Côte d’Ivoire : La Fidhop dénonce des morts et soutient le Conseil national de Transition

Par Ivoirebusiness - Côte d’Ivoire. La Fidhop dénonce des morts et soutient le Conseil national de Transition.

Dr BOGA SAKO GERVAIS, Président de la FIDHOP et de GRADDH-AFRIQUE.

ELECTION EN CÔTE D’IVOIRE LE 31 OCTOBRE 2020 ?

LA FIDHOP DÉNONCE DES MORTS ET SOUTIENT LE CONSEIL NATIONAL DE TRANSITION !
PRE-RAPPORT DE LA FIDHOP :

1. La FIDHOP (la Fondation Ivoirienne pour l’observation et la surveillance des Droits de l’Homme et de la vie politique) dénonce et déplore que, depuis le 13 Août 2020, une centaine de personnes ont perdu la vie ; que près de trois cents ont été grièvement blessées, généralement à la machette ; et que près de deux cents autres sont injustement arrêtées parmi des manifestants pacifiques.

Tout ceci, pour un scrutin électoral, que l’on aurait pu reporter, simplement, afin d’en garantir de meilleures conditions d’organisation.

2. LA FIDHOP s’incline devant tous les morts et disparus, apporte sa compassion et son soutien à tous les blessés, les emprisonnés et à ceux ayant perdu des biens : la FIDHOP promet que la plupart des événements ayant été documentés, filmés ou photographiés, tous leurs auteurs et les donneurs d’ordre en répondront ; tôt ou tard !

3. Le présent PRE-RAPPORT est un résumé décrivant la situation d’avant, pendant et d’après le 31 Octobre 2020, pour répondre à la question de savoir si le scrutin organisé en Côte d’Ivoire ce jour-là peut se qualifier d’élection crédible ou démocratique.

I/ LA CRISE PREELECTORALE D’AVANT LE 31 OCTOBRE :

4. Aucune condition objective n’a été réunie pour garantir que le scrutin présidentiel devant se tenir le 31 octobre 2020 en Côte d’Ivoire soit crédible, démocratique et apaisé :

- le Code électoral, qui a été pris par une Ordonnance du Chef de l’État, sans prendre en compte les avis de l’opposition et de la société civile et qui a introduit les parrainages citoyens était déjà contestable et très contesté ;
- la Commission électorale indépendante (CEI) devait être reconstituée selon les décisions de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP), « avant toute élection » ; ce que le gouvernement ivoirien a refusé d’exécuter ;
- la liste électorale nécessitait un audit devant rassurer tous les candidats, au regard du mauvais déroulement de l’enrôlement, qui a créé des suspicions chez les opposants.

5. Le 14 Septembre, la Conseil Constitutionnel ivoirien a rendu publique la liste des candidats à l’élection du Président de la République. Parmi les quarante (40) éliminés, sur les quarante-quatre (44), deux ont fait un recours devant la Cour africaine (CADHP), qui a ordonné que les candidats Laurent GBAGBO et Guillaume SORO soient remis dans la course. Mais sans aucune suite de la part de l’État ivoirien.

6. Les deux candidats principaux de l’opposition, MM. Henri Konan BEDIE et Pascal Affi N’GUESSAN, ont alors, de concert avec les partis et groupements politiques de l’opposition, appelé à la Désobéissance civile et au Boycott actif de l’élection. Mais les manifestations de leurs militants et sympathisants ont été violemment réprimées, dans le sang, par les « Microbes » à la solde du pouvoir, dans plusieurs villes du pays : Bonoua, Daoukro, Divo, Gagnoa, Bongouanou, Dabou, etc.

Dès lors, toutes les conditions étaient réunies pour que l’on assiste à une élection non-démocratique le 31 Octobre 2020.

II- JOUR DU SCRUTIN DU 31 OCTOBRE 2020 EN CÔTE D’IVOIRE :

A/ Au niveau international :

7. Selon les informations recueillies par la FIDHOP à travers ses Délégations-FIDHOP de Suisse, d’Italie, de Belgique, du Royaume Uni, des États-Unis, de Tunisie, du Canada et de France, il ressort que dans l’ensemble, le mot d’ordre de Désobéissance civile a été largement suivi ; sans que les opposants n’empêchent ceux qui voulaient voter de le faire.

8. L’affluence des Ivoiriens dans les centres de vote qui ont été très réduits pour cause de COVID-19, a été très faible, comparée aux jours de vote passés. Sauf en Iles de France où, l’immensité de la foule amassée dans le centre d’Aubervilliers a fait douter plusieurs Ivoiriens de la Diaspora de France sur les nationalités réelles de ces votants.

