Rencontre à La Haye/ Koua Justin: « Ce que le Président Gbagbo m’a dit »

Par Le Temps - Rencontre à La Haye. Koua Justin « Ce que le Président Gbagbo m’a dit ».

Koua Justin, SGA du FPI, le vendredi 5 janvier 2018 à La Haye à la Cour pénale internationale.

Après votre sortie de prison, vous êtes reçu à La Haye par le Président Laurent Gbagbo…

Je m’honore de l’amitié que le Président Gbagbo m’a faite. Ce fut pour moi un grand honneur de le rencontrer et d’échanger avec lui à deux reprises. D’abord le vendredi 5 janvier 2018 de 13 heures à 16 heures 45 minutes et le samedi 13 janvier de 13 heures à 16 heures 45 minutes. Je devrais lui dire merci pour l’assistance qu’il m’a apportée pendant mon séjour carcéral. Il n’a cessé un seul instant de veiller à ce que je ne manque de rien : livres, vêtements, argent. Comme un Grand Maître, il m’a aidé à survivre dans ces lieux. Je devrais donc lui témoigner toute ma gratitude et toute ma reconnaissance pour ces gestes d’amitié à mon endroit. C’est ce que je suis allé faire.

Et pourtant, certains font le pied de grue depuis des années…

C’est leur problème. Et chacun a son problème. Je ne me mêle pas de ce qui ne me regarde pas. Le Président reçoit qui il veut, quand il veut et comment il veut. Lui seul est maître de son calendrier.

Quelle était l’ambiance ?

Que de joie ! Oui, la joie était à son comble ! Vous savez, j’ai vu ce grand homme se battre pour la dignité, l’honneur et la grandeur de la Côte d’Ivoire, et, ce souvenir est pour moi la source d’une joie orgueilleuse. Donc mon cœur a tressailli de joie à sa vue. Avant notre rencontre, il n’y avait pas un seul de mes jours où ses discours ne venaient émouvoir mon cœur et m’arracher des larmes délicieuses. Et quand je l’ai rencontré, je l’ai écouté religieusement, je me suis laissé enseigner, et, il m’a fait trouver le bonheur. Son regard, son cri, son geste, à ma vue, m’ont rendu la totale confiance, le courage et les forces nécessaires pour poursuivre notre combat commun. Je ne cesserai de puiser dans sa vision la chaleur et la vie.

Comment avez-vous trouvé le Président Laurent Gbagbo ?

J’ai contemplé ses traits augustes, j’ai vu l’empreinte des noirs chagrins auxquels tentent de le condamner les injustices des hommes. Dès lors, j’ai compris toutes les peines d’une noble vie qui se dévoue au culte de la vérité et de la justice.

Qu’est-ce que vous vous êtes dit ?

J’ai écouté le maître m’enseigner. Je me suis nourri dans son immense source intarissable de savoir. Que de sagesse ! Cet homme est un savant ! Un Grand Maître ! Une chance pour la Côte d’Ivoire et l’Afrique ! Il m’a enseigné que de tout temps, son combat a été celui de relever le pauvre peuple ivoirien qui, depuis tant d’années est dans la boue jusqu’aux épaules. Il m’a enseigné que de tout temps, son combat a été de briser tous les obstacles visibles et invisibles, physiques et métaphysiques dressés au-devant du peuple pour le conduire vers un avenir certain: la liberté, la souveraineté, la dignité. Il m’a enseigné que son souci est que les Ivoiriens ne demeurent pas de pauvres corvéables comme le souhaite l’oligarchie bourgeoise à la tête de notre pays. Je fus heureux d’effectuer ce pèlerinage important. Je suis maintenant initié à des mystères plus sacrés. Mon voyage à la Cpi a joué le rôle de rite de passage à l’âge adulte.

Que pense-t-il de ce qui se passe à Abidjan ?

Souffrez que je ne vous dise rien à ce sujet. Souffrez que je garde pour moi-même les analyses de Son Excellence Monsieur Gbagbo relatives à la marche de notre pays.

Est-il confiant de la suite de son procès ?

Tous ses visiteurs témoignent de sa grandeur d’esprit, de la hauteur de son moral, de sa dignité, au fond de sa cellule. Il ne compte point souiller la pureté de ses sacrifices. C’est pour vous dire qu’il est plus que confiant. Rassurez-vous, cher ami, calme au milieu de l’injustice, fort de sa conscience, se reposant sur la justice de sa cause, sur son courage indomptable, sur le pouvoir irrésistible de la vérité, il brave en souriant, les clameurs forcenées de ses ennemis, bien assuré de les couvrir de confusion et de sortir victorieux de cette lutte périlleuse.

Qu’est-ce qu’il dit des témoins qui ont défilé ?

Je ne sais pas ce qu’il dit des nombreux témoins à charge de Fatou Bensouda. On n’en a pas parlé. Mais ce que je sais et que les Ivoiriens doivent savoir, c’est que, parce qu’ils l’ont incriminé de leurs propres crimes, le Président Gbagbo sortira de la Cpi flanqué de vérité et de justice. Et je peux vous le dire avec certitude, ce n’est pas du tout un rêve, il est en train de sortir.

