CPI : Document amendé de notification des charges (1ère partie)

Par ICC/COI - Document amendé de notification des charges (1ère partie)

PREMIERE PARTIE

Annexe 1
Publique

Document amendé de notification des charges

ICC-02/11-01/11-592-Anx1 13-01-2014 1/96 EK PT
ICC-02/11-01/11 1/91 13 janvier 2014

Original : français N° ICC-02/11-01/11
Date : 13 janvier 2014

LA CHAMBRE PRÉLIMINAIRE I
Composée comme suit : Mme la juge Silvia Fernández de Gurmendi, juge
présidente
M. le juge Hans-Peter Kaul
Mme la juge Christine Van den Wyngaert
SITUATION EN RÉPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE
AFFAIRE
LE PROCUREUR c. LAURENT GBAGBO
Public
Document amendé de notification des charges
Source : Bureau du Procureur
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Document à notifier en application de la norme 31 du Règlement de la Cour à :
Le Bureau du Procureur
Mme Fatou Bensouda
M. James Stewart
M. Eric MacDonald
Le Conseil de la Défense
Me Emmanuel Altit
Me Agathe Bahi Baroan
Me Natacha Fauveau Ivanovic
Les représentants légaux des victimes
Me Paolina Massidda
Les représentants légaux des
demandeurs
Les victimes non représentées Les demandeurs non représentés
(participations/réparation)
Le Bureau du conseil public pour les
victimes
Me Paolina Massidda
Le Bureau du conseil public pour la
Défense
Les représentants des États
LE GREFFE
L’amicus curiae
Le Greffier
M Herman von Hebel
Le Greffier adjoint
La Section d’appui à la Défense
L’Unité d’aide aux victimes et aux
témoins
La Section de la détention
La Section de la participation des
victimes et des réparations
Autres
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TABLE DES MATIÈRES
1. INTRODUCTION ................................................................................................................................................. 4
2. LE SUSPECT........................................................................................................................................................... 5
3. CONTEXTE AYANT MENÉ À LA CONCEPTION ET MISE EN OEUVRE DU PLAN COMMUN......... 7
4. RÉSUMÉ DES FAITS DE L’AFFAIRE ...............................................................................................................14
5. COMPÉTENCES RATIONE LOCI, RATIONE TEMPORIS ET RATIONE MATERIAE............................18
6. EXPOSÉ DES FAITS EN CAUSE AU REGARD DES ÉLÉMENTS DU CHAPEAU DE L’ARTICLE 7 ..19
1. ATTAQUE CONTRE UNE POPULATION CIVILE .......................................................................................19
2. CARACTERE GENERALISE OU SYSTEMATIQUE DE L’ATTAQUE.............................................................31
3. POLITIQUE D’UNE ORGANISATION .......................................................................................................32
7. FAITS EN CAUSE AU REGARD DES CRIMES REPROCHÉS ....................................................................41
1. PREMIER EVENEMENT : ATTAQUES LIEES AUX MANIFESTATIONS DEVANT LE SIEGE DE LA RTI (DU
16 AU 19 DECEMBRE 2010) .....................................................................................................................41
2. DEUXIEME EVENEMENT : ATTAQUE LANCEE LORS D’UNE MANIFESTATION DE FEMMES A ABOBO
(3 MARS 2011)........................................................................................................................................49
3. TROISIEME EVENEMENT : BOMBARDEMENT DU MARCHE D’ABOBO ET SES ENVIRONS
(17 MARS 2011)......................................................................................................................................50
4. QUATRIEME EVENEMENT : L’ATTAQUE SUR YOPOUGON (LE OU VERS LE 12 AVRIL 2011) ................51
8. FAITS PERMETTANT D’ÉTABLIR LA RESPONSABILITÉ PÉNALE INDIVIDUELLE DE GBAGBO
..................................................................................................................................................................................52
1. EXISTENCE D’UN PLAN COMMUN ENTRE GBAGBO ET LES MEMBRES DE SON ENTOURAGE
IMMEDIAT ..............................................................................................................................................53
2. LES FORCES PRO-GBAGBO : UN APPAREIL DU POUVOIR ORGANISE ET HIERARCHISE.......................53
3. CONTROLE EXERCE CONJOINTEMENT PAR GBAGBO ET SON ENTOURAGE IMMEDIAT SUR LES
FORCES PRO-GBAGBO ............................................................................................................................61
4. CONTRIBUTION COORDONNEE PAR GBAGBO ET SON ENTOURAGE IMMEDIAT AYANT ABOUTI A
LA COMMISSION DES CRIMES ................................................................................................................69
5. EXECUTION DES CRIMES RENDUE POSSIBLE GRACE A L’OBEISSANCE QUASI AVEUGLE AUX ORDRES
DE GBAGBO ET DE SON ENTOURAGE IMMEDIAT PAR LES FORCES ACQUISES A LEUR CAUSE.........77
6. CONSTITUTION DES ELEMENTS SUBJECTIFS DES CRIMES REPROCHES................................................77
9. EXPOSÉ DES CHARGES ....................................................................................................................................81
ANNEXE 1 – LISTE DES SIGLES ET ACRONYMES
ANNEXE 2 – STRUCTURE FORMELLE DES FDS
ANNEXE 3 – STRUCTURE PARALLELE AU SEIN DES FDS
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1. INTRODUCTION
1. La présente affaire porte sur la responsabilité pénale de Laurent GBAGBO
(GBAGBO) pour des crimes commis à Abidjan entre le 27 novembre 2010 et le 8
mai 2011 par ses forces au cours d’une attaque soutenue, planifiée, meurtrière,
généralisée et systématique, lancée contre les civils considérés comme des
partisans d’Alassane OUATTARA (OUATTARA).
