Visite d’Etat d’Alassane Ouattara à Paris: Lettre ouverte de Koné Katinan au Président Nicolas Sarkozy

Le 26 janvier 2012 par IvoireBusiness - Au moment où M. Alassane Ouattara effectue une visite d’Etat en France, M. Koné Katina porte-parole du président Gbagbo pose les questions essentielles.

Koné Katina Justin, porte-parole de Laurent Gbagbo.

Le 26 janvier 2012 par IvoireBusiness - Au moment où M. Alassane Ouattara effectue une visite d’Etat en France, M. Koné Katina porte-parole du président Gbagbo pose les questions essentielles.

La visite d’Alassane Ouattara en France, le mercredi 25 janvier 2012, pour quatre jours est une occasion pour la France de se poser - et de lui poser- les vraies questions concernant la situation en Côte d’Ivoire.
Alors qu’il semble prévu, lors de cette visite, de «saluer les progrès faits par la Côte d’Ivoire depuis le départ du Président Gbagbo», nous invitons le Président Nicolas Sarkozy, le Premier ministre François Fillon, le Ministre des Affaires étrangères et européennes Alain Juppé, le Président de l’Assemblée Nationale Bernard Accoyer, le Président du Sénat Jean-Pierre Bel, et la Présidente du Medef Laurence Parisot, à aborder les vrais sujets suivants:

1. Processus de réconciliation nationale
Alors que le pays est toujours divisé par le résultat d’élections présidentielles que nous continuons de contester (et pour lesquelles nous attendons toujours un recomptage des voix, qui nous a été refusé par les instances internationales contre toute logique de droit et de fait), rien dans l’action d’Alassane Ouattara n’a favorisé la réconciliation d’un pays divisé en deux. Au contraire, la sécurité de son régime est assurée, avec l'assistance de l' armée française, par des chefs de guerre qui depuis 2002 , vivent en marge de l'Etat de droit et que toutes les Ong reconnaissent comme étant à la fois, les auteurs des crimes contre l'humanité comme ceux de Duékoué et qui se sont enrichis au détriment de l'Etat de Côte d’Ivoire grâce aux trafics illégaux du cacao et du diamant. Et depuis le renversement du Président Gbagbo, la situation sécuritaire n'a malheureusement pas changé, la population continuant à être terrorisée par les chefs de guerre. Les tensions ne font donc que s’exacerber.
Le transfèrement illégal du Président Laurent Gbagbo le 29 novembre dernier approuvé par le Gouvernement Ouattara, qui fait suite à sa détention illégale et arbitraire, a été effectué à un peu plus d’une semaine des élections législatives en Côte d’Ivoire du 11 décembre 2011. Nous sommes donc en présence d’une manœuvre politique qui a tente de mettre à l’écart l'un des acteurs clés de la vie politique ivoirienne, père du multipartisme et de la démocratie en Côte d’Ivoire, fondateur du FPI et initiateur de la plate-forme CNRD-FPI.
Cela a eu pour résultat de renforcer encore les exactions dont sont régulièrement victimes les sympathisants et partisans du Front Populaire Ivoirien/CNRD (FPI). Ainsi, le 21 janvier dernier, un partisan du FPI est mort et beaucoup ont été blessés lors d’une attaque à coups de pierres et armes blanches, menée par des partisans du Gouvernement contre un rassemblement de ce parti. Ces violences ont été condamnées fermement par les Etats-Unis et par la Convention de la Société Civile ivoirienne (CSCI), qui ont appelé au «dialogue». La France s’est tue. Mais nous voulons croire qu’elle attendait cette visite officielle pour exprimer sa position.

2. Mise en œuvre du processus démocratique dans le pays
Les élections législatives du 11 décembre dernier ont montré à quel point la démocratie en Côte d’Ivoire était sortie affaiblie. Ce scrutin, boycotté par les partis proches du Président Laurent Gbagbo – donc par la principale force d’opposition en Côte d’Ivoire, enregistre, avec moins de 15%, le plus faible taux de participation jamais connu en Côte d’Ivoire. Les résultats ne sont donc pas représentatifs puisque moins de 8% du corps électoral dans son ensemble a voté pour Alassane Ouattara.
Les Ivoiriens ont exprimé, par leur abstention, le fait qu’ils n’étaient pas dupes : ils demandent un vrai débat politique et démocratique et rappellent que, dans l'état actuel de la crise ivoirienne, la normalisation de la vie politique ne peut se faire sans le Président Gbagbo.

3. Situation des exilés, des déplacés de guerre à l'intérieur du pays, des exilés et des étudiants

Selon le Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR), il reste aujourd’hui quelque 500 000 personnes déplacées à l'intérieur du pays qui ont été pillées et chassées de leurs maisons par les forces de Alassane Ouattara. Un chiffre auquel il faudrait ajouter près de 2 500 000 réfugiés ivoiriens dans les pays voisins. Soit près de trois millions d’Ivoiriens qui ne peuvent participer à la vie démocratique dans leur pays.
N’était-il pas plus urgent de faciliter et d’accompagner leur retour, plutôt que d’organiser des élections législatives auxquelles plus de trois millions de citoyens ne pouvaient physiquement participer compte tenu des conditions précaires de sécurité?
N'aurait-il pas mieux valu allouer les dépenses liées à cette parodie d’élection à la réouverture des universités ivoiriennes dont la fermeture décidée par Alassane Ouattara, prive ainsi les étudiants et la société ivoiriens de toute perspective d'avenir ?
En conclusion, nous appelons le Président Nicolas Sarkozy, le Premier ministre François Fillon, le Président de l’Assemblée Nationale Bernard Accoyer, le Président du Sénat Jean-Pierre Bel, et la Présidente du MEDEF Laurence Parisot à faire passer la promotion de la paix, de la stabilité et de la démocratie en Côte d’Ivoire, au-dessus de considérations financières et commerciales qui au fond ne servent ni les intérêts de la France ni ceux de la Côte d’Ivoire.
Nous les invitons donc à demander, lors de leur rencontre avec Alassane Ouattara, des engagements fermes pour que soit lancé un véritable processus de réconciliation nationale qui suppose que soit immédiatement engagées des discussions avec le Président Laurent Gbagbo.
L’avenir de la Côte d’Ivoire, plus que jamais incertain, est à ce prix.

Le Ministre Koné Katinan Justin, Porte-parole du Président Laurent Gbagbo