CPI - Rebondissement "Affaire Gbagbo": Maitre Altit sort un nouveau joker pour obtenir sa libération

Par Le Nouveau Courrier - Le joker de Me Altit. Une «Requête urgente aux fins d’organisation d’une Conférence de mise en état».

CPI - Rebondissement "Affaire Gbagbo": Maitre Altit sort un nouveau joker pour obtenir sa libération
Le manque de visibilité dans la procédure contre le président Laurent Gbagbo qui perdure ainsi que les manoeuvres dilatoires opérées par le procureur ont emmené Me Emmanuel Altit a demander une conférence de mise en état. Objectif : clarifier le déroulement de la procédure et garantir une défense équitable à Gbagbo en vue d’obtenir sa libération.

Le conseil principal du président Laurent Gbagbo a déposé le jeudi 30 janvier 2014 devant les juges de la Chambre préliminaire I une «Requête urgente aux fins d’organisation d’une Conférence de mise en état». Dans cette requête de 12 pages, Me Emmanuel Altit demande à la Chambre d’«ordonner la tenue d’une audience de mise en état lors de laquelle seront discutés notamment : la nécessité d’organiser une véritable audience orale de confirmation des charges ; le temps dont devrait bénéficier le Président Gbagbo pour préparer adéquatement sa défense, en conformité avec l’Article 67(1)(b) du Statut de Rome ; les moyens et le temps dont devrait disposer la défense pour enquêter afin que le Président Gbagbo puisse exercer son droit de contester les charges, de contester les preuves du Procureur et de présenter des éléments de preuve en vertu de l’Article 61(6) du Statut de Rome ; la teneur du DCC pour vérifier s’il est conforme aux instructions de la Chambre Préliminaire et aux exigences du Statut ; le format le plus approprié concernant les soumissions écrites de la défense en réponse au DCC».

L’avocat du président Laurent Gbagbo souhaite que la Chambre fixe cette audience la date de cette conférence de mise en état au 7 février 2014 afin de régler ces questions avant le 13 février 2014, date prévue pour le dépôt des observations de la défense sur les preuves du Procureur. «La défense estime que toutes ces questions sont inextricablement liées et doivent donc être discutées ensemble lors d’une conférence de mise en état au cours de laquelle les parties et les participants pourraient s’entendre sur la

manière la plus adéquate de poursuivre la procédure de confirmation des charges, notamment la meilleure façon de continuer l’audience commencée le 19 février 2013 et ajournée depuis. La défense souligne qu’organiser une telle audience de mise en état conduirait à un gain de temps considérable en permettant un vrai débat global sur les questions en suspens et en évitant la soumission de nombreuses requêtes, réponses et répliques qui ne feraient qu’alourdir la procédure», réclame l’avocat.

Les fondements de la démarche de Me Altit

Après le rejet le 27 janvier dernier par la juge unique Silvia Fernandez de Gurmendi de la requête de la défense en date du 17 janvier dernier afin que le document amendé de notification des charges déposé par le Procureur le 13 janvier 2014 et les documents afférents soient déclarés irrecevables et écartés de la procédure, Me Altit continue d’échafauder les stratégies. Afin de garantir une meilleure défense à son client et obtenir sa libération.
Il sort ainsi un autre joker : la conférence de mise en état dont la dernière audience a eu lieu le 11 décembre 2012, il y a plus de 13 mois.

Pourquoi cette conférence ? Dans sa requête, l’avocat de Gbagbo soutient qu’ «organiser une conférence de mise en état est souvent indispensable afin de permettre aux parties d’exprimer leurs préoccupations, d’informer la Chambre des obstacles qu’elles rencontrent, de lui faire part des contraintes à régler et donner aux Juges tous les éléments utiles pour qu’ils puissent prendre toutes les décisions nécessaires afin de préserver les droits des parties, en particulier les droits de l’Accusé, et qu’ils puissent éventuellement modifier le rythme de la procédure de façon à laisser chacune des parties libre de faire valoir ses arguments. Il s’agit en effet de s’assurer que le déroulé de la procédure ne porte pas atteinte aux droits fondamentaux de l’Accusé». Maître Altit veut donc s’assurer du bon déroulement de

la procédure car il a des raisons objectives de s’inquiéter de la lenteur et du manque de visibilité dans l’affaire Gbagbo.

Gbagbo crée un précédent à la CPI

D’abord, l’avocat soutient que l’ajournement de l’audience de confirmation des charges décidé le 3 juin dernier par les juges de la chambre préliminaire I en ce qui concerne son client est inédit. «Un ajournement tel que décidé dans la présente procédure est exceptionnel : il n’a pas de précédent dans la pratique de la Cour. En effet, si une audience a déjà été ajournée dans le passé (affaire Bemba), le report n’avait pris que trois mois consacrés à préciser un point spécifique : celui de la modification du mode de responsabilité par rapport à celui retenu dans les charges initialement formulées par le Procureur. Dans l’affaire Gbagbo, le report n’a été accordé au Procureur que pour qu’il présente de manière plus structurée et plus étayée sa preuve. Il s’agissait pour les Juges d’obtenir une clarification des charges non une modification des charges. C’est pourquoi les Juges se sont placés dans la logique de l’article 61(7)(c)(i) du Statut alors que dans l’affaire Bemba les Juges s’étaient placés dans la logique de l’article 61(7)(c)(ii). La nature de l’ajournement est donc ici tout à fait différente. Sa durée aussi puisqu’il aura pris onze mois. L’ajournement a entrainé ici la divulgation par le Procureur de plus de 14 000 pages supplémentaires de documents. Enfin, l’ajournement a conduit à la soumission d’un nouveau DCC deux fois plus gros que le précédent et substantiellement différent, notamment par l’adjonction de trois modes de responsabilité supplémentaires», fait remarquer l’avocat français.

Me Altit pointe du doigt le dilatoire Fatou Bensouda qui a déposé un long DCC amendé le 13 janvier dernier (environ 14 000 pages et 24 heures de documents audio et vidéo) en plus d’un document corrigé déposé le lendemain 14 janvier, juste pour distraire la Défense et les

juges. Me Altit a vu la stratégie de procureur et veut d’ores et déjà clarifier les choses.

Anderson Diédri
NB: Le titre est de la rédaction