2. Dès son accession à la Présidence en 2000, GBAGBO a eu pour objectif de se
maintenir au pouvoir, y compris en réprimant ou en attaquant violemment ceux
qui constituaient une menace pour son régime. Sachant l’éléction présidentielle
inévitable, GBAGBO a, conjointement avec son entourage immédiat, conçu et
mis en oeuvre un Plan commun afin de se maintenir à la Présidence par tous les
moyens nécessaires. Le Plan commun a évolué jusqu’à inclure, au plus tard le 27
novembre 2010, une politique d’État ou organisationnelle qui avait pour but une
attaque généralisée et systématique contre les civils considérés comme des
partisans de OUATTARA (« Politique »).
3. GBAGBO a planifié, organisé, coordonné, ordonné, encouragé, autorisé et permis
diverses mesures pour réaliser le Plan commun et les crimes reprochés. En
application du Plan commun, des centaines de civils ont été persécutés, attaqués,
tués, blessés et violés.
4. Pour la réalisation du Plan commun, GBAGBO s’est en particulier servi de
l’appareil de l’État ivoirien y compris les Forces de Défense et de Sécurité
(« FDS »), ainsi que des jeunes pro-Gbagbo, des miliciens et des mercenaires (les
« forces pro-Gbagbo »). Celles-ci, en exécution du Plan commun, ont mené
l’attaque contre les civils.
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5. GBAGBO s’est, partant, abstenu de prendre les mesures nécessaires et
raisonnables qui étaient en son pouvoir afin de protéger la population civile et
d’empêcher ou de réprimer l’exécution des crimes commis par ses subordonnés,
ou pour en référer aux autorités compétentes pour qu’elles mènent de véritables
enquêtes et poursuites.
6. GBAGBO est responsable des crimes qui lui sont reprochés dans le présent
Document en tant que co-auteur indirect, selon l’article 25-3-a du Statut.
GBAGBO est également responsable selon l’article 25-3-b d’avoir ordonné,
sollicité et encouragé la commission des crimes qui lui sont reprochés et pour sa
contribution à la commission de ces mêmes crimes aux termes de l’article 25-3-d
du Statut. Ces modes de responsabilité, alternatifs, retenus aux termes de
l’article 25-3-a, b et d, s’appliquent non seulement aux actes commis par
GBAGBO mais aussi à ses omissions qui ont contribué à la commission des
crimes reprochés. Alternativement, GBAGBO est également responsable des
crimes qui lui sont reprochés dans le présent Document aux termes de l’article
28-a et 28-b du Statut.
2. LE SUSPECT
7. Laurent GBAGBO est né le 31 mai 1945, il est originaire de Mama, un village
situé dans le département de Gagnoa, en Côte d’Ivoire. Il est né dans une famille
de confession catholique, membre de l’ethnie bété et il est de nationalité
ivoirienne. GBAGBO a deux épouses : il est marié légalement à Simone GBAGBO
avec laquelle il s’est converti au christianisme évangélique et il est marié
traditionnellement à Nadiana BAMBA.
8. Dans les années 70 et 80, GBAGBO est professeur d’histoire, d’abord au Lycée
classique d’Abidjan et ensuite à l’Université d’Abidjan. Il est aussi syndicaliste et
à partir des années 70, il devient l’un des principaux opposants au Président
Félix HOUPHOUET-BOIGNY. Dans ses activités syndicalistes, GBAGBO
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préconise le multipartisme et le socialisme démocratique, en opposition au
monopartisme de HOUPHOUET-BOIGNY.
