Côte d'Ivoire: LES FRÈRES BOUYGUES ET LEURS RENTES INDÉCENTES EN CÔTE D'IVOIRE

Par IvoireBusiness/ Débats et Opinions - LES FRÈRES BOUYGUES ET LEURS RENTES INDÉCENTES EN CÔTE D'IVOIRE.

Konan Bedié, Alassane Ouattara, et Martin Bouygues, lors de l'inauguration du pont Henri Konan Bedié d'Abidjan.

Comment investir la plus petite somme imaginable dans un projet tout en en tirant le maximum de profits possible ? C'est ainsi que Martin et Olivier Bouygues pourraient intituler une éventuelle "master class" dans une éventuelle école de management.
En Côte d'Ivoire, ils sont passés maîtres dans l'art de miser peu et de gagner beaucoup. Le montage financier du Pont Henri Konan Bédié d'Abidjan (à péage) témoigne de leur "talent". Quand il a fallu mettre la main à la poche, les banques privées et d'investissement ont octroyé différents prêts d'un montant de 166 millions d'euros. Les actionnaires ont mis le reste sur le table (104 millions d'euros). L'Etat de Côte d'Ivoire a d'abord accordé au projet une subvention de 76 millions d'euros (73,7% de la somme à collecter), qui ne seront pas remboursés, si je comprends bien. Puis les 28 milliards restants (26,3% de la somme à collecter) ont été mobilisés par l'Etat, la BNI (une banque d'Etat), deux entités du groupe Bouygues, Total et un fonds d'investissement sud-africain (Harith), selon une clé de répartition qui n'a pas été rendue publique.
Au final, par un coup de baguette magique, le groupe Bouygues s'est retrouvé actionnaire de l'entreprise (Socoprim) devant exploiter le pont à hauteur de 49%. L'Etat de Côte d'Ivoire a accepté n'avoir que 30% du business, en dépit du fait qu'il est le principal financier du projet hors secteur bancaire. En dépit de ce qu'il s'est engagé à payer de nouvelles subventions si, contrairement aux objectifs du consortium, 80 000 véhicules n'utilisaient pas ce pont en moyenne journalière. En 2015, il a ainsi payé 12 milliards de FCFA à Socoprim pour compenser, pas des pertes, mais un manque à gagner sur ses prévisions d'origine, dont on ne sait sur quoi elles se sont fondées.
Socoprim a eu un contrat d'exploitation de ce pont sur une période de... 30 ans.
Quand chaque année, après avoir remboursé l'argent des différentes banques, les actionnaires de Socoprim se partageront les dividendes, le groupe Bouygues va prendre la moitié, alors qu'il a investi à tout casser en fonds propres 8% du budget total du projet. Il va prendre la moitié des bénéfices après s'être servi en frais de gestion et d'entretien multiples et variés bien sûr. Le risque (minuscule) de Bouygues est (en plus) confortablement couvert, bien sûr. Si l'Etat ivoirien refuse de respecter ses engagements, la multinationale française pourra, après avoir eu recours à une procédure d'arbitrage, tendre sa facture à une filiale de la Banque mondiale (MIGA) chargée de garantir les risques politiques. Qui, bien sûr, saura les futures autorités d'Abidjan de ne pas "faire les cons", de peur d'être blacklistés par le microcosme des financiers internationaux.
80 000 personnes par jour pendant 30 ans, à 500 FCFA au minimum par passage, ça fait combien au fait ? La vie est belle pour certains !
Au fait, Bouygues Socoprim et ses bailleurs de fonds a payé à Bouygues Construction l'intégralité de ses prestations...

Par Théophile Kouamouo.