Scandale/ Armée ivoirienne : 9 000 gendarmes veulent déposer la tenue

Par Soir Info - Armée ivoirienne. 9 000 gendarmes veulent déposer la tenue. De nombreux parmi eux recrutés, il y a seulement deux ans.

Le Commandant superieur de la Gendarmerie nationale, le Général Nicolas Kouakou, au cours d'une réunion d'Etat-major. Image d'archives.

En voulant mettre en application le point 19 des 108 reformes du secteur de la sécurité lié aux départs volontaires à la retraite, le Général de division Kouakou Kouadio Nicolas, Commandant supérieur de la gendarmerie nationale, a abouti à un résultat pour le moins intrigant.

Au moins 9.000 éléments de la gendarmerie, dont ceux issus de la dernière promotion de 2017, se sont inscrits massivement pour quitter les rangs de la gendarmerie nationale, si l'on en croit une source sécuritaire interne au ministère de la Défense. Une autre source au sein du Commandement supérieur de la gendarmerie nationale, qui s'est ouverte à nous le vendredi 9 mars 2018, en milieu de journée, a confirmé cette information, soulignant toutefois « qu'il s'agit d'un sondage commandité par la hiérarchie pour se faire une opinion sur l'état d'esprit des troupes ».

En tout état de cause, sondage ou pas, les résultats se présente comme un boomerang. Ce d'autant qu'il vient déjouer tous les pronostics pour étaler une situation d’incommodité au sein de la gendarmerie… au point que 9.000 hommes veuillent déposer la tenue et rompre les rangs. « On ne peut pas laisser partir plus de la moitié des éléments de la gendarmerie. Ce n'est pas possible », s'est exclamé notre interlocuteur, non sans faire « état d'un grand malaise » au sein de ce corps d'élite. Ce qui, selon lui, « pourrait expliquer cette volonté massive de départ ».

Le point 19 des 108 reformes du secteur de la sécurité autorise, en effet, le gouvernement à « procéder à une déflation progressive des effectifs résultants d'un rééquilibrage des allocations budgétaires au sein des ministères de la Défense et de l’Intérieur ». Cette déflation, dite retraite anticipée avait été annoncée en conseil des ministres début décembre 2017. 900 militaires des Forces armées de Côte d'Ivoire ( Faci), dont 3 officiers, 634 sous-officiers et 354 militaires du rang dont les dossiers avaient été retenus par la commission d'examen ont ainsi été mis à la retraite anticipée au 31 décembre 2017, avec une prime de 15 millions de Fcfa pour chaque élément. Cette décision de déflation a été mise en route dans le but de permettre à la Côte d’Ivoire de s’approcher de ces normes, et de la pyramide des grandes armées et en vue de rajeunir ses effectifs.

Ce processus devrait donc se poursuivre au niveau de la gendarmerie, avant de toucher, probablement, les autres corps, dont la police nationale. La procédure ne concerne que ceux qui sont à 5 et 8 ans de leur retraite. Notre source confié qu'au niveau de la gendarmerie, c'est l'euphorie totale. « Tous veulent partir. On ne comprend pas cette frénésie pour le départ». Au niveau de l'Escadron de protection des hautes personnalités ( Ephp), «ce sont un peu plus de 400 éléments sur les 1000 que compte cette unité qui se sont inscrits pour le départ. Des éléments qui ont intégré la gendarmerie l'année dernière, c'est-à-dire ceux issus de la dernière promotion, qui n'ont même pas encore deux ans de présence se sont inscrits pour quitter le corps. On se pose beaucoup de questions », a poursuivi notre source.

La gendarmerie nationale est une force armée chargée des missions de police et placée sous la tutelle du ministère de l'Intérieur et du ministère de la Défense. Ce corps a été secoué, depuis la fin de la crise post-électorale, par des mouvements d'humeur attribués à des ex-rebelles des Forces armées des forces nouvelles ( Fafn) qui l'ont intégré. Les gendarmes, foncièrement républicains, sont habituellement chargés de la sécurité dans les zones rurales et dans les zones périurbaines. La gendarmerie a vu ses locaux incendiés ces derniers temps après avoir subi une série d'attaques d'hommes armés, sans visages entre 2016 et 2017 ayant entraîné le limogeage du général Gervais Kouakou, ex-commandant supérieur.

Armand B. DEPEYLA