9. GBAGBO rencontre Simone GBAGBO dans les années 70 alors qu’ils sont tous
les deux actifs dans les mouvements étudiants et syndicalistes. Ils mobilisent des
étudiants pour faire de grandes manifestations contre le régime de
HOUPHOUET-BOIGNY. À plusieurs reprises ils sont emprisonnés pour leur
opposition au gouvernement. En 1982, Laurent et Simone GBAGBO créent le
Front Populaire Ivoirien (« FPI ») dans la clandestinité et GBAGBO s’exile la
même année en France, pour revenir en Côte d’Ivoire en 1988.
10. En 1990, la première élection présidentielle démocratique en Côte d’Ivoire a lieu
et GBAGBO est le seul candidat à se présenter contre HOUPHOUET-BOIGNY.
GBAGBO perd cette élection mais il est reconnu comme chef de l’opposition. En
février 1992, Laurent et Simone GBAGBO sont arrêtés lors d’une manifestation
pour forcer HOUPHOUET-BOIGNY à sanctionner les responsables militaires qui
ont violemment attaqué des étudiants de la cité universitaire de Yopougon; ils
seront détenus pendant plus de six mois. Henri Konan BÉDIÉ est alors le
Président de l’Assemblée nationale et Alassane OUATTARA le Premier ministre.
Le 7 décembre 1993, le Président Félix HOUPHOUET-BOIGNY meurt et Henri
Konan BÉDIÉ devient alors Président par intérim.
11. Pendant les années 90, GBAGBO demande le soutien des mouvements étudiants,
notamment la Fédération Estudiantine et Scolaire de Côte d'Ivoire (« FESCI »),
dont l’un des secrétaires généraux est Charles BLÉ GOUDÉ, un Bété originaire
du département de Gagnoa.
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3. CONTEXTE AYANT MENÉ À LA CONCEPTION ET MISE EN
OEUVRE DU PLAN COMMUN
12. Suite à la mort de HOUPHOUET-BOIGNY, la Côte d’Ivoire fait face à de fortes
divisions, conséquences notamment des différentes luttes menées pour lui
succéder. Ces divisions sont exacerbées par les questions de nationalité,
d’appartenance ethnique et de « l’Ivoirité », un concept introduit par BÉDIÉ
visant à priver les non-autochtones notamment du droit de vote et d’éligibilité
aux élections présidentielles.
13. Les trois présidents qui succèdent à HOUPHOUET-BOIGNY - Henri Konan
BÉDIÉ en 1995, Laurent GBAGBO en 2000 et Alassane OUATTARA en 2010 -
vont tous gagner la présidence dans des circonstances controversées. Après son
intérim, BÉDIÉ est élu président en 1995, l’Ivoirité étant le thème central de sa
campagne. Il est élu avec 96,44% des votes, OUATTARA et GBAGBO n’ayant pas
participé à cette élection. BÉDIÉ fait l’objet d’un coup d’état en décembre 1999 et
le général Robert GUÉÏ prend le pouvoir.
14. En octobre 2000, GBAGBO devient président au terme d’une élection au cours de
laquelle le Conseil Constitutionnel a disqualifié 14 des 19 candidats, dont Henri
Konan BÉDIÉ et Alassane OUATTARA. Le général GUÉÏ, candidat défait, tente
de se maintenir au pouvoir après cette élection mais GBAGBO mobilise ses
militants dans de grandes manifestations et GUÉÏ se voit forcé de céder le
pouvoir.
15. Dès son accession au pouvoir, ses opposants contestent la légitimité du régime
de GBAGBO et manifestent contre son gouvernement. En novembre-décembre
2000 et au cours de l’année 2001, les Forces de Défense et de Sécurité (« FDS »)
répriment les manifestations anti-GBAGBO. Les FDS sont accusées par la
Commission d’enquête internationale des Nations Unies et diverses ONGs de
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commettre des crimes contre les manifestants, notamment de meurtres et de
viols.
16. Pendant la nuit du 18-19 septembre 2002, une tentative de coup d’état contre
GBAGBO échoue. Cette tentative mène à un conflit qui divisera la Côte d’Ivoire
entre une zone au sud tenue par le Gouvernement de GBAGBO et une zone au
nord contrôlée par les forces dites « rebelles ». Entre les zones nord et sud, on
érige une zone neutre aussi appelée « zone de confiance ». Les forces
gouvernementales et les forces rebelles auraient toutes commis des crimes
pendant cette période.
17. À partir de cette tentative de coup d’état et afin de résister à la rébellion et de se
maintenir au pouvoir, GBAGBO recourt à des mercenaires étrangers. En octobre
2002, des mercenaires, notamment français et sud-africains, forment des éléments
des forces pro-Gbagbo à l’école de gendarmerie à Abidjan. L’embauche de ces
mercenaires est orchestrée par Bertin KADET, alors Ministre de la Défense. Ces
mêmes mercenaires, sur ordre du chef d’état-major particulier de GBAGBO,
dirigeront ensuite une force de combat à l’Ouest du pays, notamment dans la
région de Vavoua.
