Affaire « le parti unifié n'est pas à l'ordre du jour »/ Cissé Bacongo charge Guikahué : « Il peut continuer son jeu de prestidigitation »

Par Soir Info - Affaire « le parti unifié n'est pas à l'ordre du jour »/ Cissé Bacongo charge Guikahué : « Il peut continuer son jeu de prestidigitation ».

Cissé Bacongo, ex-Ministre et actuel conseiller spécial du Président Alassane Ouattara. Ph DR.

L’ex-ministre de la Fonction publique et de la réforme administrative, et actuel Conseiller spécial du chef de l’Etat chargé des Affaires juridiques, institutionnelles et politiques, Cissé Ibrahima Bacongo, répond à Ahoussou Jeannot et à Guikahué, tous deux cadres du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci), sur des débats en cours. Vice-président du Rassemblement des républicains (Rdr) chargé des Affaires juridiques et institutionnelles, des droits humains, également chargé des communes de Koumassi et Marcory, le député de Koumassi apporte la réplique, dans cette interview réalisée, le jeudi 15 février 2018, au Plateau, à ceux qui prônent une candidature de Bédié à la présidentielle de 2020.

Le Rdr, votre parti, a demandé à ses alliés, que les élections municipales et régionales de 2018 se fassent en parti unifié. Pourtant, les semaines s'égrènent sans que ce parti ne prenne forme. Pensez-vous, objectivement, qu’il sera possible de mettre en place le parti unifié avant les élections locales ?

Cissé Ibrahima Bacongo : Que la création du parti unifié intervienne avant les élections locales ou que celles-ci se déroulent après la création du parti unifié, pour moi, il s’agit de la même chose. Donc, pour moi, cela est tout à fait possible ! D’abord, je ne vois pas la contrainte majeure qui pourrait empêcher la création du parti unifié avant les élections locales, municipales et régionales. Je ne vois pas de contrainte de cet ordre, qu’elle soit juridique ou politique ! Les statuts et règlement intérieur ont été élaborés depuis 2016, dans le cadre des travaux du Comité ad’hoc mis en place par le directoire du Rhdp, et que j’ai eu l’honneur et le privilège de diriger. Dois-je rappeler à cet égard, que le président de la Conférence des présidents du Rhdp, le président Bédié, avait instruit le nouveau président du directoire, le ministre Amadou Soumahoro, lors de la passation de charges entre lui et son prédécesseur, le ministre Guikahué, d’apprêter les documents constitutifs du parti unifié-Rhdp, à l’échéance de septembre 2016. Ce travail a été fait.

Quelle a été la suite de ce travail ?

Ensuite, nous avons élaboré un manifeste qui contient la vision sous-jacente à la création du parti unifié, les objectifs qu’il vise. Je précise que les statuts et le règlement intérieur ont été élaborés sur la base des textes des partis membres du Rhdp, à savoir le Pdci, le Rdr, l’Udpci, le Mfa, l’Upci. Le Pit a pris le train en marche. En plus du manifeste et des statuts et règlement intérieur, nous avons élaboré une note d’orientation qui décrit, entre autres, la manière dont le parti unifié devrait être créé et, enfin, une note de procédure indiquant les étapes ou les différents actes qui doivent être accomplis en vue de la création effective de ce grand parti. Tous ces documents ont été remis à bonne date au président de la conférence des présidents du Rhdp, le président Henri Konan Bédié, en septembre 2016.

Mais, il y a qu’en dehors du Rdr, aucun autre parti membre du Rhdp ne s’est prononcé, au cours d’un congrès, sur la question de la création ou non du parti unifié !

En ce qui le concerne, le Rdr a organisé son congrès les 9 et 10 septembre 2017. Au cours de ce congrès, il a pris une résolution forte allant dans le sens de la création du parti unifié. Sans doute, les autres partis ne l’ont pas encore fait. Mais, ils peuvent le faire à tout moment. Un congrès peut être ordinaire ou extraordinaire. Autant le congrès ordinaire obéit à des séquences précisées dans les statuts et règlement intérieur, autant le congrès extraordinaire, conformément aux mêmes textes, peut se tenir à n’importe quel moment. De mon point de vue, pour la création du parti unifié, c’est plutôt un congrès extraordinaire que les autres partis membres du Rhdp devraient organiser. Il nous revient que le Pdci est en train de regarder dans cette direction. Les autres partis membres du Rhdp pourraient emprunter la même voie. Puisque nous voulons tous aller aux élections locales dans le cadre du Rhdp, dont le parti unifié me paraît être la modalité la mieux fédératrice, c’est maintenant qu’il faut que les partis alliés organisent respectivement des congrès extraordinaires, afin de sauter le pas au plan juridique.

Vous évoquez des contraintes. Elles peuvent être d’ordre politique quand on considère le discours des cadres- et non des moindres- du Pdci. Ahoussou Kouadio Jeannot, vice-président de ce parti, devant des militants de Toumodi et de Djekanou, le samedi 10 février 2018, a dit : « on ne peut pas vendre le Pdci » qui est un « patrimoine commun ». Le professeur Maurice Kacou Guikahué, n°2 du Pdci, a déclaré, par la suite, qu’il ne faut pas « mélanger » parti unifié et élections locales. Il a été formel : ces élections se tiendront dans le cadre du Rhdp comme pour les dernières législatives. Convenez que ce sont des contraintes à la mise en place du parti unifié avant les élections locales !

