Retour sur un conseil négligé dans le contentieux pétrolier CI-Ghana: Que de regrets ! Par Dapa Donacien

Par IvoireBusines/ Débats et Opinions - Retour sur un conseil négligé dans le contentieux pétrolier CI-Ghana. Que de regrets ! Par Dapa Donacien.

Lundi 16 octobre 2017. Alassane Ouattara effectue une visite d’amitié et de travail de 48 heures à Accra. L`occasion d’insuffler une nouvelle dynamique à la coopération ivoiro-ghanéenne, à travers la signature d`un « Accord de Partenariat Stratégique».

Liens étroits entre Koulango et Ashanti.
Contentieux pétrolier entre la Côte d'Ivoire et le Ghana : Et si l'on activait les liens de parentés entre les peuples ivoiriens et ghanéens ?

S'il est vrai que la plupart des conflits en Afrique ont pour origines les contradictions tribales, qui se transposent ensuite sur le champ politique, d'autres conflits sont liés à l'exploitation des richesses naturelles au niveau des frontières entre Etats. Les voies de solution proposées çà et là, selon nous,doivent transcender les considérations juridictionnelles pour se projeter dans l'histoire la plus lointaine possible pour découvrir la communauté de destin qui puisse unir les peuples de part et d'autre de la frontière.

Or que constatons-nous, sur la base d'une classification des ethnies selon une démarche arbitraire, les premiers contingents d’''historiens" africains, jouissant de la confiance quasi aveugle des Etats nouvellement indépendants, ont défini, on ne sait par quelle alchimie, des clichés tout aussi arbitraires que subjectifs.
Chaque pays a avalé des concepts divisionnistes sortis des chapeaux de ces indigènes mal formés, prétendument qualifiés d'historiens ou de sociologues, dont les affirmations avaient valeur de parole d'évangile, et insusceptibles d'être remises en cause. Résultat des courses, à peine indépendants, voilà ces pays déchirés par des conflits alimentés par les fausses thèses de ces historiens et sociologues.
Prenons le cas la Côte d'Ivoire pour illustrer notre propos.
Dans nos écoles, jusqu'à ce jour, la rhétorique érigée en propagande, nous fait avaler des faussetés du genre:
- Les Bétés, les Dida, les Gouro, les Yacouba et les Guéré viendraient du Liberia. Et les Libériens, d'où viennent-ils ? Nos fameux historiens et sociologues ne soufflent un traitre mot. Ce n'est pas important de le savoir. Ils sont libériens. Un point, un trait.
- Les Abron, les Baoulé (wawolé), Agni, Abouré, Attié, les Ebriés, viendraient du Ghana. Et les peuples du Ghana, d'où viennent-ils ? Nos fameux historiens et sociologues ne soufflent un traitre mot. Ce n'est pas important de le savoir. Ils sont ghanéens. Un point, un trait.
- Les Koulango, Sénoufo, Koyaka... viendraient de la Haute Volta. Et les peuples de la Haute Volta, d'où viennent-ils ? Nos fameux historiens et sociologues ne soufflent un traitre mot. Ce n'est pas important de le savoir. Ils sont voltaïques. Un point, un trait.
- Les Malinkés viendraient du Mali et de la Guinée. Et les peuples du Mali et ceux de la Guinée, d'où viennent-ils ? Nos fameux historiens et sociologues ne soufflent un traitre mot. Ce n'est pas important de le savoir. Ils sont maliens ou guinéens. Un point un trait.
Et de caricature en caricature, nous en sommes arrivés à rythmer notre quotidien de tribalisme, que ce soit dans nos quartiers ou au travail, dans l'Administration publique. Ne soyons pas dupes ni hypocrites en faisant semblant de ne pas voir l'émergence du repli ethnique et tribal, menaçant d'exploser ce territoire appelé la Côte d'Ivoire.
C'est un échec collectif qu'il nous revient de reconnaître sans faux fuyant. L'important, c'est d'en avoir assez, et être tous habités par un réel désir d'en sortir. Bien entendu, les degrés de responsabilité ne sont pas au même niveau. Les groupes ethniques dont sont issus les chefs d'Etat successifs sont le plus à blâmer pour n'avoir pas su promouvoir le sentiment d'appartenance de tous à la même Nation. Ils se sont contentés de marcher dans les pas des pseudos historiens et sociologues en amplifiant les faux clichés.
Mais là où cette caricature est ridicule, c'est quand ces auteurs ignorent ce qu'en pensent les populations de l'autre côté de la frontière.
Rare sont par exemple les ivoiriens qui savent que 34 villages au Ghana parlent couramment le Koulango, certes avec un accent influencé par des contingences locales. Rare sont les ivoiriens qui savent que le président sortant, John Dramani Mahama (natif de Bolé au nord du Ghana) parle le Koulango.
Et à écouter ces Koulango du Ghana, une frange (celle du nord du Ghana) estime que les Koulango de Côte d'Ivoire, ont pour origine le Ghana. Quant à ceux du centre, une partie des Asante, notamment le clan Oyoko, c'est-à-dire la dynastie familiale qui se succède sur le trône à Kumasi, elle est plutôt convaincue que c'est la Côte d'Ivoire qui est leur territoire d'origine, notamment Saye, une ancienne cité-Etat (réduite, de nos jours, à un seul village, situé à 47 Km de Bouna).
Pour information, il convient de faire, historiquement, une nette distinction entre le Royaume de Bounkani et le Royaume de Saye. Les deux royaumes Koulango ont coexisté dans le passé en bonne intelligence, avant le dépeuplement massif de la cité Etat de Saye.
Mais quoique dépeuplé, sur les vestiges la cité-Etat (la partie non engloutie par le parc de la Comoé), a survécu le village Saye.
Et jusqu’aujourd’hui, le Roi du Bounkani et le chef de ce qui reste du village Saye antique, ne peuvent pas se regarder face-à-face. Lors d’une cérémonie à laquelle les deux autorités coutumières doivent assister, un pagne en guise de séparateur doit être dressé entre les deux. Ils peuvent se parler, mais le pagne les empêche de se voir l’un et l’autre.
L’institution de cette pratique date du temps du fondateur du Royaume Koulango de Bounkani et de la fondatrice du Royaume Koulango de Saye.
Ouvrons une parenthèse pour mentionner que le peuple Koulango préexistait sous cette dénomination avant non seulement la formation de la cité–Etat de Saye, mais aussi du royaume de Bounkani. Ce sont deux entités organisationnelles à ne pas confondre.
Nos recherches approfondies nous ont permis de remonter jusqu’aux origines du peuple Koulango, au Berceau de l’Humanité, notamment aux abords des fleuves « Kolango et Kwango » dans l’actuelle République Démocratique du Congo (RDC). Au delà de la similitude au niveau phonétique (Koulango-Kolango-Kouango), les Koulango ont conservé les mêmes habitudes alimentaires que les peuples de la province du Kwango à savoir: le manioc, le haricot et l'igname. Nous y reviendrons dans un autre extrait de notre livre.

