CPI: Le général Philippe Mangou règle ses comptes avec les généraux Dogbo Blé, Kassaraté, et Brindou

Par IvoireBusiness - CPI. A la barre, le Général Mangou règle ses comptes avec les Généraux Dogbo Blé, Kassaraté, et Brindou.

Le Général Philippe Mangou le 25 septembre 2017 devant la cour pénale internationale.

Au premier jour de son témoignage devant la Cour pénale internationale, le Général Philippe Mangou, témoin à charge, a réglé ses comptes avec les Généraux Dogbo Blé, Edouard Kassaraté, et Brindou M’Bia.
Concernant le Général Dogbo Blé, commandant de la garde républicaine et commandant militaire du Palais, il l’a décrit comme un officier effacé et intelligent devenu brusquement zélé et irrespectueux après sa nomination comme commandant militaire du Palais et commandant de la Garde Républicaine, au point qu’il préférait rendre compte à Dieu (le Président Laurent Gbagbo) plus tôt qu’à lui (l’ange).

« Le général Dogbo Blé était un homme très intelligent, il était cultivé, déterminant, courageux. Quand je l’ai connu, c’est à peine s’il bavardait. Il rasait les murs pratiquement. Mais vous savez, parfois quand on occupe des fonctions, on s’oublie soi-même et c’est quelques fois dangereux.
Dogbo, nommé commandant de la garde républicaine, commandant militaire du palais, s’est vu pousser des ailes, au point d’arrêter des anciens. Un homme comme le général Coulibaly Abdoulaye le PCA d’Air Ivoire parce que sortant du Golf (Ndlr, Hôtel du Golf), lui prendre ses portables, c’était une aberration… Il ne respecte plus personne. Et je crois que c’est la fonction qui a fait qu’il s’est mis sur son piédestal », a-t-il révélé.
Selon l’ex-chef d’Etat major des armées ivoiriennes, ces agissements sont pratiqués par plusieurs officiers dans l’armée ivoirienne. « Malheureusement, nous avons quelques officiers qui se comportent comme cela, tout simplement parce que travaillant avec un président de la République, travaillant avec un ministre, travaillant avec un président d’institution. Ils n’ont plus aucun respect pour leurs anciens. Tout simplement parce que ces anciens ne sont pas en activité. Mais ils oublient que c’étaient leurs devanciers. C’est eux qui leur ont ouvert les yeux. Et c’est des comportements que nous déplorons. Parce que le fait de se mettre sur son piédestal et de ne pas considérer ses anciens, mais qu’ils se disent qu’un jour où l’autre ils peuvent descendre et se retrouver à la place de ses anciens… Quand il (général Dogbo Blé) a été nommé commandant militaire du palais, c’est là qu’on ne l’a plus connu. Je ne peux pas comprendre qu’un officier général puisse se saisir de son ancien jusqu’à ce qu’on l’assassine. Je ne peux pas le comprendre. Dans l’armée, il y a le respect des anciens, et cela est capital. Quand vous voyez votre ancien, quel que soit le grade que vous avez, il doit y avoir un minimum de comportement vis-à-vis de cet ancien », a déclaré le témoin du jour.
Le Général Philippe Mangou n’a également pas été tendre avec les Généraux Tiapé Kassaraté Edouard (Commandant supérieur de la Gendarmerie) et Brindou M’Bia (Directeur général de la police nationale), déclarant qu’ils ne jouaient pas franc jeu et avouant avoir même demandé leur limogeage au Président Laurent Gbagbo.
Son récit sur ces Généraux : « Il faut dire que le général Kassaraté et le directeur général de la police n’ont pas joué franc-jeu. Non pas que les gendarmes ou les policiers ne voulaient pas travailler, pas du tout. Nous avons travaillé avec eux. Ils ont été constamment sur le terrain. Mais le problème était au niveau des chefs qui ne voulait pas fournir d’effectif. J’ai dû à l’Etat-major organiser une réunion afin que chacun me fasse le point des effectifs. Sur un effectif d’environ 15 000 gendarmes, le général Kassaraté me donnait un effectif disponible de 500 personnes. Sur un effectif de près de 20 000 policiers, le général Brindou me donnait un effectif de 1250 personnes. J’ai dit mais qu’est-ce que c’est que cela ? A tel enseigne que le président Laurent Gbagbo lui-même sentant cette supercherie, ne cessait de me demander si j’avais confiance à Kassaraté et Brindou ? un jour un peu exaspéré par les questions que me posait le président j’ai dû lui dire mais Président il faut les enlever pour qu’on mette d’autres personnes pour travailler. Mais, le président m’a dit non. Compte tenu de la période, je n’ai personne sous la main. Je ne peux pas le faire. Mais il faut reconnaitre qu’ils n’ont pas été francs avec nous. Non pas parce qu’ils étaient avec l’autre camp. Et là j’utilise bien mes mots, ils surfaient sur un fil à la recherche d’une terre ferme pour poser les pieds ».
L’audition du Général Philippe Mangou par l’accusation se poursuit le mardi 26 septembre 2017 à la Cour pénale internationale.

Michèle Laffont
Correspondante permanente aux Pays Bas