18. De plus, à partir d’octobre 2002, des mercenaires libériens combattent « en
parallèle » avec les FDS à l’Ouest contre les rebelles. Ces mercenaires libériens
sont alors connus sous les appellations « LIMA » (soit la lettre « L » selon
l’alphabet phonétique militaire, pour « Libériens ») et MODEL (« Movement for
Democracy in Liberia »). Pendant la période de 2002 à 2004, ces mercenaires
libériens auraient commis des meurtres et des viols de civils à grande échelle à
l’Ouest de la Côte d’Ivoire.
19. Des combattants de l’ethnie Guéré (aussi connue sous le nom Wè), originaire de
la région frontalière avec le Libéria et appartenant à des milices telles que le
Front pour la Libération du Grand Ouest (« FLGO »), participent aussi au conflit.
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Les Guéré sont implantés dans une région voisine de celle des Bété et étaient
considérés comme acquis à la cause de GBAGBO. Dès octobre 2002, les miliciens
Guéré soutiennent les FDS à l’Ouest et combattent aux côtés des mercenaires
libériens de l’ethnie kranh, une ethnie proche des Guéré.
20. À Abidjan, des milices pro-Gbagbo sont actives à partir de 2002, notamment le
Groupement des Patriotes pour la Paix (« GPP »). Bertin KADET fait partie de
ceux qui approvisionnent en armes les diverses milices pro-Gbagbo.
21. L’ancien secrétaire-général de la FESCI Charles BLÉ GOUDÉ, un proche de
GBAGBO, a créé le « Congrès panafricain des Jeunes et Patriotes » (« COJEP ») en
2001. Après le coup d’État manqué de septembre 2002, BLÉ GOUDÉ rassemble
son groupe avec d’autres mouvements pro-Gbagbo sous l’appellation « l’Alliance
des Jeunes patriotes pour le Sursaut National » (« AJSN »). Ce groupe et d’autres
groupes de jeunes pro-Gbagbo sont aussi connus sous le nom de « Jeunes
patriotes ».
22. BLÉ GOUDÉ est un orateur charismatique capable de mobiliser des milliers de
jeunes pour manifester. Dans les années qui suivent la tentative de coup d’état,
BLÉ GOUDÉ incite par ses discours les jeunes à la haine, à se dresser contre les
« rebelles », les « étrangers » et contre les forces françaises et onusiennes.
GBAGBO se sert des « Jeunes patriotes » et de la FESCI pour occuper des rues et
des sites stratégiques à Abidjan, comme boucliers humains, pour prendre le
contrôle des médias, pour intimider le personnel judiciaire et les ONG de droits
de l’homme, ainsi que pour attaquer, tuer et intimider ses opposants politiques et
piller leurs propriétés.
23. GBAGBO peut compter sur BLÉ GOUDÉ afin de recruter des milliers de jeunes
au sein des FDS, principalement des groupes de l’Ouest et du Centre-ouest du
pays avec lesquels ils avaient des liens ethniques. BLÉ GOUDÉ lance des appels
au recrutement de jeunes au sein des FDS en 2003, 2010 et 2011. L’enrôlement de
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ces « recrutés BLÉ GOUDÉ » ou de ce « contingent BLÉ GOUDÉ » au sein des
FDS renforce la loyauté de certaines unités envers GBAGBO.
24. Dès la fin septembre 2002, la communauté internationale notamment l’Union
africaine, la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest («
CEDEAO »), l’ONU et la France, parraine plusieurs accords de paix afin de
résoudre le conflit.
25. Entre septembre 2002 et février 2004, plusieurs accords de cessez-le-feu entre les
deux camps sont adoptés, qui ne seront pas respectés. Le 27 février 2004 le
Conseil de sécurité des Nations Unies adopte la Résolution 1528 qui autorise le
déploiement d’une Opération de maintien de la paix des Nations Unies en Côte
d’Ivoire (« ONUCI »). L’ONUCI est opérationnelle dès le 4 avril 2004.
26. Déjà présente en Côte d’Ivoire avant la crise de 2002, l’armée française intervient
dès le lendemain de la tentative de coup d’état. Le 22 septembre 2002, la France
déploie la force Licorne afin de protéger ses ressortissants. À partir du 4 avril
2004, la force Licorne, en coordination avec l’ONUCI, reçoit le mandat de
maintenir la paix en Côte d’Ivoire.
27. Malgré les accords de paix, l’intervention de la communauté internationale et la
présence de forces d’interposition, le conflit continue et les deux camps
continuent de commettre des crimes contre la population civile, selon les
rapports des Nations Unies et de diverses ONGs. Les opposants de GBAGBO
l’accusent de revenir sur les accords de paix; le camp GBAGBO lance les mêmes
accusations contre les rebelles.