Je voudrais entendre cette déclaration du ministre d’Etat Ahoussou Kouadio Jeannot de deux façons. La première, c’est qu’effectivement, le Pdci, pas plus que le Rdr, le Mfa, l’Udpci, le Pit et l’Upci, ne peut pas être vendu. Parce que qui serait l’acheteur ? Il faudrait donc déterminer le marché et les acheteurs possibles. Le Pdci ne peut pas être vendu parce qu’il n’y a pas d’acheteur du Pdci. Sans doute s’exprimait-il face à des militants qui tiennent ce genre de discours ou a-t-il entendu des propos allant dans ce sens ! On ne peut pas accepter de vendre le Pdci, c’est vrai. Mais, personne ne peut aussi accepter d’acheter le Pdci, parce que le Pdci n’est pas à vendre. On pourra en dire autant des autres partis.

Quelle est la deuxième lecture que vous faites de sa sortie ?

La deuxième manière d’entendre ce discours tient au fait que, n’étant pas arrivés au bout du processus, chaque parti est libre de fonctionner comme il veut, et de mobiliser ses militants comme il entend. Encore que le responsable politique est celui qui sait choisir ses mots, la mimique avec, en fonction de l’auditoire. Donc, oui, le ministre d’Etat aurait pu, que dis-je, aurait dû chercher et trouver d’autres mots pour exprimer, fidèlement, sa pensée, au lieu du discours à multiple entrées et sorties qui ne manquera pas de susciter une polémique vaine et stérile, dont on aurait pu se passer par ces temps de vents contraires.

Quelle est alors votre réplique aux propos de Guikahué ?

La position du Rdr est connue sur cette question, pour avoir été souvent déclarée. En effet, le Rdr a résolu, à travers son Comité de direction, d’aller aux prochaines élections municipales et régionales dans le cadre d’un Rhdp-parti unifié, exclusivement. Donc, comme on le dit couramment, le ministre Maurice Kacou Guikahué tente, vainement, de jouer avec nos esprits. Il peut continuer son jeu de prestidigitation ou de tour de passe-passe, s’il y prend ou trouve du plaisir.

Au niveau du Pdci, il se susurre que Bédié pourrait se porter candidat à la présidentielle de 2020. Que dites-vous d’une possible candidature de M. Bédié à la prochaine présidentielle ?

Si je devais accorder du crédit à cette piste, comme vous dites, où seraient donc passés Alphonse Djédjé Mady, Niamien N’Goran, Ahoussou Jeannot, Maurice Kacou Guikahué, Aka Aouélé, Charles Koffi Diby, Achi Patrick, Jean-Louis Billon, Kobenan Kouassi Adjoumani, Jean-Claude Brou, Thierry Tanoh ? Où seraient passés ces cadres du Pdci, pétris d’expérience et de compétence, qui connaissent le monde, et sont rompus à la gestion des affaires de l’Etat ? Non, je ne veux pas croire du tout à cette information qui me paraît être une rumeur désobligeante à l’égard du président Bédié, pour ce qu’il a été et pour ce que nous considérons qu’il est aujourd’hui, c’est-à-dire pratiquement le 2ème père de la Nation. Pour tout ce qu’il a fait pour ce pays, il mérite ce titre. Il le mérite pour être parti du pouvoir dans les conditions que nous savons en 1999 ; pour être resté digne de 1999 jusqu’à 2010 ; pour être resté à l’hôtel du golf avec son jeune frère le président Alassane Ouattara, alors que rien ne l’y obligeait, à part sa conscience. Je ne veux pas croire qu’il veuille redevenir président. Ce serait pour faire quoi, qu’il n’a déjà fait? Pour apporter quoi à la Côte d’Ivoire qu’il n’a pas apporté déjà ? Il a tout donné aux Ivoiriens. Je ne crois pas que le président Bédié veuille être candidat en 2020. Ce sont ceux qui ne veulent pas du Rhdp-parti unifié, qui disent que le président Bédié, voulant être candidat en 2020, parle d’alternance quand on lui parle de parti unifié.

Ne sont-ce pas les divergences entre le Rdr et le Pdci qui expliquent que les réunions du Comité de haut niveau sur le parti unifié soient suspendues ?

Ah non, ces réunions ne sont pas suspendues ! Loin s’en faut. Les travaux se font dans le cadre de deux commissions qui ont été mises en place par les premiers responsables du Comité de haut niveau. Il y a une commission qui s'occupe du chronogramme d’exécution et des modalités de mise en place du parti unifié, une autre commission chargée des statuts et règlement intérieur. Les travaux avancent très bien.

Des partis d’opposition et des mouvements de la société civile réclament la recomposition de la Commission électorale indépendante (Cei). Ils jugent la Commission « déséquilibrée » et s’appuient sur un arrêt de la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples, qui déclare la Cei non conforme aux règles internationales ?

Sur cette question, on peut bien évidemment mener tous les débats, y compris celui sur le sexe des anges. En ce qui me concerne, la réponse du Premier ministre à cette question, me paraît largement satisfaisante et suffisante, à savoir que la commission actuelle a été mise en place sur la base d’un large consensus entre les partis politiques, avec l’assistance du Ndi, dont on ne peut pas douter, ni de l’expertise ni de la neutralité en matière de gestion des questions d’élections à travers le monde. Il ne faut pas embraser le front social pour la mise en place d’une commission, alors que celle qui est en place, a été constituée de façon consensuelle.

Propos recueillis par SYLLA Arouna

NB: Le titre est de la rédaction.