Côte d'Ivoire: L’incroyable investiture de Gbagbo à Mama

Par Aujourd'hui - Côte d'Ivoire. L’incroyable investiture de Gbagbo à Mama.

L’incroyable investiture de Gbagbo à Mama le 30 avril 2015.

Le troisième congrès extraordinaire du Front populaire ivoirien qui s’est tenu le 30 avril dernier, à Mama, a vu l’investiture du président Laurent Gbagbo à la présidence du FPI et l’exclusion du parti de Pascal Affi N’Guessan. Telles sont les grandes décisions qui ont sanctionnées ses assises qui ont connu un franc-succès en dépit de la non-tenue de la fête de la liberté.

Venus dès mercredi déjà de toutes les contrées du pays, les congressistes n’ont pu regagner Mama que le jeudi 30 avril pour la plupart. Car déjà aux environs de 20 heures, ce mercredi 29 avril, il n’y avait plus d’accès à Mama. Un contingent de 150 gendarmes avait en effet quadrillé le village, obligeant des centaines de militants à accéder au site qu’en passant par la brousse, et de nuit. Et c’est au petit matin, qu’ayant constaté que la population du village a été multipliée par 5 que les gendarmes se rendent compte qu’ils ne réussiront leur mission. Dès lors, ils décident de se rendre dans le village où ils tirent en l’air et lancent gaz lacrymogène et grenades aux bruits assourdissants. Pris de panique, la population recule d’abord. Puis, monte à la charge. Vers 8 heures, une masse populaire composée de jeunes et menée par Justin Koua réussit à faire reculer les 150 gendarmes et policiers qui battent en retraite jusqu’audelà du carrefour de Karahi, à 1 km du village.

11 heures, arrivée de Sangaré Abou Drahamane

Une fois la route libérée, Sangaré Abou Drahamane et sa délégation peuvent faire leur entrée dans le village. Il est 11 heures. A leur vu, l’hystérie s’empare des militants. Les uns dansent, les autres chantent des airs bien connus.: «On ne veut pas de violence ! On veut Gbagbo » ou encore « on va installer Gbagbo ». Ou encore « ne dites plus FPI tendance Sangaré ! Mais simplement le FPI. Parce que c’est le FPI qui est réuni ici à Mama, symbole désormais de la résurrection de la nouvelle côte d’Ivoire. Une Côte d’Ivoire qui résiste face à la mort », chantent-ils. Pendant ce temps, la délégation officielle fait son entrée à la résidence de l’ex-chef d’Etat Laurent Gbagbo, son fils Michel Gbagbo en tête du cortège. La foule grandit de plus belle et la délégation à force de donner des coudes prend place dans la cour de la résidence où des aménagements ont été faits. Abou Drahamane Sangaré et ses camarades font ensuite la visite du domaine de l’ex-président. Des photos de Nelson Mandela, leader africain, Matin Luther King, Patrice Lumumba, sont accrochées au mur des salles. Les invités s’installent ensuite dans tout le domaine pendant que les cris des militants montent de partout. Le décor est planté pour la suite des évènements dans l’immense domaine résidentiel de Gbagbo. Les préparatifs qui avaient dû être momentanément arrêtés pour accueillir les hôtes du jour reprennent alors. On installe à nouveau les bâches et la sonorisation empêchées la veille par les forces de l’ordre. Le Congrès du FPI peut finalement avoir lieu. Et les décisions et résolutions sont lues en présence des militants et de la presse dans son ensemble. "Camarades, vous venez d’investir Laurent Gbagbo comme président du Front populaire ivoirien", a lancé Sébastien Dano Djédjé, président du 3ème congrès extraordinaire du FPI. Les militants présents, dont la plupart portaient un T-shirt à l’effigie de M. Gbagbo font le "V" de la victoire et hurlent de joie. "Affi n'existe plus. C'est du passé. Laurent Gbagbo a été élu président du FPI. Pour nous, c'est une victoire et tout un programme", lance Hubert Oulaye président du comité de contrôle dont l’équipe vient aussi d’être réélue. Dans une déclaration écrite, les partisans de Laurent Gbagbo annoncent qu’ils ne participeront pas à aucune élection tant que Gbagbo restera en prison. Ils exigent non seulement sa libération mais aussi celle de tous les prisonniers politiques, le retour des exilés, le dégel des comptes… Autre décision du congrès, l’ex-président du parti seulement reconnu par Ouattara est radié définitivement du parti pour indiscipline notoire. Ses autres camarades qui le suivent sont quant à eux frappés par un blâme.

La présence des forces de l’ordre renforcée

Suite à la déconvenue de la gendarmerie, la veille face à une jeunesse déterminée, le pouvoir décide de renforcer la présence militaire pour interdire tout rassemblement à Mama. Arrivés aux environs de 4h du matin dans la nuit du jeudi 30 avril au vendredi 1er mai, près de 300 éléments des forces républicaines de Côte d’Ivoire venus pour la plus part de Korhogo et de Daloa prêter main forte à leurs frères d’armes, investissent le village de Mama. Ils sont visiblement déterminés à en découdre avec les militants du FPI. Des informations relayées sur place affirment en effet qu’ils ont reçu l’ordre de tirer à vue en cas de résistance. Finalement après de longues heures de face-àface et de négociation la fête de la liberté qui devait avoir lieu le samedi 2 mai est annulée. Dès leur arrivée, les FRCI avaient déjà arraché les bâches et les chaises et empêché la délégation du FPI sortie la veille, aux environs de 22h de Mama pour regagner leur chambre d’hôtel, d’accéder à Mama pour la suite des activités. Toutes les discussions visant à lever les barrages n’aboutissent pas, les éléments du colonel Major Doumbia n’ayant pas voulu céder le moindre espace de liberté. Ouattara a pris l’organisation du congrès du FPI comme un échec personne, sans doute à cause de son investiture foirée. Les 300 FRCI avaient ainsi ordre d’interdire le rassemblement de Mama par tous les moyens. Malheureusement leur piège a été déjoué et l’investiture du président Laurent Gbagbo a eu lieu bien avant que les va-ten guerre arrivent. Après l’investiture ratée du stade Houphouët-Boigny, c’est un autre échec pour Ouattara. D’autant que la direction du Front populaire a décidé de suspendre la suite du programme. Laissant ainsi à la postérité de ne retenir, de ce week-end de terreur, que l’élection de Laurent Gbagbo investi comme le nouveau président du FPI dans son village. Mama qui, lui, entre dans l’histoire de la Côte d’Ivoire pour avoir en outre évité que 300 FRCI ayant reçu ordre d’en massacrer la population ne commettent l’irréparable.

Par GeorGette AFI envoyée spéciale à Mama