Politique nationale / Abou Cissé sans pitié pour Ouattara : ‘‘Il est un problème pour le Nord, pour l’Islam et pour la politique en Côte d’Ivoire’’

Par Le Bélier - Politique nationale / Abou Cissé sans pitié pour Ouattara ‘‘Il est un problème pour le Nord, pour l’Islam et pour la politique en Côte d’Ivoire’’.

Abou Cissé à son arrivée à la place Inch'Allah de Koumassi le samedi 27 juin 2015.

Invité du forum de débat de la rédaction du journal « Le Quotidien d’Abidjan », hier mardi 30 juin 2015, Abou Cissé n’a pas été du tout tendre avec le chef de l’Etat Alassane Ouattara. Comme à son habitude, celui qui est présenté comme l’oncle du leader des républicains a répondu, sans langue de bois, aux questions des journalistes. Durant plus de trois (3) heures d’horloge, Abou Cissé a parcouru les sujets tels que la création du Rassemblement des républicains (RDR) et son militantisme au sein de ce parti, ses relations avec l’ex-président de la République Laurent Gbagbo, le transfèrement de celui-ci à la cour pénale internationale (CPI), la gestion d’Alassane Ouattara depuis son arrivée au pouvoir, la coalition nationale pour le changement (CNC), l’élection présidentielle et la présence de Blaise Compaoré en Côte d’Ivoire.

Pour lui, « Alassane Ouattara est un problème pour le Nord, pour l’Islam et pour la politique en Côte d’Ivoire » pour le fait qu’il a instrumentalisé à dessein le peuple du Nord de la Côte d’Ivoire pour servir sa cause personnelle. En plus du fait que depuis son accession à la magistrature suprême du pays, sa politique de rattrapage ethnique desserre cette partie du territoire ivoirien et contribue à alimenter la division entre les Ivoiriens. Il en va de même pour la religion musulmane dont il se réclame et qu’il a utilisée négativement pour parvenir à ses fins politiques. Heureusement, poursuit-il, le Nord commence à comprendre aujourd’hui que Ouattara n’est pas un rassembleur mais plutôt un diviseur. « L’histoire retiendra qu’il n’a pas amené l’union mais la division », ajoute-t-il.

« Ouattara n’est pas reconnaissant »
Abordant ses relations avec le Rdr, l’ex-ingénieur des travaux publics à la retraite et membre fondateur de ce parti affirme que « Alassane Ouattara n’est pas reconnaissant. Sinon comment comprendre que les enfants de Djéni Kobina, celui-là même qui a créé un parti, lequel parti lui a permis d’être au pouvoir, ses enfants se retrouvent aujourd’hui dans des conditions ‘’macabres’’ (misérables, Ndlr) alors que ceux de sa femme vivent dans l’opulence ? ». Selon ce descendant des Cissé d’Odienné, c’est ce manque de gratitude qui l’a éloigné de son neveu Alassane et qui a refroidi son ardeur à militer au sein du Rdr. Abou Cissé explique qu’après avoir été emprisonné pour avoir défendu Alassane Ouattara que Bédié a traité d’étranger, ‘’son protéger’’ n’a pas daigné passer le voir pendant sa détention encore moins à sa sortie de prison. Pourtant, c’est pour lui qu’il a apporté la réplique en déclarant que dans ce cas Bédié n’est lui aussi Ivoirien parce que historiquement tous les Ivoiriens sont étrangers. L’attitude d’ingratitude d’Alassane lui sera fatale, au dire de son oncle qui déclare que « c’est une malédiction » en refusant de passer la nuit à Gbéléban, village natale de sa mère, lors de sa récente visite d’Etat dans la région d’Odienné. « Sa fin sera dramatique », insiste-t-il. Par ailleurs, Abou Cissé estime que Ouattara a dénaturé le Rdr en faisant de lui un parti tribal basé sur la religion.

5 ans de pouvoir désastreux
Pour Abou Cissé, le bilan d’Alassane Ouattara à quelques mois de la fin de son quinquennat est désastreux. Il résume le bilan du chef de l’Etat au nombre de prisonniers, d’arrestations inutiles de tous ceux qui s’opposent à lui et à la misère qui frappe les Ivoiriens. « Pendant 5 ans, vous avez passé votre temps à emprisonner, à tuer, à opprimer et à entraver les libertés. Il n’y a pas un Ivoirien qui n’a pas peur pour sa vie », dénonce-t-il. Avant d’indiquer que la croissance dont parle le pouvoir ne se ressent pas dans le quotidien des Ivoiriens. « La Côte d’Ivoire veut manger. C’est ce que nous voulons. (…) il faut, certes, des ponts mais des ponts qui pour relier les Ivoiriens entre eux », renchérit-il. En ce qui concerne le transfèrement de Laurent Gbagbo à la CPI, Abou Cissé pense que c’est « la plus grande erreur politique de Ouattara » en ce sens qu’il a fait preuve d’un « amateurisme politique ». Pour lui, si le locataire du palais du Plateau ne veut pas envoyer les ex-chefs de guerre à la CPI, c’est parce qu’il ne veut pas se faire hara-kiri. Car, il pourrait lui-même s’y retrouver en compagnie de Blaise Comparé dont Abou Cissé analyse d’ailleurs sa présence en Côte d’Ivoire comme une contribution à la chute prochaine de Ouattara. Au regard de ce bilan, cet acteur politique conclut que « si on lui (Alassane Ouattara) donne 5 ans encore, il va nous enterrer tous ». Toutefois, il demande au président de la République « de mettre balle à terre et de libérer les prisonniers politiques ».

La CNC et la présidentielle 2015
« Dans l’esprit, c’est un soulagement. Dans le fond, il n’y a pas un manque de contenu », déclare Abou Cissé parlant de la coalition nationale pour le changement (CNC). Selon lui, la CNC répond à une aspiration de changement exprimé par le peuple ivoirien. C’est pourquoi, souhaite-t-il que l’opposition trouve les mots justes pour attaquer Ouattara et l’amener à se raviser. Surtout pour faire en sorte que les élections ne se tiennent pas dans les conditions actuelles. « Il n’y aura pas d’élection parce que les conditions ne sont pas réunies », martèle-t-il.

Jean Levry