28. Du 24 au 26 mars 2004, les partis d’opposition manifestent ou tentent de le faire
dans Abidjan, notamment à Abobo, afin de dénoncer GBAGBO et son nonrespect
des accords de paix de Linas-Marcoussis. Afin d’empêcher ces
manifestations, GBAGBO réquisitionne les Forces Armées Nationales de Côte
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d’Ivoire (« FANCI ») qui, avec la police et la gendarmerie, tirent à balles réelles
sur les manifestants et causent la mort d’environ 120 civils. Des combattants
étrangers, des miliciens du GPP et des jeunes pro-Gbagbo, notamment des jeunes
patriotes et des membres de la FESCI, participent à la répression de ces
manifestations, pendant lesquelles des viols sont également commis. Le
commandant en chef de la Garde Républicaine (« GR »), Brunot DOGBO BLÉ est
également impliqué dans la répression de ces manifestations. Deux policiers
trouvent la mort pendant ces manifestations, tués par des manifestants dans le
quartier PK18 à Abobo. GBAGBO condamne la manifestation en la qualifiant de
« tentative d’insurrection ».
29. Dans les jours qui suivent, des éléments des FDS mènent des opérations, de nuit,
notamment à Abobo, où ils tuent et enlèvent des civils. Ces éléments des FDS,
notamment la GR, sont soutenus par des miliciens et des groupes armés dits
« parallèles » qui participent aux attaques contre les civils. Ces groupes
« parallèles » ne font pas partie de la structure officielle des FDS et reçoivent
leurs ordres en dehors de la hiérarchie officielle.
30. Le 25 mai 2004, une Commission d’enquête internationale est mise en place
conformement à l’annexe VI de l’accord de Linas-Marcoussis et à une déclaration
de la présidence du Conseil de Sécurité des Nations Unies, afin d’enquêter sur
les violations des droits de l’homme en Côte d’Ivoire. Cette commission dénonce
les crimes graves commis par les deux camps et constate que la justice ivoirienne
ne conduit pas d’enquête « sérieuse » sur ces crimes. Le rapport note, au sujet des
« Jeunes patriotes » de BLÉ GOUDÉ, que plusieurs de leurs opérations ont été
organisées à la suite de décisions politiques du président GBAGBO et que ces
manifestations sont souvent violentes et accompagnées de pillages.
31. Le 4 novembre 2004, les FDS violent le cessez-le-feu intégral du 3 mai 2003 et
bombardent les forces rebelles au Nord pendant « l’Opération Dignité ». Le 6
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novembre 2004, neuf soldats français sont tués lors d’un raid de l’armée de l’air
ivoirienne à Bouaké. En réponse à cette attaque, la force Licorne détruit les
aéronefs de l’armée de l’air ivoirienne à Yamoussoukro. Suite à ces évènements,
BLÉ GOUDÉ incite les jeunes pro-Gbagbo à attaquer les Français et autres
étrangers, ce qui entraîne des actes de pillage, des viols et d’autres crimes graves
contre des civils, essentiellement étrangers, à Abidjan et ailleurs dans le pays. Le
9 novembre 2004, une confrontation a lieu vers l’Hôtel Ivoire entre la force
Licorne et une foule de militants pro-Gbagbo. Les forces françaises ouvrent le
feu, causant la mort d’au moins une vingtaine de personnes, ce bilan étant
contesté par les pro-Gbagbo.
32. Le 15 novembre 2004, l’ONU impose un embargo sur les armes en Côte d’Ivoire.
Le Conseil de sécurité de l’ONU condamne l’action d’individus qui incitent à la
haine envers les étrangers et empêchent les activités de l’ONUCI. Par la suite, le 7
février 2006, l’ONU imposera des sanctions individuelles contre BLÉ GOUDÉ
pour ses déclarations publiques incitant à la violence contre les étrangers et
contre l’ONU et pour sa responsabilité dans les exécutions extrajudiciaires, viols
et autres crimes commis par des milices.
33. En mai 2005, diverses parties d’opposition, notamment le Rassemblement Des
Républicains de Côte d’Ivoire (« RDR ») de Alassane OUATTARA et le Parti
Démocratique de Côte d’Ivoire (« PDCI ») de Henri Konan BÉDIÉ, forment « le
Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix » (« RHDP »),
une alliance opposée à GBAGBO.
34. En 2007, suite aux pressions exercées par la communauté internationale,
GBAGBO signe l’accord politique de Ouagadougou qui pose les conditions de
l’organisation de l’élection présidentielle, notamment le désarmement des
milices des deux camps. Le désarmement n’a pas réellement lieu et les milices
tant pro-Gbagbo que celles dites « rebelles » conservent leurs armes. De plus,
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malgré l’obligation de démobilisation, les milices pro-Gbagbo maintiennent leurs
structures et, jusqu’en 2011, se considèreront toujours comme des « groupes
d’auto-défense ».