Sagissant des rapports entre Bouna et Saye, de l’explication de source officielle recueillie à la cour Royale du Bounkani à Bouna et confirmé à Saye, Bounkani accompagnée d’une troupe importante de cavaliers, en visite de courtoisie était venu à Saye faire la connaissance de Nangbolo Dêwê, la reine de la cité-Etat Koulango de Saye.
N’ayant pas été reçu par le leader des Koulango de Saye ( la reine Nangbolo Dêwê), parce que la reine étant dans sa période de menstrues, Bounkani avait juré que les deux ne pourraient plus jamais se voir dans la vie pour une raison simple argumentée par Bounkani.
Etant deux souverains autonomes engagés dans la bataille, chacun dans sa direction, pour la même cause, à savoir la protection de leur peuple respectif contre un ennemie commun (les mandés), il se pourrait qu’ils ne sortent pas vivants de cette guerre. C’est la raison, pour laquelle, Bounkani estimait que la seule occasion pour les deux souverains de se connaître était celle qu’ils viennent de rater. Le disant, c’était une forme d’adieu, avant de se retirer à Gbona (Bouna) siège de son royaume, tandis que la redoutable guerrière Dêwê veillait sur son peuple à partir de Saye.
Mais plus tard, après le règne de Dêwê, l’aire géographique de Saye va connaître une saignée démographique et provoquer le déplacement de sa population.
En effet, sont partis deux types d’immigrations. D’abord l’une massive vers le Sud, pour fonder Bondoukou, et tous les villages Koulango du Gontougo, dans l’actuelle Côte d’Ivoire.
L’autre volet de cette immigration Koulango (moins massive mais plus pénétrante), est parti de Saye, traversant le Volta Noir (fleuve à la frontière Ghana Côte d’Ivoire actuelle), puis descendant au sud, pour s’installer définitivement au Centre du Ghana actuel. C’est là que San Kofi, connu sous le nom indistinctement de Sai Tutu / Zaay Tutu / Zay Tutu / Osai Tutu / Osei Tutu, Osei Kofi Opemsoo Tutu, va vaincre définitivement jusqu’à nos jours, la suprématie du Royaume de Denkyira, qui théorisait les différents peuplements des lieux.
Ainsi, R. Austin Freeman (11 April 1862 – 28 September 1943) un espion britannique envoyé en éclaireur dans ce territoire par la Reine d’Angleterre (avant la période coloniale), achève de convaincre sur la qualité du leadership de San Kofi alias, Osei Tutu après avoir établi l’identité de l’homme.
« The king to whom Bosman refers as « Zay” and who is called by Bowdisch “Sai Tootoo” by Dupuis “Sai Tootoo” and by Ricketts “ Osai Tootoo” appears to have not only a redoubtable worrior, but a man of considerable administrative talents, and is character of prime importance in the history of Ashanti.”
Extrait de “Complete Works of R. Austin Freeman (Delphi Classics).
Traduite en Français, la conclusion de Austin Freeman nous révèle la vérité cachée de tous les temps et que nous exhumons maintenant, parce que justement, c’est le moment choisi par l’Eternel afin que le Monde sache que du territoire qui s’appellera plus tard Côte d’Ivoire, est parti un valeureux fils, pour donner naissance à un respectable royaume sur un territoire qui s’appellera plus tard Ghana, pays dont le Royaume Asante couvrait plus de 70% de sa superficie actuelle, au moment de l’indépendance.
Quant au territoire actuel de la Côte d’Ivoire, la Dysnastie Oyoko ayant succédé à Osei Kofi avait conquis toute la façade Est du fleuve Comoé, du nord au sud en balayant toute la partie qui fait aujourd’hui office de frontière entre le Ghana et la Côte d’Ivoire sur toute la longueur, avant que le colonisateur britannique, par son armée, ne vienne briser l’imperium du Royaume Asante.
Voilà, l’une des manifestations du génie créateur du peuple Koulango. Le Royaume Asante et son fondateur Osei Tutu sont désignés par les hollandais à juste titre « THE ZAAY » en référence à leur originaire primaire : le Royaume de Saye. Rappelons que, plus que les Britanniques, les Hollandais connaissaient mieux les asante et leurs origines. En effet, avant la pénétration anglaise, la Gold Coast était un protectorat portugais. Les Hollandais chassent les portugais et occupent la Gold Coast en 1642. A cette époque, les Denkyira, royaume alimenté par les hollandais en armes en échange d’esclaves avaient soumis le contingent Koulango dirigé par Saye Kofi originaire de Saye. Et c’est ce groupe que les esclavagistes hollandais appelaient Zaay. A partir de 1800, les anglais ont remplacé les hollandais, sous le manteau de colonisateur.
Les gens de San « Asante » avaient également pour synonyme « The Zaay », en tant qu’entité unique.
C’est plus tard, que les anglais vont substituer à cette appellation, « Say », puis « Sai », « Osai », et enfin, « Osei ». Après la victoire sur les Denkyira, les Asdante ont contraint les Akwamu (Abron) pourchassés, à migrer au 18ème Siècle sur leur emplacement actuel, sur les terres des Koulango.
Cette période de migration, à partir de la cité-Etat Saye, par l’ancêtre des Asante vers l’Asantemanso (l’Etat Asante) est antérieure à l'exode des différentes composantes du groupe Akan (Wawolé ou Baoulé, Anyi ou Agni, Akwamu ou Abron, Attié, Tchaman ou Ebrié, Abouré, N'Zima ou Apollo) dans ce qui deviendra plus tard la Côte d'Ivoire.
A cette époque, il a fallu à Osei Tutu de faire application des instructions apprises auprès des dignitaires Koulango de la cité-Etat de Saye, pour implémenter un modèle d’Etat Asante, dont s’inspirent encore les ghanéens pour la stabilité politique.
Ainsi, Freeman pouvait s’exclamer de l’intelligence et des talents en administration de San Kofi alias, Sai Tutu ou osei Tutu :
« Le roi auquel Bosman se réfère sous l’identité de « zay », et qui est appelé par Bowdich « Sai Tootoo », par Dupuis « Sai Tootoo », et par Ricketts “ Osai Tootoo”, n’est pas seulement un redoutable guerrier, mais un homme doté de talents administratifs considérables et a une influence de première importance dans l’histoire Ashanti ».
Extrait de “Complete Works of R. Austin Freeman (Delphi Classics).
En souvenir à la fois de leurs origines à la cité-Etat de Saye et en hommage à l’œuvre gigantesque de Sai Tutu, le peuple Koulango a restauré le Royaume Saye dont Sa Majesté Dagbolo Saye 1er, est le Roi du peuple Koulango de la région du Gontougo. Son palais royal est à Laoudi-ba, siège du royaume.
Soulignons que dans le zanzan, il y’a d’une part le Royaume Koulango du Bounkani et d'autre part le Royaume du peuple Koulango du Gontougo. Et les deux rois entretiennent des liens fraternels sans rivalités.
Etant entendu qu’il n’y avait pas de rivalité entre le Royaume de Saye et le Royaume de Bounkani dans l’antiquité, il ne saurait y en avoir maintenant. Et c’est à l’honneur des Koulango du Bounkani et ceux du Gontougo.
A l'instar des Abron dont la frontière entre la Côte d'Ivoire et le Ghana n'a pas eu pour effet d'oublier la fraternité entre les Abron écartelés sur les territoires Ghanéen et Ivoirien, Koulango et Asante doivent magnifier les liens de fraternité. La victoire des Asante sur les Abron dans le passé, et la victoire plus tard des Abron sur les Koulango font des rapports entre Koulango et Abron des rapports dialectiques. La leçon de l’histoire à retenir, c’est que personne n’est jamais assez fort pour dominer éternellement. La roue tourne. Et l’une des manifestations de ce constat, c’est que des Denkyira, laminés au paravent par les asante, ont suivi par la suite les Abron pour dominer à leur tour les Koulango, ascendants des Asante. Faut-il s’attendre à une perpétuation du statut quo ou un renversement de situation ? Non, ni l’un, ni l’autre, parce que la Côte d’Ivoire indépendante autorise des rapports d’égalité entre Abron et Koulango .
L'exemple des rapports Asante, Koulango et Abron , s'ils sont bien entretenus, il serait difficile qu'il puisse y avoir la moindre intention de belligérance entre ces deux Etats voisins, à partir de cette frontière. Et c'est tout l’intérêt de cette contribution.

