Scandale/ Endettement massif : La Côte d’Ivoire lève 1 140 milliards de FCFA (près de 2 milliards de dollars) sur les marchés financiers

Scandale/ Endettement massif : La Côte d’Ivoire lève 1 140 milliards de FCFA (près de 2 milliards de dollars) sur les marchés financiers internationaux.

Au centre, le Premier ministre ivoirien Amadou Gon Coulibaly, lors de son périple européen et américain, du 1er au 8 juin en France, en Grande Bretagne, et aux États-Unis.

La Côte d’Ivoire, sans aucun doute, s’endette dangereusement et vit à crédit sous le régime d’ Alassane Ouattara.

Elle vient de lever près de 2 milliards de dollars sur les marchés financiers internationaux selon le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly.
La Côte d’Ivoire a réussi à lever quelque 2 milliards de dollars en fin de semaine dernière (l'équivalent de 1 140 milliards de FCFA) en deux tranches (1,2 milliard de dollars sur 16 ans au taux de 6,125% et 625 millions d’euros sur 8 ans à 5,125%).
Pour séduire les investisseurs, une importante délégation gouvernementale ivoirienne (composée du Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, du secrétaire général de la Présidence de la République Patrick Achi, du ministre chargé de l’Économie et des Finances Adama Koné, du ministre du Budget Abdourahmane Cissé, de la ministre du Plan Kaba Nialé et du ministre de l’Énergie Thierry Tanoh) s’est rendue du 1er au 7 juin à Paris, Munich, Francfort, Londres, New York et Boston.

C’est la troisième fois (après les émissions d’obligation d’Eurobond en 2014 et 2015) en l’espace de quatre ans que le régime d’Alassane Ouattara a recours aux marchés financiers internationaux pour financer le budget national.
Les mutineries à répétition de ces derniers mois ni de la chute des cours de la fève de cacao n’ont pas découragés les investisseurs selon le Premier ministre ivoirien.
Cinq ans après l’obtention de l’initiative Pays pauvres très endettés (PPTE), la Côte d’Ivoire est en passe d’atteindre son niveau de dette d’avant PPTE.
Candidat à l’élection présidentielle de 2010, Alassane disait à qui voulait l’entendre pour les rassurer sur le financement de son programme chiffré à 10.000 milliards de Fcfa sur cinq ans : « Je sais comment trouver l’argent, je suis où trouver l’argent, faites moi confiance, je suis économiste, mon rôle est de trouver l’argent ».
Aujourd’hui, on sait comment le président du Rassemblement des républicains (RDR) au pouvoir à Abidjan comptait s’y prendre pour financer son programme : Endetter massivement la Côte d’Ivoire et laisser cette lourde dette aux futures générations.
Pourtant, les institutions de Bretton Wood ont déjà mis en garde la Côte d’Ivoire sur ce recours systématique à l’endettement extérieur. Dans le rapport de sa huitième revue de la facilité élargie de crédit publié en mars 2016, le Fonds monétaire international (FMI) tirait la sonnette d’alarme :
« Les services du FMI ont appelé à adopter une attitude prudente vis-à-vis des emprunts sur les marchés. Une nouvelle analyse de viabilité de la dette indique que la Côte d’Ivoire reste exposée à un risque modéré de surendettement ».
Un risque certes modéré d’explosion de la dette, mais réel. En effet, en obtenant en juin 2012 le point d’achèvement de l’initiative Pays pauvres très endettés (PPTE), la Côte d’Ivoire a bénéficié d’un allègement de sa dette extérieur par les bailleurs de fonds à hauteur de 4.090 milliards francs Cfa. Ce qui a ramené la dette qui était de 6.264 milliards en 2011 à un peu plus de 2.000 milliards de francs Cfa.
Mais en l’espace de quelques années, la dette extérieure a repris du volume. Selon la direction de la dette publique, le stock de la dette extérieure s’élevait à 4.249,3 milliards (52,1% du stock de la dette publique) en juin 2016. Le FMI précise de son côté que la dette extérieure cumulait à 5.433 milliards francs Cfa à la fin de l’année 2016. Une somme qui se rapproche dangereusement au niveau de la dette lorsque la Côte d’Ivoire a bénéficié de l’initiative PPTE.

Certains observateurs jugent incompréhensible cette propension congénitale à solliciter des emprunts pour financer le budget de l’Etat. C’est le cas de l’ancien ministre Gnamien Konan, qui a été dans les gouvernements successifs d’Alassane Ouattara de 2011 à novembre 2016 :
« Mon pays est le seul pays au monde où l’endettement est une grâce. 10 milliards par-ci, 100 milliards par-là, 900 encore… C’est de la performance et de l’exploit même ! On s’en réjouit. On dirait, crédit, c’est tout ce qu’ils ont appris à l’école, ces banquiers ! », ironisait le député de Botro le 26 avril 2017.
D’autant plus que d’autres options existent. Entre autres une meilleure gestion des recettes fiscales, la suppression des marchés de gré à gré, une gestion plus transparente de la manne pétrolière, la réduction du train de vie de l’Etat, la maitrise des dépenses publiques, la lutte contre la fraude et la corruption, etc.
Selon le Professeur Mamadou Koulibaly, professeur d’économie à l’Université, recourir systématiquement à l’endettement extérieur pour financer le budget national, c’est faire preuve de peu d’imagination et de peu de créativité.
« L’augmentation des investissements publics – marqués par une flambée des marchés gré à gré qui ne profitent pas à la majorité des entreprises nationales – liés à l’endettement massif conduit à une croissance appauvrissante », martèle le président de LIDER.
Comme quoi, une croissance, même avoisinant les deux chiffres, mais basée sur un endettement massif est incapable de réduire la pauvreté et les inégalités sociales.

Eric Lassale