Scandale/ Liberté de la presse: Suspendu arbitrairement pour 15 parutions, La Voie originale réagit

Par IvoireBusiness - Suspendu arbitrairement pour 15 parutions, La Voie originale réagit.

César Etou, Directeur de Publication de La Voie Originale.

Conférence de presse de La Voie Originale,
suite à la suspension arbitraire par le CNP

Propos liminaires

Par décision n° 075 du 19 octobre 2016, le Conseil national de la Presse (CNP) a prononcé « la suspension du quotidien La Voie Originale pour quinze (15) parutions ». L’organe de régulation de la presse ivoirienne nous reproche deux délits :

• 1er délit : « publication de fausses informations », délit puni par l’article 82 de la loi de décembre 2014 portant régime juridique de la presse. Pour le CNP, le fait d’écrire que le président Laurent Gbagbo est le Président du FPI depuis le 3ème Congrès extraordinaire de ce parti ; qu’en son absence, le président Sangaré Abou Drahamane assure son intérim, etc., c’est faire « la publication de fausses informations » ;
• 2ème délit : « Défiance au CNP ». Pour le CNP, il nous a été indiqué, en vain, qu’un de ses communiqués pris à partir d’une décision de justice du 3 avril 2015 interdit aux journaux d’écrire ces informations qui seraient donc fausses. Ce délit de « défiance au CNP » n’est pas prévu par la loi !

Il est donc évident que c’est le délit de « publication de fausses informations » qui nous vaut la suspension de 15 parutions. Ce délit est-il fondé ? Nous y reviendrons. Mais notons qu’alors que l’article 82 de la loi sur la presse visé pour la sanction indique que « La publication de fausses informations est punie d’une amende de 5.000.000 de francs à 10.000.000 de francs », M. Lakpé et le CNP ont choisi d’infliger plutôt une suspension à La Voie Originale.
Cette suspension est donc arbitraire et constitue une atteinte grave à la liberté de la presse (I) ; De plus, elle est soutenue par des arguments mensongers (II).

I- Cette suspension est arbitraire et barbare

L’article 47 de la loi n°2004-643 du 14 décembre 2014 portant Régime juridique de la Presse et qui énumère les sanctions applicables stipule : « En cas de manquement aux règles relatives à la création, à la propriété, aux ressources, à la déontologie de l’entreprise de presse et au pluralisme de la presse, ainsi qu’aux règles d’éthique et de déontologie de la profession de journaliste, le Conseil National de la Presse peut prononcer les sanctions disciplinaires suivantes, pour l’entreprise de presse :
1. l’avertissement ;
2. le blâme ;
3. les sanctions pécuniaires ;
4. la suspension de l’activité de l’entreprise ».

Comme on le voit, la suspension d’activité est la dernière sanction à infliger à une entreprise de presse, ou à un journal. De plus, dans cette panoplie de sanctions, le CNP a choisi d’appliquer celle prévue par l’article 82. Alors, pourquoi la suspension en lieu et place de la sanction pécuniaire ? Du mercredi 7 septembre au jeudi 20 octobre, La Voie Originale qui a juste 1 mois et 13 jours d’âge, n’a reçu ni avertissement ni blâme, encore moins une sanction pécuniaire. Pourquoi lui infliger la suspension, c’est-à-dire la sanction suprême réservée à l’entreprise ou au journal qui a commis une faute assimilable au crime ?

De toute évidence, le CNP, selon l’image donnée par un internaute indigné, vient de sévir comme les « Microbes », produits du régime Ouattara, en agressant à mort un bébé d’à peine un mois d’âge ! Même si ce bébé semble vigoureux à la naissance, cette agression demeure barbare et honteuse. Elle porte une grave atteinte à la liberté de la presse en Côte d’Ivoire.

II- Des arguments mensongers pour une sanction arbitraire

Le 9 septembre 2016, deux jours après la parution du premier numéro de La Voie Originale, nous avons reçu une convocation du CNP. La rencontre a eu lieu le mardi 13 septembre. M. Lakpé nous a reçus entouré de MM. Domo (directeur presse), Abié (directeur juridique) et de Mlle Amoikon (Secrétaire générale). Aucun Conseiller du CNP ayant voie délibérative n’était présent, en dehors de Lakpé lui-même.

