Euro 2016 : Le Portugal écarte la Pologne aux tirs au but et se qualifie pour les demi-finales

Par Lemonde.fr - Euro 2016 : Le Portugal écarte la Pologne aux tirs au but et se qualifie pour les demi-finales.

Cristiano Ronaldo et Pepe. FRANCISCO LEONG / AFP.

Ecrasé par la tension, plombé par la chaleur, le stade Vélodrome a du attendre l’éprouvante série des tirs aux buts pour voir le Portugal accéder aux demi-finales de l’Euro 2016 en battant la Pologne (1-1, 5 tirs au but à 3). Comme contre la Croatie au tour précédent, Ricardo Quaresma a donné la victoire à son pays, en transformant le cinquième tir au but portugais, après l’unique raté polonais de Blaszczykowski. Le Portugal s’est qualifié au terme d’une rencontre étouffante, encore marquée par l’incroyable maladresse d’un Cristiano Ronaldo méconnaissable devant le but.

« Contrôler le match ». La veille de ce quart de finale, les deux sélectionneurs ont utilisé la même expression pour définir leur ambition. Pour le Polonais Adam Nawalka, l’intention se traduit par la reconduction de l’équipe qui a éliminé la Suisse le samedi précédent (1-1, 5 tirs au but à 4). Une formation taillée pour défendre et contrer. Fernando Santos, lui, garde sa confiance à la charnière Pepe-Fonte, mais doit modifier ses plans avec les blessures du Lorientais Raphaël Guerreiro et du Valencien Andre Gomes. À gauche de sa défense, il rappelle Eliseu, déjà vu lors de la soirée « buts ouverts » contre la Hongrie (3-3). Au milieu, bonne pioche, il lance enfin comme titulaire dans cet Euro 2016, la perle du Benfica Lisbonne, l’explosif Renato Sanches, 18 ans.

Un Vélodrome aux couleurs de la Pologne

Face à l’Ukraine neuf jours auparavant, le stade Vélodrome avait viré au rouge et blanc. Plus de 20 000 supporters polonais s’étaient déplacés sur Marseille, s’offrant même un impressionnant défilé jusqu’au stade. Pour ce quart de finale, la colonie parait moins importante et à peine plus nombreuse que le contingent portugais. L’avant-match a été tranquille, marqué seulement par l’arrestation de deux supporters polonais pour vol de billets. Toute la journée, des tickets ont honnêtement changé de main : beaucoup de supporters portugais n’avaient visiblement pas prévu que leur équipe, troisième de son groupe, jouerait ce 30 juin à Marseille.

À 21 heures, la température frôle encore les 27 degrés, dans la continuité d’une journée où la chaleur a été lourde. La pelouse du Vélodrome, elle, ne s’est pas améliorée… Elle apparaît toujours pelée en plusieurs endroits. Inquiétant alors qu’elle doit encore accueillir une des demi-finales de la compétition. Mais l’état du terrain ne peut être invoqué pour justifier l’énorme bévue du latéral droit du Portugal, Cédric, qui fait basculer le début de match. Une bourde incompréhensible qui permet à la Pologne d’ouvrir le score dès la deuxième minute et à Robert Lewandowski, le buteur silencieux, de marquer enfin dans cet Euro. Sur une très longue transversale de Piszczek, Cédric loupe totalement son interception de la tête. Kamil Grosicki en profite avec avidité. L’attaquant habitué au banc du Stade Rennais déboule flanc gauche et centre pour son capitaine, seul au point de penalty. À cette distance, Lewandowski est létal. Rui Patricio, le gardien portugais, ne peut que le constater (1-0, 2e).

À peine entré en jeu, le Portugal se voit donc contraint de marquer au moins un but à la Pologne, la meilleure défense de la compétition. Sacré défi. Positionnée sur deux lignes de quatre joueurs, l’équipe d’Adam Nawalka recule consciemment et laisse le minimum d’espace à Nani et Ronaldo, les attaquants portugais. On la sent sûre d’elle, d’autant que Krychowiak et Maczynski, duo de récupérateurs hors pair, imposent leur puissance au milieu. Il faut attendre la 28e minute et un exploit individuel de Nani pour que Ronaldo trouve enfin une position de tir potable à l’entrée de la surface polonaise. Mais Fabianski, gardien remplaçant polonais devenu titulaire après la blessure de Szczesny lors du

premier match, capte sans souci.

