir et imposer son successeur est une hérésie républicaine.

Si République et démocratie sont assez voisines du fait que ces deux entités renvoient à la détention de la souveraineté par le peuple, une république peut ne pas être démocratique et vice versa. Dans les grandes lignes d’orientation que nous proposons à la réflexion de la Conférence Nationale, nous avons décliné les exigences démocratiques en exigences politiques, en exigences institutionnelles, en exigences sociétales, en exigences humanistes et spirituelles, en exigences de bonne gouvernance, en exigences de citoyenneté, ces dernières étant en lien étroit avec la démocratie participative.
Ainsi au titre des exigences politiques, nous noterons :
• la nécessité de s’accorder sur un régime politique et;
• l’adoption de formes de gouvernance consensuelles.

N’est-ce pas faute de l’avoir fait et bien expliqué que certains vont jusqu’à se glorifier pour les injustices et les violences faites aux autres ? N’est-ce pas ce qui explique que des militants d’un parti politique, considèrent leur mentor comme un homme puissant toujours vainqueur des autres par l’exercice de la violence ? Pour eux, avoir fait emprisonner Laurent Gbagbo en 1992, l’avoir contraint à intégrer des rebelles dans son gouvernement pour finalement le conduire à la CPI est la preuve de sa suprématie sur les autres. Tout comme contraindre tous ses adversaires en exil et condamner à 20 ans qui pourrait le gêner. De sorte que ce qui est condamnable dans une république fait l’objet de fierté pour certains.

Il convient de donner à nos populations la réponse à la question suivante : entre Laurent Gbagbo qui aide au retour de ses adversaires exilés et celui qui le lui paye en déportation, lequel des deux pérennise la République ? Au titre des exigences institutionnelles, il convient de noter les missions et la place de :
• la Constitution, qui est la base de la gestion de nos différences, et aussi de nos différends et nous permet ainsi de nous accorder sur ce qui peut nous unir sans nous rendre pareils ;
• la législation en vigueur, conscients que ce qui caractérise la République c’est la Loi.
Alors que dans une monarchie, le Roi est la Loi, il faut rappeler que dans une République c’est la loi qui est le Roi, c’est la loi qui est reine ! C’est la Loi qui régule tous les rapports institutionnels, intercommunautaires et entre citoyens.

D’où l’impérieuse exigence du respect des textes et des lois en vigueur dont le viol, qui ferait une injustice à un seul d’entre nous, est un tsunami en préparation pour toute la société ;
• les élections qui doivent avoir pour premier rôle d’assurer les alternances afin de permettre à la République de profiter des meilleures compétences. Elles se doivent d’être transparentes, justes et inclusives. Une bonne élection se juge par l’impartialité de la structure qui organise les élections ainsi que celle du juge électoral, par l’équité du découpage électoral, par la justesse du fichier électoral qui doit garantir la participation des ayant-droits à l’exclusion rigoureuse de tous les autres que sont les non nationaux, les mineurs, etc. ;

• la séparation et l’exercice libre des pouvoirs que sont les pouvoirs exécutif, législatif et judicaire, auxquels l’on ajoute un quatrième qu’est la presse. A défaut d’une presse libre et également accessible dans notre pays, ce sont les réseaux sociaux qui ont fini par imposer une sorte de loi du marché, laissant planer sur notre télévision l’impression du discrédit par le parti-pris.

Au titre des exigences sociétales, l’urgence n’est pas seulement de s’accorder sur des droits constitutionnels mais de les garantir effectivement. Notre Constitution souffre de son viol régulier sinon, elle indique théoriquement

• les rôles de la société civile ;
• la liberté d’expression des partis politiques, y compris ceux d’opposition ;
• la gestion équitable des médias étatiques ;
• la garantie des droits des peuples.

Certes, ces droits sont consignés dans la Constitutions. Hélas, la mauvaise gouvernance a vite fait de les passer pour des leurres. Pire, nos gouvernants nous ont même retiré de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) quand cette dernière a donné raison au peuple sur la mauvaise gouvernance du pouvoir et sur la nécessité d’organiser des élections crédibles.
Au titre des exigences humanistes et spirituelles, la laïcité dont nous avons fait le choix, n’interdit pas la pratique de la Foi. Elle en fait une question de libre choix, sans interférence possible avec l’État. Or, c’est la religion qui est le pain béni pour l’arrivée au pouvoir des élites, y compris les plus insoupçonnables au regard de leur parcours. Ces exigences sont le respect des croyances et valeurs des peuples, ainsi que la reconnaissance de l’identité culturelle des peuples. C’est en tuant ou en laissant tuer cette identité culturelle que l’on met un peuple sous la domination.