Objet de la convocation : « Pourquoi La Voie Originale affirme dans ses publications que le Président Laurent Gbagbo est le président du FPI, Sangaré Abou Drahamane son intérimaire, etc. ? ». Car, selon M. Lakpé, le faisant, La Voie Originale fait « une violation constante du communiqué n°008/CNP/SG du 16 juillet 2015 qui interdit aux acteurs de la presse d’attribuer aux personnalités des titres et qualités qu’elles ne détiennent ni statutairement ni officiellement ». Mais, M. Lakpé reconnait qu’au bas de chaque article, le journal mentionne un nota bene, en guise de « clé de compréhension » indiquant que « Le Front populaire ivoirien dont il est question ici est le parti fondé par Laurent Gbagbo et présidé par lui, décision non contestée du 3ème Congrès extraordinaire du 30 avril 2015. A ne pas confondre avec le FPI artificiel voulu par le chef de l’Etat Alassane Dramane Ouattara et son appareil judiciaire au profit d’un groupe choisi par eux ».

En réponse à ces questions, nous avons remis à M. Lakpé et à ses collaborateurs, les documents de preuves suivants qui nous fondent à écrire ces informations :
1- Un courrier d’informations par lequel le FPI avait demandé une audience officielle au CNP pour porter à sa connaissance les résolutions de son 3ème Congrès extraordinaire, audience que M. Lakpé a refusée, arc-bouté sur ses certitudes décrites plus haut ;
2- Une copie de la résolution dudit Congrès portant exclusion de M. Pascal Affi N’Guessan du FPI ;
3- Une copie de la résolution du même Congrès portant interdiction à M Affi N’Guessan l’utilisation abusive du nom du Président Laurent Gbagbo ;
4- Une copie de la notification, par voie d’huissier, de toutes ces décisions à M. Affi N’Guessan ;

5- Une copie de la déclaration officielle du RDR datant du 11 août 2016. Par cette déclaration, le parti dont M. Alassane Dramane Ouattara reste aussi le président, même en violation de la Constitution, affirme noir sur blanc : « En analysant la nouvelle posture de Monsieur Affi N’Guessan, l’on se rend compte que, dans le fond, il veut se repositionner au niveau des militants du FPI. N’oublions pas que le FPI a deux tendances : la tendance dirigée par Affi N’Guessan et celle conduite par Abou Drahamane Sangaré » (Signé, Joël N’Guessan, Porte-parole du RDR).

En remettant ces documents de preuves, nous avons rappelé à M. Lakpé, qui semble bien suivre les affaires du FPI en justice, que du 30 avril 2015 (date de la tenue du Congrès extraordinaire) à ce 13 septembre 2016 (date de notre rencontre au CNP), aucun recours judiciaire n’a été exercé par personne contre les résolutions du 3ème Congrès extraordinaire du FPI. Mais, en tant que journal animé par des professionnels bien connus, nous mentionnons honnêtement et constamment que M. Alassane Dramane Ouattara et son appareil judiciaire tentent d’imposer M. Affi N’Guessan comme président du FPI. D’où le nota bene que M. Lakpé appelle à juste titre « une clé de compréhension » et que nous, à La Voie Originale, qualifions d’honnête «équilibre de l’information ».

En conclusion, nous avons prié M. Raphaël Lakpé de bien vouloir :
1- Noter que le communiqué du CNP qu’il dit « constamment violé » ne concerne pas le 3ème Congrès extraordinaire du FPI non contesté et que de ce fait, La Voie Originale ne l’a jamais violé ;
2- Arrêter d’étrangler les journalistes ou leurs journaux sur les conflits internes aux partis politiques parce que la liberté d’opinion et de presse garantie par la Constitution et par la loi sur la presse permet aux uns d’écrire que M. Affi est le président du FPI et aux autres d’écrire, en face, que M. Gbagbo est le président du FPI, selon leurs bords respectifs. Cela contribue à la pluralité des opinions que la loi oblige le CNP à garantir et à protéger. Cela permet en définitive au public qui est mâture de se faire ses propres opinions et choix ;
3- Cesser d’être plus royaliste que le roi en s’érigeant en « juge de l’application des peines », car M. Affi N’Guessan n’a exercé aucun recours contre les résolutions du 3ème Congrès extraordinaire du FPI.
Après toutes ces preuves fournies, M. Lakpé reprend la parole et pose la question impensable suivante : « Pourquoi vous avez appelé votre journal La Voie Originale alors que vous auriez pu l’appeler Le Fleuve ou La Rivière ? ». Nous avons déclaré que nous ne souhaitions pas répondre à cette question pour ne pas être désobligeant…

