Série "Nos héros oubliés": Portrait de Marie Sery Koré, 1ère résistante de Côte d’Ivoire

Par Ivoirebusiness - Portrait de Marie Sery Koré, 1ère résistante de Côte d’Ivoire.

Marie Sery Koré, 1ère résistante de Côte d’Ivoire.

Après ZOUKOU GBEULI, voici le portrait de la première femme résistante de Côte d’Ivoire, elle aussi originaire de Daloa.
Après elle, nous irons à Gagnoa pour vous parler de Victor Biaka Boda, Kragbé Gnagbé, et Adrien Deignan Bailly, tous des devanciers du Président Laurent GBAGBO, lui-même originaire de cette région.
Un document signé Nina olga Boro et publié par Ephrem Biaka Boda Kobri pour Ivoirebusiness dans la série « nos héros oubliés ».

PREMIERE PARTIE
De son nom de jeune fille Zogbo Céza Galo Marie est née vers 1912, elle est originaire du village de Gossa dont le regroupement, avec Krakra, a donné naissance à une agglomération rurale dénommé Gokra.
Marie Sery Koré est une figure historique féminine de la lutte émancipatrice de la Côte d'Ivoire à l'aube de son indépendance.
Femme de stature nationale, Marie Sery Koré, était l'une des premières Amazones du RDA qu'un sondage d'opinion publique réalisé par Radio Yopougon en Février 2004, a consacrée comme étant la 'femme la plus célèbre de Côte d'Ivoire, des années 40 à nos jours" devant les trois premières Dames du pays.
Jeune fille venue à l'aventure, en Basse-Côte, elle va attirer sur elle les regards d'un Français amoureux des belles femmes africaines. Or justement, Marie Galo ne manquait pas d'atouts dans ce registre: belle femme, à l'allure svelte, au cou légèrement long et strié (comme pour moi là lolll) et au teint d'ébène, elle a séduit ce jeune Français qui vivant à Abidjan, sans tarder, celui-ci la prit en mariage.
A l’avènement du Rassemblement Démocratique Africain (RDA) un mouvement politique de libération des peuples Africains exploités au Sud du Sahara, mouvement fondé par Felix Houphouët-Boigny et ses compagnons, Marie Galo choisit de le suivre ainsi que le RDA qu'il a créé.
Ce choix délibéré lui valut le divorce d'avec son mari. Et d'un. Et de deux, elle récupéra plus tard, pour en faire son époux en secondes noces, le sieur Séry Koré René, agent des P.T.T, licencié lui aussi par l'administration coloniale pour son appartenance au nouveau parti créé: le RDA.
Affaire à suivre .......
il y aura une incroyable histoire d'amour, cette femme est vraiment formidable
DEUXIÈME PARTIE
Apres son divorce, Marie Galo montre de grandes qualités de militante convaincue pour le RDA. Ainsi, elle fut nommée présidente du comité Féminin du PDCI à Treichville.
Mais parallèlement à son rôle de responsable des femmes du PDCI, à Treichville, elle y avait construit un alocodrome accueillant les hommes de toutes les couches socioprofessionnelles. On disait, à l’époque « Aloco léké léké … Tchègbaka a lié, commis a lié », c'est-à-dire : « Aloco, manger de célibataires, manger de commis ».
Cet alocodrome, précurseur des maquis qui ont fait leur apparition dans les années 70, à l’avènement du tourisme en Côte d’Ivoire, était tenu par des jeunes filles de sa région natale. Et elle les supervisait. Un jour, elle y remarqua un homme d’une rare beauté, très assidu, il faut dire, en ces lieux : c’était Sery Koré René. Elle en tomba amoureuse. Ironie du destin. Les deux personnes avaient connu un sort identique : remerciées par le colon pour avoir choisi de militer dans le RDA.
Femme émancipée (je n’ai pas dis émergente lollll), Marie Galo alla droit au but en déclarant ses sentiments à Sery Koré René, Et ce fut le début d’une idylle qui allait se terminer par une vie de couple déclarée. Comme Sery Koré René était déjà marié, Marie Galo jouant franc jeu, lui demanda de faire venir sa première épouse. Cette dernière avait pour nom MEUNDE. Sery Koré René la fit venir en lieu convenu. Marie Galo se présenta. Sans autre forme de procès, à sa future rivale, lui avouant que Koré René, qu’elle aime aussi, était désormais leur époux, à elle deux.
Notre informateur ajoute que sur le champ, elle remit des complets de pagne et autres objets de valeurs à MEUNDE pour l’apaiser et ainsi obtenir son consentement. Le couple polygame vécut une vie en harmonie, sans accroc.
