CÔTE D’IVOIRE: RÉPRESSION, CULTURE, ET L’EXODE DES JEUNES, par McIntosh Zadi

Par IvoireBusiness/ Débats et Opinions - CÔTE D’IVOIRE, RÉPRESSION, CULTURE, ET L’EXODE DES JEUNES, par McIntosh Zadi.

Gendarmes le 30 avril 2015 lors du Congrès du FPI à Mama.

La répression en Côte d’Ivoire continue malgré les tambours de Dramane Allassane Ouattara et de sa clique qui chantent puis dansent au rythme de leur réconciliation. Ailleurs, un pan d’une culture rependue en Côte d’Ivoire et ailleurs, l’excision, fait aussi fuir la jeunesse africaine et surtout ivoirienne.
DE LA RÉPRESSION DE DRAMANE ET DE L’EXODE
Notre enquête a été conduite au Maghreb et en Europe. La Tunisie et le Maroc où nous avons séjourné pendant deux mois, sont devenus des nations qui comptent depuis 2011 des milliers de réfugiés ivoiriens. Ces réfugiés sont dans la majorité des rescapés de la répression rampante d’Allassane Dramane Ouattara qui a accédé au pouvoir par les armes depuis 2011. Ces Ivoiriens portent des marques psychologiques qui les marqueront à jamais. Certains de interviewés, au moins 1000 sur les 2500 au Maroc et en Tunisie, ne se souviennent même pas de la route prise pour arriver dans ces deux pays où ils/elles sont traités (es) comme des animaux. En Tunisie par exemple, le noir est appelé « Guira » (singe). Au Maroc, les filles noires sont a priori traitées pour des prostituées. « Dès que les Marocains te voient dans la rue, dans le marché ou encore assise devant chez toi, ils te demandent combien tu prends pour passer la nuit avec eux », nous ont répété des dizaines de filles noires et des Ivoiriennes en particulier. Certaines ont d’ailleurs insisté que nous publions leurs noms dans notre travail. Ainsi, mesdemoiselles Gouin Lou Bernadette et sa camarade Zah Jeannette, des tresseuses, ont dû fermer leur boîte pour leur sécurité. Elles ont souffert d’harassements sexuels pendant deux ans. Quand elles ont refusé, les Marocains sont passés de la simple menace verbale à des menaces de mort. N’ayant pas le choix et surtout ayant automatiquement tort lorsqu’elles appellent la police, elles ont simplement jeté la clef sous le paillasson. Nous avons rencontré des centaines d’Ivoiriens qui sont déterminés à rester au Maroc et en Tunisie s’ils ne trouvent pas la voie de l’Occident. Ils ne refusent de retourner en Côte d’Ivoire parce qu’ils, disent-ils, ils ont peu de chance de vivre si jamais ils osaient. Ils soutiennent que le pouvoir d’Allassane Dramane Ouattara les cherche et ils préfèrent tenter leur chance sur la mer (mourir ou passer) que de retourner chez eux où ils ne sont pas certains de vivre. Il s’agit d’Ivoiriens de toutes les couches sociales (enseignants, planteurs, hommes et femmes d’affaire, etc.) En un mot, la répression de Dramane Ouattara en Côte d’Ivoire transforme des Ivoiriens en esclave dans le Maghreb ou le racisme contre le noir est très exécrable, voire incomparable ailleurs dans le monde. Les passeports des travailleurs noirs en Tunisie comme et Maroc sont confisqués pendant une période de cinq (5) mois au minimum. Ceci est le prix à payer pour avoir un travail et un dortoir. Là-bas, ce genre de boulot s’appelle «du travail-couchant». Beaucoup de travailleurs noirs, ayant fui le travail intenable avant la période fixée par l’employeur, demeurent dans ces nations sans aucun document. Dans les deux pays, le noir est une chose dont on s’en sert et jette quand on le veut. Les plus chanceux qui sont arrivés en Europe sont très loin de sortir de l’auberge. En Italie, dans le camp des réfugiés de Lampedusa, les Ivoiriens que nous avons rencontrés parlent de leurs « désastreuses conditions de vie » tout en écartant l’idée d’un quelconque retour sous le régime de Dramane Ouattara. La situation est similaire dans le camp de réfugiés de la Province de