Le mercredi 14 septembre 2016, c’est-à-dire le lendemain de cette rencontre, nous recevions le courrier n°0958 du CNP portant « Mise en demeure » et signé de M. Lakpé, menaçant « de tirer les conséquences de droit » de notre « contestation manifeste de la décision de justice ainsi que de la violation persistance du communiqué du CNP ». En vérité, M. Raphaël Lakpé avait donc déjà préparé sa sanction liée plutôt à la création « La Voie Originale » que nous n’avons pas appelée « Le Fleuve » ou « La Rivière ». Et la suite des évènements allaient le prouver.

Le 22 septembre 2016, nous recevons une deuxième convocation cette fois « pour affaire en rapport avec la plainte du Directeur de publication du quotidien Notre Voie en date du 9 septembre 2016 ». Cette deuxième rencontre a eu lieu le 26 septembre. Là M. Lakpé nous signifie que « la Direction » de Notre Voie a porté plainte parce que, selon cette direction, « Les lecteurs de Notre Voie confondent leur journal et La Voie Originale », et que « cela porte préjudice à Notre Voie ».

Nous exigeons une copie de la plaindre pour y répondre aussi par écrit. M. Lakpé refuse de nous la donner. Nous n’avons jamais su si cette plainte émane vraiment du « Directeur de publication » ou de « la Direction » de Notre Voie ! Mais ce jour-là aussi, M. Lakpé nous a demandé à nouveau pourquoi nous n’avons pas créé « Le Fleuve » ou « La Rivière » en lieu et place de La Voie Originale…

Chers consoeurs et confrères,
Nous retraçons toutes ces péripéties pour montrer combien nous sommes persécutés par Raphaël Lakpé depuis le 7 septembre 2016, date de la parution du premier numéro de La Voie Originale. La sanction arbitraire, barbare et infondée qu’il vient d’infliger à ce journal d’un mois d’âge a un seul but : aider Alassane Dramane Ouattara et son allié, Affi N’Guessan, à effacer le nom de Laurent Gbagbo et à tuer toute voix contraire en Côte d’Ivoire. Cette œuvre d’hercule préoccupe tellement M. Lakpé qu’il n’hésite pas à prononcer une sanction politique, en l’absence de toute faute professionnelle. Dans cette période où son mentor veut imposer une dangereuse Constitution aux Ivoiriens, M. Raphaël Lakpé a trouvé le moment propice pour sévir. Nous ne nous laisserons pas faire parce qu’il n’est pas à son premier essai :
• En 2012, M. Lakpé avait exigé aux journalistes de ne plus associer le prénom « Dramane » au nom « Alassane Ouattara ». A la question de savoir ce que signifiait le slogan « ADO Solutions », M. Lakpé avait répondu : « Cela peut vouloir dire Alassane Dominique Solutions » ! Les journalistes ne l’ont pas suivi ;
• En 2013, M. Lakpé avait fermé tous les journaux proches de l’opposition qui refusaient de cesser de donner le titre de Premier ministre au Professeur Aké N’Gbo et celui de ministre à chaque membre du dernier gouvernement du Président Laurent Gbagbo. Cette affaire s’est achevée de façon honteuse au cabinet du président de la CDVR, M. Charles Konan Banny, qui a demandé à M. Lakpé de retirer son communiqué et ses sanctions infondées ;
• Depuis la suspension de La Voie Originale, des cadres du RDR exaspérés, pour des raisons qui leur sont propres, nous apprennent que « M. Lakpé, pour avoir été le premier journaliste ivoirien à traiter M. Alassane Dramane Ouattara de Burkinabé, fait aujourd’hui du zèle pour se faire pardonner et avoir un poste plus important ».

Si cela est vrai, nous souhaitons que M. Lakpé, le journaliste professionnel qui a guidé nos premiers pas dans cette profession, fasse le zèle dans un autre domaine que celui des atteintes grossières à la liberté de la presse. Nous voulons continuer à garder de lui l’image du formateur qu’il a été pour nous. Merci d’avoir fait le déplacement pour écouter nos angoisses et notre indignation.

Pour la Direction Générale de LG’Editions
Le Directeur de Publication de La Voie Originale
César ETOU