Vous a-t-il confié une mission ?

A moi, non, ça n’en valait pas la peine. Car je suis son disciple, je connais les enseignements du maître, je connais sa philosophie, je connais ses doctrines. Il me fallait juste me ressourcer, puiser davantage d’énergie en lui pour la suite de notre combat commun.

Quelle est la position du Président Gbagbo sur ce qui se passe au sein du Fpi ?

Que se passe-t-il au sein du Fpi à votre avis ? Ha ! Ok ! Vous faîtes allusion à la modernisation du parti ! Naturellement, il a encouragé la rénovation profonde du parti que nous avons engagé depuis le congrès de Mama. Pour lui, cette rénovation doit être continue, nécessaire et profonde. Sur tous les sujets, le parti doit être une force de proposition. Il faut peut-être un mouvement moins horizontal, plus vertical. Aussi, le parti doit demeurer un instrument de combat au service des aspirations du peuple de Côte d’Ivoire. La rénovation, selon le président, ça nécessite du courage, de l’humilité, la capacité de se remettre en cause. Nous sommes le plus grand parti de Côte d’Ivoire et nous devrons travailler à le demeurer. D’ailleurs, c’est incompréhensible qu’un tel grand parti n’ait pas de siège, malgré les subventions énormes de l’Etat que le Président Gbagbo a versé au Fpi comme au Rdr, au Pdci comme au Pit, au Mfa comme à l’Udcy pendant près de 10 ans. Nous n’avons aucun patrimoine, aucun matériel roulant. Nous n’avons même pas d’archives, donc pas de mémoire pour instruire la génération à venir sur la longue marche du parti. Des individus ont préféré s’enrichir et appauvrir le parti. Ceux qui se targuent aujourd’hui d’être de la bourgeoisie pauvre au point de s’activer à devenir les supplétifs politiques de Alassane Ouattara ont détourné tous les biens du parti à leur profit. Ce sont toutes ces questions préoccupantes que nous devrons résoudre pour le rayonnement de notre parti.

Pensez-vous que le président Gbagbo fait suffisamment confiance à Sangaré pour conduire de telles réformes ?

Bien-sûr que oui ! Le président a une confiance inébranlable en Sangaré. Il parle de lui avec passion, respect et considération. Sangaré a l’intelligence politique, la clairvoyance nécessaire et l’autorité appropriée pour conduire efficacement la modernisation du parti. Ce n’est pas fortuit que nous l’appelons «le Gardien du Temple ». Pour les esprits oisifs, le Temple dont il est le gardien serait un grand château où siégerait un gourou qui entretiendrait ses fidèles. Que non ! Le temple dont il est question, pour les esprits au combat, est la démocratie. C’est parce que Sangaré est un puissant doctrinaire de la démocratie qu’il est appelé ainsi. Il est le gardien de la démocratie en Côte d’Ivoire. Pour lui, la démocratie, non seulement réalise le droit de l’homme, mais elle tend aussi à procurer le bien des hommes, de tous les hommes. C’est toute la masse humaine, si pesante et si obscure, que la démocratie hausse à la lumière et au bien-être. C’est cette mission de gardien de la démocratie qui fonde tout l’engagement politique de Sangaré et son amitié avec Le président Gbagbo. Il ne fait évidemment pas partie de ces lâches qui, pour sauver leur vie, acceptent une capitulation ignominieuse en s’accoutumant au despotisme. Il s’est battu hier contre l’Aristocratie incarnée par le Pdci et il continue de se battre aujourd’hui contre le despotisme du Rdr pour arracher le Fpi à la trahison, le peuple à la détresse et à la faim. Il a donc l’entière et totale confiance du Président Gbagbo, président actuel du Fpi

Que pense-t-il d’Affi ?

Que voulez-vous que le Grand Maître pense de lui ? Si vous le connaissez, vous saurez qu’il n’est pas friand des débats de personne. Lui, il dégage la philosophie du combat, et chacun en fonction de ses capacités fait son choix. Il ne se lamente jamais parce qu’une de ses connaissances a fait le choix de la résignation, de la capitulation. Mais, il avance avec les déterminés. Car il est un homme déterminé au combat.

Que pense le Président Gbagbo de toutes ces mobilisations à travers le monde pour sa libération ?

Le président sait et est très conscient que de plus en plus l’Afrique s’éveille et se réveille pour sa souveraineté. Aujourd’hui, le combat pour la souveraineté de la Côte d’Ivoire et celle de l’Afrique porte son nom. Il en est fier. Mais la souveraineté de nos Etats africains demeure une de ses précieuses préoccupations. Il encourage et félicite cette prise de conscience collective.

Avez-vous rencontré Charles Blé Goudé ?

Absolument. Le vendredi 5 janvier 2018, de 11 heures à 13 heures. J’ai eu une séance de travail fructueuse, très enrichissante avec cet autre grand homme, leader du Cojep. Nous avons abordé de nombreux sujets relatifs à notre marche commune, le temps était certes court, mais nous nous sommes compris. Lui aussi, m’a donné des orientations judicieuses par rapport à notre combat commun.

Yacouba Gbané