En effet, au moment où la Côte d'Ivoire et le Ghana se disputent « l'or noir » sur l'espace maritime commun, il ne serait pas sans intérêt que la diplomatie coutumière ghanéenne et ivoirienne, de part et d'autre de la frontière artificielle, se joigne les coudes et se fréquentent à travers les rois de la zone.
C'est alors que nous serions sûr que jamais, ce contentieux pétrolier, ne débouchera sur un conflit armé entre les deux États.
Car, en cas de conflit armé sur la frontière, les populations riveraines de part et d'autre seraient les victimes innocentes.
Alors, pourquoi ne pas encourager les rois et chefs traditionnels à se rencontrer pour geler ce conflit ? Avons-nous une chambre des rois et chefs traditionnels en Côte d'Ivoire pour jouer les figurants ou pour jouer son véritable rôle de rapprochement des peuples?
Ce n'est pas le Professeur Amoa Urbain qui dira le contraire.
Et si avec cette brève restitution de l’histoire entre Koulango et Asante, la thèse de monsieur Nicolas Sarkhozi trouvait encore des échos favorables dans la conscience de quelques africains complexés, alors il va falloir poursuivre l’exhumation du fabuleux potentiel d’intelligence africaine enfermée dans la méthodique entreprise de falsification de toute l’histoire africaine, dont malheureusement les historiens et anthropologues du continent se font complices.