35. En dépit de l’embargo de novembre 2004, GBAGBO cherche à acheter des armes,
notamment par le biais de Bertin KADET, Ministre de la Défense devenu son
conseiller spécial, et d’Anselme SEKA YAPO, l’aide-de-camp de Simone
GBAGBO. Il y parviendra à plusieurs reprises, en particulier en 2010 pendant la
période de préparation de l’élection présidentielle. Il en recevra également en
2011 et poursuivra ses démarches tout au long de la période couverte par les
charges.
36. De plus, depuis au moins septembre 2002, le régime de GBAGBO est aussi
marqué par des meurtres et disparitions forcées attribués à Anselme SEKA
YAPO et des éléments militaires et paramilitaires connus sous l’appellation
« l’escadron de la mort ».
37. Jusqu’en 2010, l’opposition et la communauté internationale accusent GBAGBO
de mauvaise foi à cause du report répétitif des élections, en raison en particulier
d’un processus d’enregistrement des électeurs marqué par de nombreuses
lenteurs et blocages, le camp présidentiel s’opposant, parfois violemment, à
l’inscription des populations du Nord sur la liste électorale. Le 12 février 2010,
GBAGBO dissout le gouvernement et la Commission Électorale Indépendante
(« CEI »), ce qui entraîne des manifestations qui seront violemment réprimées
par les FDS causant la mort de plusieurs civils. Le 5 août 2010, GBAGBO
convoque le collège électoral afin de procéder à l’élection du Président de la
République. Le premier tour de l’élection a lieu le 31 octobre 2010.
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4. RÉSUMÉ DES FAITS DE L’AFFAIRE
38. Depuis le coup d’État manqué en 2002, la communauté internationale a été
impliqué de façon continue dans la résolution du conflit en Côte d’Ivoire et afin
d’établir un processus électoral impartial et équitable. En dépit des efforts de
GBAGBO, depuis au moins 2005, pour reporter les élections, il a dû céder aux
pressions exercées par la communauté internationale et a annoncé, en 2010,
l’élection présidentielle, la première à se dérouler en Côte d’Ivoire depuis 2000.
39. GBAGBO était déterminé à rester au pouvoir. Au plus tard avant le deuxième
tour de l’élection présidentielle de 2010, aidé par son entourage immédiat,
GBAGBO a élaboré un Plan visant à attaquer son rival politique Alassane
Dramane OUATTARA (« OUATTARA ») ainsi que des membres du cercle
politique de celui-ci et des civils considérés comme ses partisans, dans le but de
conserver le pouvoir par tous les moyens y compris la force létale. Ce Plan
commun a été mise en oeuvre par les forces pro-Gbagbo, lesquelles, sous
l’autorité et le contrôle conjointement exercés par celui-ci et son entourage
immédiat, ont perpétré l’attaque systématique et généralisée contre des civils, et
notamment les crimes reprochés dans le présent document.
40. Avant l’élection, GBAGBO avait déjà pris des dispositions dans la poursuite du
Plan commun pour faire en sorte de se maintenir au pouvoir en cas de défaite
électorale. Il a consolidé son autorité absolue ainsi que le contrôle qu’il exerçait
sur les FDS. Celles-ci étaient constituées de cinq composantes principales qui ont
pris part à la commission des crimes : les forces armées (« FANCI »), la
gendarmerie, la Garde Républicaine (« GR »), le Centre de Commandement des
Opérations de Sécurité (« CECOS ») et la police. Lors de la crise post-électorale,
sur ordre de GBAGBO, les opérations des FDS ont été coordonnées par le Chef
d’État-Major (« CEMA ») des forces armées, le général Philippe MANGOU, mais
au plus tard à partir du 31 mars 2011, le général DOGBO BLÉ a pris le contrôle de
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facto des opérations des forces pro-Gbagbo. De plus, GBAGBO contournait selon
sa volonté la hiérarchie officielle des FDS, en utilisant une chaîne de
commandement « parallèle », qui était composée de ses inconditionels au sein
des FDS. GBAGBO a ainsi pu compter durant la crise post-électorale sur ses
hommes-clés au sein des FDS afin d’exécuter le Plan commun. GBAGBO a, en
outre, renforcé les FDS, en recrutant des jeunes pro-Gbagbo, des miliciens et des
mercenaires, dont beaucoup ont été intégrés dans la chaîne de commandement
des FDS. GBAGBO s’est également assuré que les forces qui lui étaient restées
loyales étaient entraînées, financées et armées convenablement.
