1,43 euro de l'heure: un coiffeur afro condamné pour "traite d'êtres humains"

Par L'Express - 1,43 euro de l'heure, un coiffeur afro condamné pour "traite d'êtres humains".

Capture d'écran d'un salon de coiffure "afro" boulevard de Strasbourg à Paris (photo d'illustration). afp.com.

Les 18 employés de ce salon de coiffure du 10e arrondissement de Paris, tous en situation irrégulière, étaient payés à la tâche pour l'équivalent de moins de 40% du Smic.
L'histoire avait fait grand bruit au printemps 2014. Des salariés d'un salon de coiffure afro situé au 57 boulevard de Strasbourg, à Paris, s'étaient révoltés en se lançant dans une grève hors norme. Des clandestins, du travail dissimulé, des paies misérables, des conditions d'hygiène désastreuses: le gérant du salon a finalement été condamné jeudi à un en de prison ferme pour "traite d'êtres humains".

Le procès avait opposé en décembre d'un côté la CGT et 18 employés du salon "New York fashion" et de l'autre le gérant Mohamed Bamba. Dix-sept des 18 employés étaient en situation irrégulière. Ils étaient payés à la tâche (pour une manucure ou un défrisage par exemple), la journée dépassait souvent les dix heures sans pause, six jours par semaine. Certains recevaient 1,43 euro de l'heure, somme qui tardait souvent à être versée.

Dommages et intérêts
Mohamed Bamba a également l'interdiction de fréquenter le 10e arrondissement de la capitale pendant trois ans et l'interdiction définitive de gérer un établissement. "D'habitude, la condamnation pour 'traite d'êtres humains' est liée à du proxénétisme ou à de l'esclavage domestique. A ma connaissance, c'est la première fois que le tribunal reconnaît dans un contexte de travail collectif au sein d'une entreprise que des salariés ont été soumis à une traite d'êtres humains", a réagi Maxime Cessieux, l'avocat de la CGT et des employés.

Mohamed Bamba devra verser 1500 euros de dommages et intérêts à chacune des 19 parties civiles, la CGT et les 18 employés. Par ailleurs, il devra payer plusieurs milliers d'euros d'amendes pour des infractions relatives aux conditions de travail et de sécurité.

Une "première historique"
La présidente de la 31e chambre du tribunal correctionnel a notamment souligné que les employés se trouvaient "en situation de vulnérabilité" comme ils étaient en situation irrégulière. Ils "ne pouvaient pas démissionner au risque de perdre des salaires non encore versés ou fréquemment retardés", a-t-elle ajouté. Les salaires étaient "inférieurs de plus de 40% au Smic" avec un paiement "à la tête coiffée alors que les coiffures afro-antillaises sont très longues à exécuter", a-t-elle mis en avant.

Mohamed Bamba avait déjà été condamné en novembre 2016 à deux ans de prison dont un avec sursis, notamment pour travail dissimulé. Il était alors en fuite et avait fait opposition du jugement. Hélène Bidard, adjointe PCF à la maire de Paris Anne Hidalgo en charge de la lutte contre les discriminations, témoin au procès, s'est félicitée d'une "première historique": "C'est désormais une jurisprudence qui doit nous permettre de faire valoir le droit du travail partout à Paris, capitale des droits humains", indique un communiqué.

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