Au titre des exigences de bonne gouvernance,

• les compétences et les capacités pour gérer la chose publique, critères qui ont volé en éclats pour être remplacés par le « rattrapage ethnique », la loi des armes ;
• l’acquisition d’un comportement éthique qui place l’intérêt général au-dessus des intérêts individuels ;
• la réactivité dans la définition des objectifs, des règles, des structures et des procédures ;
• l’efficience dans l’atteinte des objectifs fixés pour répondre aux besoins de la population ;
• la garantie de l’État de droit ;

• le respect des droits de l’homme, de la diversité culturelle et de la cohésion sociale ;(Réconciliation, Milices criminelles, etc)
• la transparence dans la gestion de la chose étatique, y compris par l’innovation et l’ouverture d’esprit au changement ;
• la prise en compte de la durabilité et de sa transmission à la génération future ;
• l’assurance d’une gestion financière saine.
« Dites-moi si vous avez bien gouverné et je vous dirai si vous serez tenté de vous maintenir au pouvoir » pourrait-on résumer la probabilité pour un chef d’État de vouloir s’accrocher au pouvoir. Plus le pouvoir a été corrompu, plus son détenteur sera poussé à sa conservation.

Au titre des exigences de citoyenneté,
• la compréhension de la démocratie, de son esprit, de son intérêt, de ses limites (d’où la nécessité des formations au sein de nos formations politiques et la formation citoyenne qui relève à la fois de l’État et de toutes les associations);
• la qualification démocratique, voire la démocratisation du citoyen ;
• les devoirs légaux des démocrates, au nom desquels nous donnons jusqu’à nos vies pour empêcher le viol de notre Constitution ;
• le respect de la jouissance de droit politique du citoyen, au nom duquel nous défendons, avec nos mères notre droit de manifester et de nous réunir ainsi que le droit de vote de Laurent Gbagbo, de Charles Blé Goudé et de tous les autres, fussent-ils les alliés d’hier de nos bourreaux ;

• l’intérêt pour la chose publique ; la recherche de l’intérêt commun et non la communautorisation de son intérêt particulier ;
• la compréhension tout aussi nécessaire des régimes non-démocratiques et antidémocratiques afin de mieux les entraîner sur les voies démocratiques ;
c’est pour compenser les inconvénients de nos systèmes politiques trop présidentialistes sans contrepouvoir que la limitation des mandats a été progressivement adoptée en Afrique de l’Ouest.
• la participation à la vie des institutions politiques ;
• la transposition de l’esprit démocratique au-delà du politique ;

• la recherche de la progression démocratique et la défense de la démocratie.
Après une telle présentation, la position de l’AIRD devrait être facile à prendre sur les questions brûlantes de l’heure, à savoir :

1. Quelle est la position de l’AIRD sur un 3ème mandat ?
2. Lequel des Ivoiriens, dans le contexte exceptionnel de notre parti et de notre passé récent, de nos engagements antérieurs, nous paraît le mieux indiquer pour compétir en notre nom à l’élection présidentielle prochaine et rassembler le pays après ces années de déchirure ?

Avant toute réponse sur la première question, il convient de rappeler que la tendance générale à la limitation des mandats a été un processus voulu par les peuples comme l’a été le multipartisme. Autant personne n’oserait nous ramener au parti unique, autant la limitation des mandats ne peut faire l’objet d’un retour en arrière ou d’une tropicalisation qui consisterait à jouer sur une révision constitutionnelle pour s’exempter du respect de la loi et sortir ainsi de la République.

En effet, c’est pour compenser les inconvénients de nos systèmes politiques trop présidentialiste sans contre pouvoir que la limitation des mandats a été progressivement adoptée en Afrique de l’Ouest. Dans nos systèmes, l’exécutif concentre beaucoup trop de pouvoir, formel et informel, entre ses mains par rapport aux autres institutions (assemblée législative, pouvoir judiciaire). Ainsi, cette surdose de pouvoir explique à la fois pourquoi les présidents en place sont prêts à tout pour rester, puisqu’il y a trop à gagner (ou trop à perdre pour partir). Malgré, ou à cause de l’immensité des moyens dont ils disposent, ils se laissent rapidement emporter par la corruption. L’argument trouvé par tout dictateur pour son maintien est de laisser entendre que cela participe de la volonté du peuple.

Or, les sondages effectués [en 2015] par l’institut Afrobarometer ( dans 29 pays africains, montrent clairement et sans équivoque qu’en moyenne 75 % des populations de ces 29 pays sont pour la limitation des mandats et donc contre toute modification de la Constitution pour se maintenir au pouvoir après la limite constitutionnelle. Les peuples africains apportent un appui indéfectible à la limite du nombre de mandats. Mieux, en Côte d’Ivoire, le passage de la Constitution de 2000 à celle de 2016, n’a pas changé de République puisque la dernière Constitution a insisté sur la continuité, et qu’aucune institution n’a été dissoute.

En outre, il n’y a guère eu d’élections anticipées. Accepter un troisième mandat par une révision constitutionnelle c’est accepter le principe de la présidence à vie, puisque rien n’empêchera une autre révision avant 2030.
Quant à la seconde question, la réponse sera démocratique et elle appartient de ce fait à notre Conférence Nationale à qui nous rappelons seulement que même si le candidat naturel du parti est son président, celui qui a été acquitté à la CPI a non seulement le droit de rentrer dans son pays et qu’il est de notre responsabilité de l’y aider mais il avait été mis en mission par nous. Mais le choix de chacun demeure libre.''

Le président

Eric Kahe