41. Le premier tour de l’élection présidentielle a eu lieu le 31 octobre 2010. Les trois
principaux candidats étaient GBAGBO, pour le FPI, OUATTARA, pour le RDR,
et BÉDIÉ, pour le PDCI. Depuis 2005, OUATTARA et BÉDIÉ faisaient alliance
avec d’autres partis politiques sous l’appellation de RHDP, mais ils se sont
présentés séparemment au premier tour de l’élection présidentielle. Aux résultats
du premier tour (GBAGBO 38,04%, OUATTARA 32,07%, BÉDIÉ 25,24%), aucun
candidat n’a reçu la majorité absolue ; GBAGBO et OUATTARA sont passés au
second tour. Le 7 novembre 2010, BÉDIÉ a annoncé son soutien à OUATTARA,
qui est devenu le candidat du RHDP au second tour. GBAGBO avait le soutien
de « La Majorité Présidentielle » (« LMP »), une alliance entre son Front
Populaire Ivoirien (« FPI ») et d’autres partis politiques, mais OUATTARA, fort
de l’appui du PDCI et des autres partis politiques du RHDP, devenait le favori
pour gagner l’élection. GBAGBO a alors mis en oeuvre le Plan commun afin de
rester au pouvoir en utilisant la violence contre les militants de OUATTARA et
des civils perçus comme soutenant l’opposition.
42. Le second tour de l’élection présidentielle a eu lieu le 28 novembre 2010 et
l’annonce des résultats était prévue le 1décembre 2010. Le 2 décembre, le
Président de la CEI a annoncé les résultats provisoires et déclaré que
OUATTARA avait remporté 54,1% des voix et GBAGBO 45,9%. Le 3 décembre, le
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Président du Conseil constitutionnel, un allié de GBAGBO, a invalidé la décision
de la CEI et annoncé la victoire de celui-ci. Les deux candidats se sont proclamés
simultanément Président de la Côte d’Ivoire. Cependant, le 4 décembre, le
Conseil constitutionnel a fait prêter serment à GBAGBO pour un nouveau
mandat présidentiel. Peu après, OUATTARA prêtait serment par écrit en tant
que Président de la République. Les deux camps ont alors formé leurs
gouvernements respectifs.
43. S’en est suivi une crise post-électorale, lors de laquelle des milliers de partisans
de OUATTARA se sont rassemblés dans les rues d’Abidjan et dans d’autres
parties du pays pour réclamer la démission de GBAGBO. La communauté
internationale, dont l’ONU, l’Union africaine, la Communauté Économique des
États de l’Afrique de l’Ouest (« CEDEAO ») et l’Union européenne, a également
reconnu la victoire de OUATTARA et exhorté GBAGBO à céder le pouvoir.
44. Au plus tard à la fin du processus électoral, GBAGBO a mobilisé les forces qui lui
étaient subordonnées et les a organisées dans le but d’appliquer le Plan commun.
GBAGBO et son entourage immédiat ont conjointement autorisé une attaque à
l’encontre de civils, y compris l’usage de la force létale, dans la poursuite du Plan
commun.
45. OUATTARA et des membres de son gouvernement nouvellement nommés
étaient basés à l’Hôtel du Golf à Cocody, une commune d’Abidjan. Ils se
trouvaient sous la protection des forces de l’ONUCI. À partir du 14 décembre,
GBAGBO a ordonné à ses forces armées d’assiéger l’Hôtel du Golf et ses
résidents. Ce siège, qui a été maintenu jusqu’à la fin de la crise post-électorale,
s’est notamment traduit par le harcèlement des soldats de l’ONU, de violentes
offensives dirigées à l’encontre des partisans présumés de OUATTARA dans les
environs de l’Hôtel du Golf et l’attaque de ce bâtiment par les forces pro-Gbagbo.
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46. Tout au long de la crise post-électorale, GBAGBO a tenu des réunions et
maintenu un contact régulier avec son entourage immédiat et les principaux
commandants des FDS, afin de faire le point sur le Plan commun et d’en
coordonner la mise en oeuvre. Il a également donné à ses subordonnés des
instructions pour appliquer le Plan commun et a été tenu au courant des
réunions organisées par ceux-ci à cet effet. Simone GBAGBO et d’autres
membres de l’entourage immédiat de GBAGBO ont également donné des
consignes concernant l’application du Plan commun. Cependant, ces dernières
étaient toujours communiquées au vu ou au su de GBAGBO et avec son
autorisation.
47. Les ordres de GBAGBO et des membres de son entourage immédiat étaient
transmis par les commandants des FDS à leurs subordonnés respectifs, qui les
exécutaient. Celles-ci ont fait usage d’un éventail d’armes y compris des « armes
de guerre ». Les ordres de GBAGBO étaient aussi transmis aux jeunes pro-
Gbagbo, aux miliciens et aux mercenaires, qui, avec les FDS, constituaient les
« forces pro-Gbagbo » et ont exécuté le Plan commun.
