Côte d'Ivoire: La popularité, un crime. Derrière ce paradoxe, les réalités ivoiriennes à l’épreuve du cas Laurent Gbagbo, Par Claude Koudou

Par IvoireBusiness/ Débats et Opinions - La popularité, un crime en Côte d’Ivoire. Derrière ce paradoxe, il y a les réalités ivoiriennes à l’épreuve du cas Laurent Gbagbo, Par Claude Koudou.

Le Président LAurent Gbagbo lors du verdict de la chambre d'appel de la Cour pénale internationale le 19 juillet 2017.

La tentative de coup d’Etat du 19 septembre 2002 aurait sa raison dans une exclusion des ressortissants du Nord. Après, il y a quelques semaines, lors d’un meeting, Amadou Soumahoro, Secrétaire général du RDR - le parti d’Alassane Dramane Ouattara - affirmait : « Il y a 10 ans, un Dioula n’avait pas le droit de porter un boubou dans ce pays. C’est grâce à Ouattara que cela est possible aujourd’hui. Ce type de discours tribal et ethno-religieux habite encore malheureusement nombre d’acteurs politiques qui, tout en aspirant à être aux responsabilités, utilisent la naïveté de certaines populations pour les enrôler sur la base d’affirmations fallacieuses et de raccourcis indécents.

La cabale est donc entretenue et l’opportunisme ne saurait prendre à défaut les Ivoiriens. D’autant plus que les conditions de réconciliation ont été offertes à l’occasion du « forum de réconciliation nationale » que Laurent Gbagbo a organisé d’octobre à décembre 2001. Alors que veut réellement Guillaume Soro pour qu’après son forfait de 2002 que Laurent Gbagbo a pardonné, il s’acharne sur des Ivoiriennes et des Ivoiriens, organisant des viols, des tueries – voire des décapitations à la machette –, des tortures, des crémations d’Ivoiriens innocents dans leur sommeil, des emprisonnements, … ?

En fait, l’idée était de traumatiser et terroriser les Ivoiriens pour qu’ils renoncent à leur quête de la liberté et de la démocratie. Guillaume Soro ne savait-il pas les vrais résultats des élections de 2010 ? La réalité est qu’on a voulu abattre un homme ; on a voulu tuer une idée par les armes ; on a ostracisé un homme qui, des années durant, a patiemment implanté sa popularité. Mais l’expérience montre qu’on ne combat pas une idée avec des armes. Ainsi tous ceux qui veulent "enterrer" cet homme, Laurent Gbagbo vivant parce qu'il est populaire, non seulement le prendront à leurs dépends mais aussi, ils ne réussiront pas à inverser les normes.

Par ailleurs, il convient de noter, au-delà des différentes considérations anecdotiques que la crise perdure en Côte d’Ivoire plus depuis 1995 à cause d’élections mal organisées. Tant que les vrais vainqueurs des élections ne seront pas au pouvoir, il sera difficile d’avoir de la stabilité. C’est la règle dans tous les pays. Quand on veut contraindre certains à l’opposition alors qu’ils ont le suffrage du peuple, comment la paix peut-elle régner ? Ensuite, il faut dire que Laurent Gbagbo, en tant que Président de la République n’a pas menacé les intérêts des Français. Il les avait même sécurisés. C’est sa volonté de voir s’instaurer un partenariat gagnant-gagnant qui irrite tous ceux qui ne veulent pas de la transparence dans la gestion des affaires publiques. Dire que Laurent Gbagbo est contre les intérêts des Français et qu’il est contre les musulmans relèvent simplement de la mauvaise foi s’ils ne contribuent pas à nourrir le fantasme de ceux qui sont en mal d’existence. A quoi répond qu’il faut maintenir un homme en prison parce que sa popularité peut engendrer des troubles. Il y a là non seulement la négation du principe de la présomption d’innocence mais aussi de la mesquinerie cruelle de tenir un homme loin de sa terre natale parce que Ouattara devrait gouverner. La popularité constitue donc un crime en Côte d’Ivoire. Il conviendrait alors de nous déclarer la sentence que vaut ce délit de popularité.
En fait, cet aveu est un paradoxe unique en son genre. Là où dans les pays démocratiques ou dans des espaces pluriels, des hommes et femmes populaires sont adulés et recherchés pour représenter des institutions et des structures (partis politiques, mouvements et associations...), en Côte d'Ivoire, sous la dictature de Ouattara, des rebelles et des microbes, sous les yeux affairés et intéressés d'un Ambassadeur de France qui s'ingèrent dans les affaires ivoiriennes sans sourciller, il est demandé à un homme - Laurent Gbagbo -, qui a acquis sa popularité au prix d'un labeur inlassable d'implantation, de renoncer à la vie publique, en échange de sa liberté. C’est le lieu de rappeler que Laurent Gbagbo a dit être pris en otage à La Haye. Ses détracteurs se refusaient à l'entendre. Les faits sont patents. Ils sautent aux yeux. La rançon pour les ravisseurs et leurs fanatiques pour libérer l'otage populaire est qu'il se retire de la politique ; en clair, qu'il renonce à son combat pour la démocratie, la liberté et la souveraineté. C'est la thèse que défendent tous ceux qui ont toujours voulu la Côte d’Ivoire sous tutelle. Sur les « Escadrons de la mort », l’affaire Guy-André Kieffer, le bombardement du marché d’Abobo ; … », … le monde entier attend toujours des preuves.