B/ Au niveau national :

9. Sur presque toute l’étendue du territoire national, sauf dans le Nord du pays, les bénévoles de la FIDHOP ont noté que des incidents se sont produits partout. Le matériel électoral, les urnes, les bulletins, a été souvent volé, détruit ou brûlé. Et des électeurs ont été empêchés d’aller voter.
Dans le V baoulé, dont Yamoussoukro, qui est très acquis au PDCI-RDA du candidat BEDIE, ou à l’Est, chez le candidat AFFI, notamment à Bongouanou, ou encore dans les fiefs de l’Ex-président GBAGBO, au Sud-ouest et dans l’Ouest, des voies ont été obstruées, barrées, dans les villages et les villes.

10. Des affrontements parfois violents ont eu lieu dans ces zones, entre les communautés nordistes favorables à M. OUATTARA et les autochtones suivant le mot d’ordre de Désobéissance civile. Ce qui a entrainé de nombreux blessés graves et des morts ; ce fut le cas à Téhiri, dans la Sous-préfecture de Bayota, à Gagnoa, où six ressortissants Bétés ont été tués par les partisans du RHDP.

Au total dix-sept (17) personnes auraient perdu la vie ce 31 Octobre 2020.

III- BILAN ET RECOMMANDATIONS DE LA FIDHOP :

11. CONSIDÉRANT que le scrutin organisé le 31 Octobre 2020 en République de Côte d’Ivoire était très conflictuel et n’a respecté aucune norme légale ni démocratique, de transparence, d’équité et d’ouverture à tous les prétendants ;

12. CONSIDÉRANT que, par l’absence d’un Dialogue républicain – pourtant réclamé depuis Février 2020 par la FIDHOP et d’autres organisations politiques et de la société civile dans un courrier adressé au Pape François – ce scrutin du 31 Octobre 2020 a plutôt aggravé la fracture sociale en Côte d’Ivoire ;

13. VU que les Ivoiriens, dans une très large majorité, ont boycotté ce vote, laissant estimer le taux de participation, de façon objective, en dessous de 20% : en 2015, avec l’appel au boycott des seuls pro-Gbagbo, ce taux était officiellement de 54,63, alors qu’aujourd’hui, avec tous les opposants unis contre Ouattara et tous ces incidents, le taux de participation serait scandaleusement de 53,9% ;

14. CONSTATANT l’illégitimité du Chef de l’État sortant, dont la candidature illégale a été la source principale des récentes les violations des Droits de l’Homme en CI ;

15. DEVANT le blocage institutionnel qui s’est ouvert dans le pays, entre le régime-Ouattara et le Conseil National de Transition (CNT) qui a été créé le lundi 2 Novembre 2020 par les opposants et dont le Président est SEM Henri Konan BEDIE ;

LA FIDHOP, toujours soucieuse du respect des Droits de l’Homme en Côte d’Ivoire, notamment du droit à la vie et à l’intégrité physique des populations vivant sur toute l’étendue du territoire national, et qui a appelé au report de cette élection, fait les recommandations suivantes.

16. LA FIDHOP demande à M. Alassane Dramane OUATTARA de prendre acte de ce que, au regard des principes de la Démocratie et conformément à la Constitution du 8 Novembre 2016, il n’y a pas eu d’élection libre, ni transparente, ni juste le 31 Octobre 2020 en Côte d’Ivoire.

17. LA FIDHOP rejette les résultats de ce scrutin tels que proclamés par cette CEI contestée, qui entament définitivement la légitimité et la crédibilité du Président sortant, avec un score à la soviétique de 94.27% et un taux de participation utopique de 53,9%.

18. LA FIDHOP salue la mise en place du Conseil National de Transition ; se réjouit de la désignation de l’Ex-président Henri Konan BEDIE en qualité de Président ; et apporte son soutien au CNT et à tous ses leaders.

19. LA FIDHOP conclut que, pour garantir un État de droit en Côte d’Ivoire, où les droits des populations seront garantis et respectés, il y a nécessité que la Transition politique soit effective, de sorte à organiser dans quelques mois, une vraie élection présidentielle, démocratique et apaisée, qui puisse doter la Côte d’Ivoire d’un Président de la République légitime et légal.

Fait à Copenhague, Danemark, le 04 Novembre 2020

Dr BOGA SAKO GERVAIS
• Enseignant-Chercheur à l’Université de Côte d’Ivoire ;
• Ex-Secrétaire Exécutif de la Commission Nationale des Droits de l’Homme de Côte d’Ivoire (CNDHCI) ;
• Président-Fondateur de la FIDHOP ;
• Ecrivain-Politique