Belluno. En Angleterre, nous avons rencontré Tiamiyu Hamed Adérélé. Il est un militant du Front Populaire Ivoirien. Il avait été porté disparu depuis l’an 2011 suite à la prise de pouvoir par Dramane Ouattara par les armes. Dans son numéro 114 du 30 avril au 03 mai 2015, le journal ‘Le Bélier’, parle de la disparition de monsieur Tiamiyu Hamed Adérélé suite aux attaques des forces de Dramane Ouattara contre toute la famille du militant du FPI. «Heureusement, j’ai pu échapper à la mort. Je dirai que le miracle existe», nous a répondu monsieur Tiamiyu Hamed Adérélé qui, visiblement vivait encore ce qu’il a traversé comme problème. Il dit qu’il ne voulait pas trop aborder les conséquences que son soutien au Président Laurent Gbagbo lui a attirées, car en parler lui donne toujours des insomnies et qu’il lui arrive de se réveiller en sursaut durant son sommeil. Le problème monsieur Tiamiyu Hamed Adérélé est difficile parce que «les militants du RDR le voient comme un traitre…il a un nom musulman et donc ces derniers pensent qu’il doit automatiquement appartenir au RDR que beaucoup de ses militants voient comme un parti des gens du nord ivoirien», nous a confié le compagnon de monsieur Tiamiyu Hamed Adérélé qui a opté pour l’anonymat. D’autres Ivoiriens sont dans le même cas que monsieur Tiamiyu Hamed Adérélé. Monsieur Tra Bi Foua Jean-Louis qui, malgré son éloignement de son pays pendant un nombre considérable d’années, aurait reçu plusieurs appels anonymes le menaçant pour son appartenance au FPI. Dans cette situation, des femmes sont aussi des victimes de la répression interne et externe de Dramane Ouattara, le candidat de « la communauté internationale ». Mesdemoiselles Martine Gblon Kouamé, Koné Amy et Awa Rokiatou Touré et Zouzoua Georgette ont récemment regagné l’Angleterre sur un coup de chance. Elles attendent avec anxiété le résultat de leurs demandes d’asile.
L’EXCISION, LE MARIAGE FORCÉ ET L’EXODE DES FEMMES
Au Maghreb comme en Europe, nous avons rencontré de nombreuses jeunes dames qui fuient l’Afrique et la Côte d’Ivoire en particulier à cause du couple «excision-mariage forcé». Au Maroc, cinq Ivoiriennes, dans l’anonymat, nous ont confié qu’elles préfèrent l’esclavage «au traitement inhumain que leur réservent leurs familles». Dix jeunes filles ivoiriennes ont tenu le même langage en Tunisie où elles sont initialement venues poursuivre leurs études. En Angleterre, les filles qui ont échappé au mariage forcé et à l’excision sont nombreuses. Mais peu d’entre elles ont le courage de parler. Ainsi, nous avons pu échanger avec Awa Rokiatou Touré citée plus haut, sur ce sujet. Elle dit être venue en Angleterre pour ses études. Cependant, elle a décidé de ne plus repartir parce qu’une menace d’épouser un homme de 70 ans qui a déjà trois (3) femmes en passant par l’épreuve de l’excision plane sur elle. Elle nous a confié qu’elle choisirait le suicide au mariage forcé et à l’excision qui l’attendent dès son retour en Côte d’Ivoire. Malgré le fait que la Côte d’Ivoire soit signataire des accords internationaux (ONU) et les dispositions locales bannissant l’excision, la pratique connue sous le nom de MSF (mutilation sexuelles féminines) continue de faire son petit bonhomme de chemin. Les tenants de cette pratique ne démordent pas et ce ne sont pas les justifications qui manquent. Une femme excisée est plus fidèle que celle qui ne l’est pas, disent-ils. Vrai ou faux, nous pensons que la femme doit avoir la liberté de choisir son époux et d’aller ou non sous le couteau qui très souvent, n’est pas stérilisée et sert malheureusement à plusieurs opérations. Pour les activistes comme Philomène Tiehi qui continue de combattre l’excision, toute personne qui pratique «ce crime doit aller directement derrière les barreaux».

Une contribution de McIntosh Zadi