Pour tout ce qui précède, Ivoiriennes et Ivoiriens, indignons-nous ! Indignons-nous contre la substitution, contre l’arbitraire, contre le banditisme au sommet de l’Etat. La subjectivité ne peut que nourrir la crise. Maintenant, Guillaume Soro, de façon récurrente parle de réconciliation depuis le 3 avril 2017. Le pardon, la réconciliation et la paix sont devenues une antienne dans la bouche de celui qui a mis le nord du pays en coupe réglée avant de vouloir institutionnaliser la violence politique dans tout le pays. Pourquoi la voie démocratique qui peut permettre à celui qui propose et défend un projet alternatif d’arriver au pouvoir n’a-t-elle pas été suivie par les Soro et al ? En cela, les pérégrinations que Guillaume Soro cultive nous laissent sur notre faim. Guillaume Soro et Ouattara ont fait de la propagande sur un mensonge grossier qu’ils ont monté. C’est ce qui emmené le Président Laurent Gbagbo en prison. Le minimum de décence voudrait que – dans sa supposée repentance – Guillaume Soro appelle publiquement à la libération de Laurent Gbagbo. Il ne s’agit plus d’aller voir Laurent Gbagbo à La Haye. Pardonner, se pardonner ! Cela suppose « plus jamais ça ». Mais cela signifie aussi qu’il y a lieu de comprendre pourquoi Guillaume Soro a fait tout cela. Il faut comprendre pour que cela ne se reproduise plus. Amour du sang ou un faible pour les armes. On doit comprendre. Passer par pertes et profits ce qui s’est passé, relève d’un opportunisme honteux et n’annonce pas un brin de sincérité. D’autre part, ils ont rendu le pays ingouvernable conformément à leurs désirs. De quoi se plaignent-ils aujourd'hui ? A la vérité, la bande d'anarchistes est prise à son propre piège. Mutinerie par ici, mutinerie par là. Ils viennent encore de nous dire que le forfait d'inconnus au CCDO de l’école de police et à Yopougon est une manifestation de joie des policiers, relative à la promotion de Hamed Bakayoko. Ces gens-là se regardent-ils dans le miroir pour continuer ainsi de mentir aux Ivoiriens ? Où est-ce la manifestation d’un manque d’une bienséance ou d’un narcissisme débordant ?

Il faut retenir au total qu'on ne combat pas une idée avec des armes. On combat une idée avec une idée. Ainsi donc, l'idée du Président Laurent Gbagbo sera toujours là. Il faut se rendre à l’évidence et libérer Laurent Gbagbo pour que les Ivoiriens aillent à la réconciliation nationale. On ne doit pas maintenir une personne en prison du fait de sa popularité. Risque de troubles ou pas, que ceux qui ont trompé l’opinion s’organisent à donner à Laurent Gbagbo sa liberté. Car en droit, la détention est l’exception. Elle ne doit pas devenir la règle pour Laurent Gbagbo du fait de sa popularité. Devant la présomption d’innocence, la CPI – justice internationale – doit montrer que la politique n’a pas sa place dans le prétoire.

Une contribution de Claude KOUDOU