Promotion de la Paix: George Weah parle de Gbagbo

Par Le Temps - Promotion de la Paix. George Weah parle de Gbagbo.

George Weah, Président de la République du Liberia. Image d'archives.

On le sait. La victoire a plusieurs pères. Et la défaite est orpheline. Cette assertion est d’autant plus vraie et d’actualité que depuis le 28 décembre 2017, date de l’élection de George Oppong Manney Weah à la tête du Libéria voisin, l’ancienne star du football africain est subitement devenue l’ami de tous les tenants du régime ivoirien. Si ce n’est pas Alassane Dramane Ouattara, le chef de l’Etat himself qui s’est découvert des relations amicales très anciennes avec le nouveau président libérien, c’est plutôt Soro Guillaume et Hamed qui prétendent entretenir tous les deux, des supposées connections avec le successeur d’Ellen Johnson Sirleaf. Et pourtant, lorsque le président Laurent Gbagbo recevait George Weah à la tête d’une forte délégation de huit personnes en audience au palais présidentiel du plateau le 16 décembre 2005, ils n’étaient pas nombreux comme aujourd’hui à parier sur l’avenir politique certain du ballon d’or africain. Elu aujourd’hui à la tête du Libéria après avoir longtemps bénéficié du soutien et suivi à la lettre des conseils avisés de Laurent Gbagbo, s’il y a un homme que George Weah a immanquablement regretté l’absence lors de son investiture le 22 janvier dernier et sa récente visite en Côte d’Ivoire, c’est bien évidemment celle de l’actuel pensionnaire de la prison de la Cpi. Et la déclaration faite par l’ancienne star du football africain le 16 décembre 2005 au sortir de l’audience que venait de lui accorder Laurent Gbagbo en dit long sur le drame intérieur que vit en ce moment le président libérien face à la déportation de celui-ci à la Haye. « … Je suis venu chez mon père Gbagbo, il m’a donné des conseils… Nous avons parlé de l’avenir du Libéria, et la nécessité de la paix au Libéria et dans toute la sous-région… Aujourd’hui, il faut oublier ce qui s’est passé et parler de la paix… Je retourne donc au Libéria pour délivrer le message de paix à tout le peuple », avait déclaré George Weah. Se prononçant sur la rébellion que la France venait d’imposer au président Laurent Gbagbo le 19 septembre 2002, voici ce qu’avait déclaré le ballon d’or africain, celui que Ouattara et ses hagiographes présentent aujourd’hui comme « ami de longue date » : « Laurent Gbagbo s’est battu pour l’Afrique et ça été dure pour lui depuis trois ans (ndlr : 2002-2005). Nous allons l’aider en acceptant de nous engager dans la voie de la paix ». Le disant, George Weah venait ainsi de tomber sous le double charme de la vision panafricaniste de Laurent Gbagbo et de sa politique de paix sur le continent noir. Et pour mettre en exécution les conseils avisés reçus de Laurent Gbagbo au lendemain de leur rencontre au palais présidentiel d’Abidjan, on s’en souvient, George Weah avait abandonné le recours en annulation des résultats de l’élection présidentielle qu’il avait introduit auprès du conseil constitutionnel pour contester l’élection d’Ellen Johnson Sirleaf. La suite, on la connaît. Après plusieurs années de guerre, le Libéria vient de connaître sa première élection démocratique post-crise. Ironie du sort, George Weah qui était venu hier s’abreuver à la source de la politique de paix de Laurent Gbagbo, est celui-là même qui est aujourd’hui le grand vainqueur du scrutin présidentiel au Libéria avec 61, 5% des suffrages exprimés. Alors question : Ou étaient-ils ces amis de la 35e heure de George Weah au moment où Laurent Gbagbo servait de pont entre le ballon d’or africain et la présidente Ellen Johnson Sirleaf afin que la paix l’emporte sur le climat de tension qui prévalait à l’époque au Libéria ? Heureusement qu’en politique tout comme en diplomatie, il y a des signes qui ne trompent pas. Car ayant choisi le Sénégal et non la Côte d’Ivoire de Ouattara pour sa première sortie officielle dans la sous-région ouest africaine en tant que le nouveau président de la République du Libéria en l’absence de son « père » Gbagbo déporté à La Haye, George Weah venait ainsi de donner un signal diplomatique à tous ceux qui prétendent aujourd’hui entretenir des relations privilégiées avec lui.

Une contribution de Pierre Lemauvais