48. En conséquence, la mise en oeuvre coordonnée du Plan commun a abouti à
l’attaque systématique et généralisée à l’encontre de civils pris pour des partisans
de OUATTARA, et aux crimes reprochés en l’espèce. Entre le 27 novembre 2010
et le 8 mai 2011, les forces pro-Gbagbo ont attaqué les civils considérés comme
partisans de OUATTARA. Elles ont tué plus de 1000 personnes et ont violé plus
de 40 personnes. Elles ont aussi arbitrairement arrêté au moins 520 personnes et
ont infligé à plus de 140 personnes de grandes souffrances et des atteintes graves
à leur intégrité physique. Ces crimes ont été commis avec une intention
discriminatoire pour des motifs d’ordre politique, national, ethnique et religieux.
49. À partir du 23 février 2011, l’Ouest de la Côte d’Ivoire est devenu le théâtre d’un
conflit armé ne revêtant pas un caractère international entre les forces pro-
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Gbagbo et les forces fidèles à OUATTARA. Ces dernières comprenaient les
Forces Nouvelles et disposaient du soutien d’un groupe de défense appelé les
dozos, qui était issu de différentes tribus, et d’un groupe de miliciens burkinabé.
Les forces fidèles à OUATTARA avançaient en provenance du nord, ouest et
centre en direction du sud de la Côte d’Ivoire pour atteindre Abidjan le 31 mars
2011. Bien qu’il y ait eu de nombreuses défections parmi les FDS en février et
mars, à partir du 31 mars 2011, un nombre encore plus important d’officiers des
FDS ont déserté. Dès lors, GBAGBO et son entourage immédiat en sont venus à
s’appuyer de plus en plus sur les jeunes pro-Gbagbo, les miliciens et les
mercenaires pour mettre en oeuvre le Plan commun.
50. Le 11 avril 2011, à la suite d’opérations militaires menées par des forces fidèles à
OUATTARA et soutenues par l’ONUCI et la force Licorne, GBAGBO est arrêté
par le gouvernement de OUATTARA et assigné à résidence. Les forces pro-
Gbagbo ont continué à commettre des crimes contre les civils pris pour des
partisans de OUATTARA jusqu’au 8 mai 2011 au moins. Les crimes en question
s’inscrivaient dans le cadre d’une attaque généralisée et systématique menée
contre la population civile à l’initiative de GBAGBO et de son entourage
immédiat dans la poursuite du Plan commun.
5. COMPÉTENCES RATIONE LOCI, RATIONE TEMPORIS ET
RATIONE MATERIAE
51. La République de Côte d’Ivoire est un État partie au Statut de Rome depuis le 15
février 2013. Déjà, le 1octobre 2003, le Gouvernement de la Côte d’Ivoire a
reconnu, par déclaration datée du 18 avril 2003, la compétence de la Cour pour
juger les crimes commis sur le territoire ivoirien à compter du 19 septembre 2002.
Cette déclaration autorise donc la Cour à exercer sa compétence conformément à
l’article 12-3 du Statut de Rome.
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52. Le 14 décembre 2010, le Procureur, le Président et le Greffier de la Cour ont reçu
une lettre de OUATTARA, en sa qualité de Président de la Côte d’Ivoire,
confirmant la prorogation de la validité de la Déclaration du 18 avril 2003. Une
deuxième lettre à cet effet a été reçue le 4 mai 2011.
53. Le 23 juin 2011, l’Accusation, ayant conclu qu’il existait une base raisonnable
pour ouvrir une enquête, a demandé à la Chambre préliminaire III l’autorisation
d’enquêter sur la situation en Côte d’Ivoire à compter du 28 novembre 2010, au
titre de l’article 15-3 du Statut de Rome. Le 3 octobre 2011, la Chambre
préliminaire a autorisé l’Accusation à enquêter sur les crimes relevant de la
compétence de la Cour commis depuis le 28 novembre 2010 dans le cadre de
cette situation. Le 22 février 2012, la Chambre a étendu cette autorisation pour
inclure les crimes relevant de la compétence de la Cour commis entre le 19
septembre 2002 et le 28 novembre 2010.
54. Tous les crimes reprochés dans le présent Document amendé de notification des
charges (« Document »), ont eu lieu sur le territoire de la Côte d’Ivoire après le
27 novembre 2010. Le meurtre, le viol et autres formes de violence sexuelle, la
persécution et d’autres actes inhumains constituent des crimes contre l’humanité
définis à l’article 7 du Statut.__....(Fin première partie).

Source: ICC/CPI

http://www.icc-cpi.int/iccdocs/doc/doc1710471.pdf