Vu son stature de femme politique, Marie Galo fut, aux yeux du public, la seule épouse officielle de Sery Koré René. C’est le coté jardin de Zogbo Ceza Galo Marie.
Affaire à suivre ......
Le combat d'une grande guerrière
TROISIÈME PARTIE
Le divorce, à la demande de son mari colon, pour Marie Galo et le renvoi de son service pour Sery Koré René étaient l’illustration patente du comportement méprisant de ceux qui pensaient être venus chez nous pour nous apporter la lumière de la civilisation occidentale.
Elue présidente du comité Féminin du PDCI à Treichville, à partie de 1947, Marie Koré a participé, à la tête des femmes, aux manifestations devant le palais du Gouverneur Péchoux, comme à celles qui eurent lieu les 23, 24 et 25 décembre 1949. En effet, c’est elle qui fut à la tête des femmes qui marchèrent sur Grand-Bassam où des militants et non des moindres du PDCI avaient été incarcérés, sans jugement. Ce sont, pour ne citer que les plus connus : Bernard Dadié, Mathieu Ekra, Jacob Wiliam, Jean Baptiste Mokey, Albert Paraiso, René Séry Koré, Lama Kamara, Phillipe Veira, …
Lorsque ces femmes, conduites par Marie Koré, arrivèrent à Grand-Bassam, leur intention était de manifester devant le palais de justice et la prison civile pour que leurs maris soient libérés ou, à tout le moins, qu’ils soient jugés dans un délai rapproché. Les militaires français et les gardes chiourmes ne l’entendaient pas de cette oreille. Pour les repousser, ces militaires français utilisèrent des lance-eaux à l’entrée du pont sur la lagune OULADINE. Mais rien n’y fit. Il parait même que Marie Koré aurait administré une magistrale paire de gifles à un des colons zélé et excité qui empêchait les femmes d’avancer.
QUATRIEME ET DERNIERE PARTIE
Lorsqu’elles eurent raison de cet obstacle majeur, elles de dirigèrent alors vers les lieux cités plus haut. Leurs mouvements de protestation avaient porté, car trois mois plus tard, les prisonniers politiques du PDCI passaient en jugement et furent condamnés à des peines atténuées. C’est en souvenir de cet acte héroïque des femmes, ce 25 Décembre 1949, que le pont sur la lagune Ouladine fut baptisé : le pont de la victoire.
Quelques temps après, Marie Sery Koré décédera à l’hôpital Annexe de Treichville, d’un panaris.
Pour ses parents, cette mort parait suspecte : souffrant d’un panaris au doigt, elle s’est rendue en ce lieu pour se faire soigner. On l’aurait incisée en lui faisant une piqûre pour, dit-on, une anesthésie locale. Elle serait morte dans les heures qui ont suivi cette intervention médicale.
D’aucuns disent que c’est plutôt de l’ether qu’on a administré à Zogbo Céza Galo Marie pour la tuer, elle qui avait osé braver l’Administration coloniale, ici à Abidjan d’abord et ensuite à Grand-Bassam. Or à cette époque, l’hôpital annexe de Treichville était tenu, en grande partie, par des médecins Européens. On se perd aujourd’hui en conjectures sur ce décès.
Voici ce qu'avait dit la patriote Marie Koré avant son assassinat:
« Toutes les misères que l’on nous fait subir actuellement, c’est à cause de l’argent que les colonialistes tirent de notre pays. C’est pour cela que l’on emprisonne nos maris, nos frères et nos enfants, c’est pour cela qu’on nous impose de façon exorbitante… »
FIN.
Une telle dame, première amazone de notre histoire politique récente, elle qui eut l’honneur de figurer sur un des billets de banque (1000 F cfa) mis en circulation dans l’espace UEMOA, par la banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), elle que l’on cite en bonne place dans les Annales de PDCI-RDA, est presque tombé dans l’oubli. Aucun monument ni artère de nos villes ne portent son nom.
Gossa, son village natal, n’a pu bénéficier, à titre posthume, de la part des autorités de ce pays, de quoi que ce soit.
Il n’est jamais trop tard pour bien faire, un devoir de reconnaissance commande que dignitaires du PDCI-RDA d’honorer la mémoire de cette illustre dame, en posant un acte, quel qu’il soit, dans son village natal. Ainsi, elle n’aura pas milité inutilement pour la défense des intérêts de son pays
Quelle leçon, camarades, pour ceux qui prétendent qu’il n’y a rien à faire contre le colonialisme. Non, le colonialisme n’est ni invulnérable, ni invincible !

Auteur Nina olga Boro
Publié par Ephrem Biaka Boda Kobri pour Ivoirebusiness dans la série « nos héros oubliés »