Entre-temps, le Portugal a encore eu chaud. Milik puis Lewandowski, transcendé par sa réussite, inquiètent Rui Patricio sur des contres éclairs (15 et 16e). Et une nouvelle boulette de Cédric, fragilisé par l’activité électrique de Grosicki, offre au trio d’attaquants polonais l’occasion d’une combinaison superbe mais mal bouclée (22e).

Le scénario de la rencontre parait écrit. Il va pourtant subitement dévier de ses rails. Signe avant-coureur, à la demi-heure de jeu, quand Ronaldo est clairement balancé par Michal Pazdan sur un centre qu’il s’apprête à reprendre de la tête. Felix Brych, l’arbitre allemand, n’y trouve rien à redire et fait gronder le public portugais. Ce dernier rumine encore sa colère que Renato Sanches démontre toute sa classe. Son une-deux avec Nani déroute totalement la défense polonaise et sa frappe va trop vite pour Fabianski (1-1, 32e). On comprend subitement mieux les 35 millions d’euros payés par le Bayern Munich pour son transfert.

L’autre Ronaldo

La fin de la première période a été celle de Renato Sanches. Le début de la seconde sera celle de Ronaldo. Ou plutôt de l’autre Ronaldo, celui, maladroit, fébrile, que l’on voit depuis le début de cet Euro – son match tonitruant contre la Hongrie mis à part. À la 50e minute, sur un centre d’Eliseu, la star du Real Madrid ne profite pas d’un ballon relâché en l’air par Fabianski. Trois minutes plus tard, lancé en profondeur, il manque complètement sa frappe. Enfin, sur une percée de Nani, à l’endroit même où Lewandowski a ouvert le score en première période, le beau Cristiano loupe le ballon.

Improductif comme rarement, Ronaldo pèse quand même sur la Pologne et provoque l’avertissement reçu par Kamil Gilik pour un fauchage façon judo (66e). Face au coup de chaud portugais, la Pologne reste une équipe à sang froid. Elle récite son plan de jeu, attend son adversaire et place ses contres. Milik, à la réception d’un centre de Jedrzejczyk, devance Pepe et oblige Rui Patricio à un arrêt devant sa ligne (69e). Puis Grosicki frappe au-dessus alors qu’il était bien placé (74e).

Dans un match de plus en plus indécis, le Portugal se crée aussi ses occasions. Jose Font place une belle tête sur un corner (78e), puis sur une interception rageuse de Pepe, un des meilleurs portugais du match, Jedrzejczyk trompe presque son propre gardien. Le festival de ratés de Ronaldo reprend sur une merveille de balle en cloche du Monégasque Moutinho, à peine rentré en jeu (84e). Et malgré l’apparition de deux attaquants supplémentaires - Quaresma (80e) côté portugais, Kapustka (82e) pour la Pologne -, la prolongation - que les deux équipes ont connu en 8e de finale - devient inévitable.

Ronaldo l’ouvre par un nouveau raté, sur un centre de Renato Sanches. Incréduble, la star portugaise semble interroger le public sur cette succession de malchances... Jusqu’à quand va-t-elle durer ? Jusqu’à la mi-temps de la prolongation au moins. Le rythme baisse, l’atmosphère devient lourde. Il ne fait pas plus frais qu’en début de match. Milik frappe à côté (100e), Lewandowski centre fort devant le but portugais mais aucun Polonais ne rode par là. Nani inquiète Fabianski de la tête puis sur un tir lointain (103e).

Le stade Vélodrome devient silencieux, crispé... Jusqu’à l’irruption d’un supporter portugais qui fonce vers Cristiano Ronaldo avant d’être plaqué par des policiers. L’épisode n’allège pas l’ambiance. Les Polonais piétinent et seul Kapustka, plus frais que ses coéquipiers, se signale par un centre que personne ne peut reprendre (113e). Pepe, imposant jusqu’au bout, doit toutefois sauver la patrie sur un centre que convoitent Milik et Lewandowski (116e). Malgré un dernier centre portugais que Cristiano Ronaldo regarde passer loin au-dessus de sa tête, le destin sera scellé par les tirs au but.

Gilles Rof
Journaliste au Monde

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