Duvalier rattrapé par la justice deux jours après son retour en Haïti

PORT-AU-PRINCE (AFP)le 19 janvier 2011 - Jean-Claude Duvalier a été inculpé de corruption et de détournements de fonds mardi par la justice d'Haïti, qui l'a cependant laissé en liberté, moins de 48 heures après le retour

Jean Claude Duvalier, l'ex-dictateur haïtien le 18 janvier 2011 à Port au Prince. De Afp.

PORT-AU-PRINCE (AFP)le 19 janvier 2011 - Jean-Claude Duvalier a été inculpé de corruption et de détournements de fonds mardi par la justice d'Haïti, qui l'a cependant laissé en liberté, moins de 48 heures après le retour

inopiné de l'ancien dictateur après 25 ans d'exil en France.
Mardi vers 17H15 locales (22H00 GMT), l'ex-dictateur a quitté le Palais de justice, moins de deux jours après avoir regagné son pays à la surprise générale. La police était venu le chercher en fin de matinée à l'hôtel Karibe de Port-au-Prince, sous les cris de ses partisans exigeant sa libération et la démission de l'actuel président, René Préval.
L'ancien dictateur a été inculpé de corruption et de détournements de fonds publics commis sous sa présidence (1971-86), a déclaré à l'AFP un de ses avocats, Gervais Charles.
"Il est libre mais il reste à la disposition de la Justice" a précisé un autre de ses défenseurs.
M. Duvalier est ressorti de sa comparution sans menottes, accompagné de sa femme Véronique Roy. A l'AFP qui lui demandait comment il allait, l'ancien président a simplement répondu "bien".
Le couple s'est ensuite engouffré dans une voiture, escortée par des véhicules de la police.
Me Charles a dit ne pas savoir si l'ancien chef d'Etat serait conduit en prison ou placé en résidence surveillée.
Outre l'accusation de fraude, M. Duvalier, est tenu responsable par des organisations internationales de défense des droits de l'homme de la mort de milliers d'opposants sous sa présidence.
Michèle Montas, ancienne porte-parole du secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon et dont l'époux défunt, le journaliste Jean Dominique, avait été intimidé puis exilé sous le régime Duvalier, a indiqué qu'elle porterait plainte dans les tout prochains jours.
La plainte portera sur "la destruction de Radio Haïti, sur l'arrestation, la torture et l'envoi en exil dont j'ai été victime ainsi que beaucoup de nos journalistes le 28 novembre 1980", a-t-elle expliqué.
Au chapitre des détournements, la Suisse prévoit de rendre au peuple haïtien quelque 5,7 millions de dollars déposés dans des banques du pays. La famille Duvalier a tenté pendant des années de s'opposer à cette restitution.
M. Duvalier s'est borné depuis son retour à déclarer qu'il était venu "pour aider" les Haïtiens après le tremblement de terre qui a dévasté le pays il y a tout juste un an. Une conférence de presse annoncée par ses proches initialement pour lundi ne s'est jamais concrétisée.
Le retour de l'ex-dictateur survient en pleine crise politique en Haïti, près de deux mois après une élection présidentielle dont les résultats n'ont toujours pas été officiellement proclamés. Selon une mission d'enquête de l'Organisation des Etats américains (OEA), le candidat choisi par le président sortant René Préval pour lui succéder, Jude Célestin, est arrivé troisième de la course et doit donc être exclu du second tour, contrairement aux résultats préliminaires qui l'avaient placé en deuxième position.
M. Préval, qui doit quitter le pouvoir en principe le 7 février, n'a pas encore réagi aux conclusions de l'OEA.
Dans ce contexte, la présence de M. Duvalier "ajoute au fardeau" du pays, a déploré Washington. "Le fait qu'il arrive au milieu d'une situation très délicate (...) est une complication supplémentaire dans un contexte déjà difficile", a commenté Philip Crowley, porte-parole de la diplomatie américaine.
Le ministre canadien des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, s'est dit "ravi" des accusations portées contre l'ex-dictateur, félicitant les autorités d'Haïti d'avoir dûment appliqué la loi.
Quant à un autre ex-président haïtien, Jean-Bertrand Aristide, exilé en Afrique du Sud à la suite d'un coup d'Etat en 2004, il a tenté d'obtenir un nouveau passeport des autorités de son pays pour retourner en Haïti mais sa demande a été rejetée, a affirmé mardi un avocat de Miami qui suit le dossier de près.

Afp.