Au regard de l'influence qu'exerce l'actuel roi des Asante sur le pouvoir exécutif du Ghana, dans la droite ligne de ses prédécesseurs, ne serait-il pas plus salutaire, parallèlement au Tribunal International du Droit de la Mer (TIDM), d'approcher le roi asante par ses homologues ivoiriens, qui se trouvent être ses frères ? Son Excellence Désiré Tanoé, président de la Chambre des Rois et Chefs Traditionnels de Cote d'Ivoire fut aussi ambassadeur sous Félix Houphouet Boigny. Ne l'oubliant pas.

Mais pour jouer ce rôle, il faille que la Chambre des Rois et Chefs Traditionnels de Côte d'Ivoire, commence d'abord à incarner le sérieux pour mériter la confiance et le respect de leurs homologues du Ghana, en tête desquels se trouve l'incontournable roi Asante (Ashanti). Le seul roi au Ghana qui peut s'autoriser à décréter un couvre-feu sur son territoire et ses administrés s'exécutent y compris le Chef de l'Etat.
La preuve en a été donnée de le prouver, le 20 janvier 2017. Par application d'un édit de la cour royale asanti, toute la ville de Kumasi a déserté les rues, magasins, services publics et s'est endormie à partir de 15h, alors que le couvre feu devait commencer de 19h à 4 h du matin. La présence a Kumasi à cette même date des président Akufo Addo, John Dramani Mahama, Jerry John Rawlins et John Agyekum Kuffor, venus présenter leur civilités au roi Asante,n'a pas donné lieu à la moindre exception au caractère obligatoire et exécutoire de l'ordre royal.

Voilà ce que c'est, un roi qui sait se faire respecter de tous.
Extrait du Livre de K.Dapa Donacien
« La fabuleuse épopée Koulango exhumée »
(publication en cours)
dapadonacien@yahoo.fr
Abidjan, Côte d’Ivoire